Cameroun: «Mes chansons sont diffusées sur les radios avant même la sortie de l’album», les musiciens broient du noir

Le 26/06/2024 à 12h16

VidéoAdulés mais mal en point, de nombreux artistes camerounais ont du mal à vivre de leur musique. Se contentant de petits cachets qu’ils perçoivent lors de fêtes de particuliers, beaucoup de musiciens peinent à faire respecter leurs droits d’auteur.

Au Cameroun, l’art musical ne se limite pas aux seules supers stars comme feu Manu Dibango, Petit Pays, Lady Ponce, Grâce Deca ou encore Tsimi Toro. A côté de ces étoiles incomparables, le paysage musical compte également beaucoup d’autres artistes, bien connus localement comme Saint Bruno, Manga Lucky, Tonton Ebogo, Naelly Gap et Minks pour ne citer que ceux-là. Ce sont des artistes musiciens, chanteurs et interprètes spécialistes des rythmes comme le Bikutsi, le Makossa, le Ben Skin et la nouvelle trouvaille, le Mbolé.

Si la carrière des icônes se passe sans embûches notables, tel n’est pas le cas des autres qui peinent à décoller malgré leur volonté de faire éclore leurs talents tant à l’échelle nationale que mondiale. Leur notoriété se limite généralement à leurs départements d’origine.

Mais il faut dire que nombre d’entre eux ont maille à partir avec les lois régissant le droit d’auteur. Parfois, ce sont les responsables de gestion de ce droit qui feignent ou ignorent ces règles.

En conséquences, les revenus des artistes musiciens et chanteurs à la notoriété limitée, se résument aux petites ventes de leurs productions. Des ventes aussi obstruées par la piraterie qui s’est enracinée dans le pays depuis une vingtaine d’années.

Prince Junior est un artiste du Bikutsi, sait de quoi il en retournent, «honnêtement, je ne compte plus sur les ventes pour faire mon chiffre d’affaires. Pensez qu’avant même que mon album ne soit accessible au public, qu’il est déjà joué partout dans les bars et les chaines de radio. Dans ce contexte, est-ce que je peux en profiter? Je crois que non».

Et comment profitent-ils de leur art? A cette question un autre artiste que nous avons suivi dans un cabaret nous a confié: «Quand l’un de mes titres est aimé du public, les organisateurs d’évènements me contactent pour une prestation en playback contre versement d’une somme d’argent. Par semaine, je peux me faire 400.000 ou 60.000 fcfa. C’est comme cela que nous nous battons pour vivre de cette profession que nous avons choisie».

Ces artistes sont, malgré tout, conscients des efforts consentis par le gouvernement pour améliorer leurs conditions de vie. La Société Camerounaise de l’Art Musical (Socam), agréée par l’Etat, se bat également pour garantir le plein épanouissement des artistes. Mais la question de la collecte des fonds reste entièrement posée.

Par Jean-Paul Mbia (Yaounde, correspondance)
Le 26/06/2024 à 12h16