Abidjan, vers la fin des pénuries d’eau?

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Le 10/02/2017 à 19h05, mis à jour le 10/02/2017 à 19h08

Abidjan a soif. Pour s’en rendre compte il faut s’éloigner du cœur de la capitale et de ses beaux quartiers jusqu'à atteindre Abobo, un quartier populaire. Toutefois, cette situation de pénurie devrait prendre fin en mai prochain, promet le ministre ivoirien des Infrastructures économiques.

Si elles ne se réveillent pas très tôt le matin pour tenter de recueillir une hypothétique goutte d’eau, les populations abidjanaises doivent parcourir, chaque jour, plusieurs kilomètres pour remplir des sauts d'eau ou des bidons de 20 litres. Au mieux, elles doivent attendre le passage de charretiers pour se procurer un ou deux bidons pour la cuisine.

«Parfois on n’a rien pour la lessive pendant une semaine. La douche, on la prend une fois par jour. Ce n’est pas sain, mais nous n’avons pas le choix», se désole Julien Béda, habitant d’Abobo. Dans ce quartier, les populations ne reçoivent pas la moindre goutte d’eau depuis trois mois. «Et personne ne s’en émeut», fustige Béda, contraint de passer son week-end à remplir ces six bidons de 20 litres chacun, plutôt que de se reposer, après cinq jours de travaux éprouvant sur un chantier de construction de logements sociaux, où il est engagé.

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Comme lui, ce sont une centaine de milliers d’habitants d’Abobo qui vivent le calvaire de la pénurie d’eau. Et plus proche de cette commune, se trouve la plus grande, Yopougon (ouest d’Abidjan) et son million d’habitants qui sont régulièrement confrontés à la même difficulté. Dans la zone industrielle, notamment, il n’est pas rare d'observer des bousculades et des empoignades au sein de la population en quête d’eau.

«A Yopougon, nous les résidents de Micao à la zone industrielle, nous faisons régulièrement face à la pénurie d’eau. Parfois, il faut attendre trois semaines pour trouver de l’eau au robinet. Alors quand il y a un point de fortune, tout le monde se rue là-bas et cela provoque très souvent de la bagarre», raconte Odile Konan, ménagère.

Plus de 660 millions de personnes n'ont pas accès à l'eau potable

Et pourtant, trois châteaux d’eau ont été inaugurés ces trois dernières années à Abidjan (au déficit de 200.000 M3/jour) et dans ses environs. Parmi ces châteaux, celui de Bonoua (45 km d’Abidjan), entré en fonction en 2015 devrait approvisionner en eau potable près de deux millions de personnes vivant dans la capitale économique et dans deux communes à proximité. Le château d’eau était censé produire 80.000 m3/jour dans sa première phase pour atteindre 740 000 m3/jour en 2016.

Celui de Yopougon-Niangon 2 (ouest d’Abidjan) devait combler 80% des besoins des populations de cette commune avec une production de 25.000 m3/jour. Quant au dernier, à Cocody-Angré (est), à proximité d’Abobo il devait fournir 20.000 m3/jour.

Malgré tous ces acquis au niveau des infrastructures pour 250 milliards FCFA d’investissement, le problème perdure au grand dam des populations. Et pour les techniciens, la difficulté ne réside pas dans le manque d’eau, mais dans la mauvaise répartition due à l’absence d’entretien des canaux de distribution qui auraient été affecté pendant la longue crise post-électorale que le pays a traversée (2002-2011).

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«La production est là, il y a juste le problème de distribution qu’il faut chercher à régler. Une fois cela fait, les cinq millions d’habitants d’Abidjan seront régulièrement approvisionnés en eau potable», a indiqué Berté Ibrahiman, directeur de l’Office national de l’eau potable (ONEP).

D'ici le mois de mai prochain, assure-t-il, la pénurie d’eau pour les populations d’Abobo-nord ne devrait être qu'un vieux souvenir. Cette promesse avait déjà été faite, reste à espérer la métropole pourra définitivement étancher sa soif d’ici les trois prochains mois.

Par Georges Moihet (Abidjan, correspondance)
Le 10/02/2017 à 19h05, mis à jour le 10/02/2017 à 19h08