Les forêts du bassin du Congo menacées par la surexploitation des ressources et le braconnage

VidéoMalgré la création d’un espace de gestion concertée des forêts du Cameroun, du Congo et du Gabon, la déforestation et le braconnage s’intensifient dans la forêt TRIDOM, qui fait partie du bassin du Congo, deuxième poumon écologique du monde après l’Amazonie.

Le 30/05/2022 à 13h30, mis à jour le 30/05/2022 à 14h55

Tirant son nom des initiales de trois aires protégées, la Trinationale Dja-Odzala-Minkébé (TRIDOM) est une forêt à cheval entre le Cameroun, la République du Congo et le Gabon. Il a été créé en 2005 et s’étend sur une superficie d’environ 18 millions d’hectares. La TRIDOM est constituée de 11 aires protégées abritant plusieurs espèces animales et végétales, notamment les éléphants dont la population est évaluée à environ 1.000 individus, les gorilles au nombre de 3.000, les buffles et les chimpanzés. La TRIDOM représente les 10% du bassin du Congo, second poumon écologique de la planète après l’Amazonie. 

Ce projet avait été mis sur pied dans l’espoir de coordonner toutes les activités de protection de la biodiversité dans cette zone, notamment la lutte efficace contre la déforestation et le braconnage qui y sévissent. «On s’est rendu compte que les activités qu’on pouvait mener dans un pays avaient un certain impact dans le pays riverain et vice-versa. Pire encore, les braconniers se jouaient constamment des nationalités, c’est-à-dire qu'arrêtés, par exemple, au Cameroun, ils déclaraient qu’ils sont plutôt de nationalité congolaise ou gabonaise, ce qui limitait les actions immédiates», nous a confié un responsable de l’ONG internationale WWF.

Dans la perspective de mieux protéger cette biodiversité, la TRIDOM avait intégré la conservation inclusive des forêts et de la faune en mettant les populations locales et les communautés locales au centre des préoccupations. C’est pourquoi presque la moitié des gains du système de taxation lié à l’exploitation forestière et faunique est reversée aux forêts communales et aux forêts communautaires. De plus, les zones d’intérêt synergique à gestion communautaire avaient été créées pour permettre aux communautés de jouir des protéines animales de leurs localités.

Malheureusement, les fruits n’ont pas tenu la promesse des fleurs. Le braconnage et la déforestation ont repris corps, mettant en danger les espèces protégées comme les éléphants, les gorilles et les chimpanzés menacés pourtant d’extinction. La zone avait déjà perdu près de 70% d’éléphants en 10 ans à cause du marché de l’ivoire. L’habitat des chimpanzés est de plus en plus détruit à cause de la déforestation.

Les chefs des communautés et les élus locaux rencontrés sur le terrain regrettent que les activités du projet TRIDOM aient été arrêtées sans aucune explication. «Lorsque que ce projet est arrivé, nous nous sommes impliqués, croyant que les activités allaient se poursuivre. Malheureusement, plus rien n’est visible. Les petits emplois que les ONG avaient donné à nos enfants se sont arrêtés. Jusqu’à quand allons-nous continuer à respecter les zones de chasse lorsque nos familles ont besoin de se nourrir, de se vêtir et d’éduquer nos enfants? Nous voyons pourtant les étrangers exploiter nos forêts. Certains creusent même les minerais, mais nous ne pouvons rien entreprendre. Vivement que les activités du TRIDOM reprennent», nous a confié un chef d’une communauté locale vivant à Ngoyla, dans la région de l’Est-Cameroun.

Par Jean-Paul Mbia (Yaounde, correspondance)
Le 30/05/2022 à 13h30, mis à jour le 30/05/2022 à 14h55