Cameroun: comment le coronavirus affecte la vaccination de routine

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Le 05/07/2020 à 07h38, mis à jour le 06/07/2020 à 17h16

Hôpitaux désertés, campagnes d’immunisation reportées, etc., la pandémie actuelle compromet fortement la prise en charge de la santé des tout-petits. Des mesures sont néanmoins prises pour maintenir les services de vaccination systématique, en assurant la sécurité des communautés et des soignants.

La pandémie de coronavirus (Covid-19) compromet fortement la vaccination de routine au Cameroun. Par peur de contracter la maladie, des parents désertent les hôpitaux. Pourtant, les services de vaccination sont toujours opérationnels et des mesures ont été mises sur pied pour la prise en charge de la santé des tout-petits en toute sécurité dans les formations sanitaires.

Selon la plateforme de collecte de données Data Cameroun, le nombre d’enfants vaccinés a chuté, passant de 250 à 110. Ce, alors qu’il est prouvé que la vaccination de routine est le seul moyen de garantir que tous les enfants soient protégés des maladies mortelles et invalidantes. Cette situation met en péril les efforts du pays à protéger le plus grand nombre d’enfants contre le maximum de maladies évitables par la vaccination.

Celle-ci compte en effet parmi les mesures de santé publique les plus efficaces permettant de prévenir la mortalité, la morbidité ainsi que les complications des maladies infectieuses. D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), près de 3 millions de décès sont évités annuellement dans le monde grâce à la vaccination, et 1,5 million d’autres morts pourraient être évitées simplement si la couverture vaccinale est améliorée. Actuellement, le Cameroun fait face à une épidémie de rougeole.

Quelque 1.200 cas confirmés ont été notifiés dans huit des dix régions du pays, dont onze décès. Cette hausse des cas s’explique par le fait que les enfants ne sont pas suffisamment vaccinés. «50 % des cas sont des bébés dont l’âge varie entre 9 et 59 mois, tandis que 74% des cas confirmés ne sont pas vaccinés», indique le Programme élargi de vaccination (PEV).

Même si l’épidémie de rougeole a été déclarée avant le coronavirus, les choses se sont aggravées depuis la survenue de la pandémie qui a mis à mal les activités de surveillance et de vaccination. Selon le PEV, les équipes de lutte disponibles sont plutôt engagées dans la riposte au Covid-19 et ne remontent pas les données au niveau requis. Mi-avril, l’Initiative contre la rougeole et la rubéole alertait que plus de 117 millions d’enfants dans 37 pays, dont beaucoup sont situés dans des régions touchées par des épidémies de rougeole, risquent de ne pas être vaccinés, car plusieurs pays ont décidé de suspendre ou de reporter les campagnes de vaccination contre cette maladie éruptive très contagieuse afin d’enrayer la propagation du Covid-19.

Face à la menace du coronavirus, le ministre de la Santé publique, Manaouda Malachie, a reporté à une «date ultérieure» les journées nationales de vaccination de riposte contre la poliomyélite, initialement prévues du 21 au 23 mars dernier. Le 28 juin dernier, le Cameroun a réceptionné une cargaison de vaccins contre la tuberculose, la polio et la fièvre jaune destinés à l’immunisation des enfants. Une livraison qui arrive à point nommé pour combler une tension qui a failli être préjudiciable à la continuité de la vaccination dans le pays, indique-t-on au PEV. Selon un plan d’approvisionnement élaboré en début d’année, le Cameroun acquiert les vaccins utilisés dans la vaccination de routine par voie aérienne. Mais ce calendrier n’a pas été respecté depuis trois mois, à cause de la fermeture des usines de fabrication due au confinement total observé en Europe et Asie.

«La conséquence de cette situation s’est traduite dans l’impossibilité pour le pays de commander les vaccins et d’approvisionner normalement les formations sanitaires», indique le PEV. Pour l’UNICEF, cette épidémie montre à quel point les vaccins sont importants. «Sans la protection de la vaccination, les maladies risquent de se propager rapidement et d’avoir des conséquences catastrophiques. Nous sommes toujours menacés par la rougeole et par d’autres maladies, par exemple, et nous avons beaucoup de chance d’avoir la possibilité de nous faire vacciner contre ces maladies», affirme cette agence onusienne. Sur place au Cameroun, les autorités appellent les parents à respecter le calendrier vaccinal des enfants. Le pays enregistre 13.711 cas positifs, dont 11.114 guéris et 328 décès au 1er juillet 2020. 

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 05/07/2020 à 07h38, mis à jour le 06/07/2020 à 17h16