Il serait fastidieux de dresser la filmographie gabonaise, tant les productions sont anciennes, variées, traitant une panoplie de sujets aussi large que le continent africain, son terreau... jusqu’au cinéma d’anticipation porté à l’écran par Vincent Mbindzou avec son film «Koto et Kengué, les descendants» sorti en 2023.
Depuis quelques années, le cinéma gabonais tente de renaître de ses cendres. Longtemps étouffé par le manque de financements, de structures de formation et de réseaux de distribution, ce secteur artistique voit émerger des voix nouvelles, souvent solitaires, mais résolument déterminées à exister.
À Libreville comme ailleurs, des réalisateurs se battent pour produire, montrer et faire connaître leurs œuvres. Parmi eux, Géraldine Bissa, Scénariste-réalisatrice et Vincent Mbindzou incarnent cette résilience.
Scénariste de formation, Géraldine Mbindzou s’est lancée dans la réalisation en 2019. Elle décrit ce choix comme une nécessité face au manque de structures capables de porter ses projets à l’écran. «S’auto-produire lorsqu’on n’a pas de moyens, c’est véritablement un chemin de croix», confie-t-elle.
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Consciente des limites du système actuel, elle a pris le pari de créer sa propre structure de production, une ambition à la fois audacieuse et stratégique pour garder le contrôle sur ses créations.
Aujourd’hui, son engagement commence à porter ses fruits: elle vient d’être invitée à un festival au Bénin, une opportunité pour donner de la visibilité à son travail et sans nul doute pour tisser des liens avec d’autres professionnels africains.
Vincent Mbindzou: deux décennies de résilience créative
Vincent Mbindzou de son côté, incarne la ténacité. Autodidacte, il évolue depuis 2002 dans un écosystème cinématographique encore fragile. Auteur de plusieurs courts et longs métrages, comme «Koto et Kengué, les descendants» (2023), «La contre-attaque de Mouelet» (2011) et «Danse pour moi» (2013), il a su se maintenir dans la durée grâce à une foi inébranlable en son art. «Le parcours est difficile, mais en forçant mon destin, j’ai fini par établir un partenariat avec une maison de distribution en ligne», explique-t-il.
Ce contrat lui a permis de vendre ses productions à des chaînes internationales comme TV5 Monde, ouvrant ainsi une brèche pour d’autres réalisateurs gabonais.
Leurs témoignages illustrent une réalité contrastée: d’un côté, des initiatives individuelles qui prouvent que le talent existe; de l’autre, une absence criante de soutien institutionnel.
De nombreux observateurs l’affirment, si le cinéma gabonais veut réellement renaître, il doit être appuyé par une politique culturelle volontariste. Formation, financement, diffusion: sans ces leviers, les ambitions des réalisateurs risquent de rester des rêves inachevés.
Pourtant, les signaux positifs existent. Des festivals africains ouvrent de plus en plus leurs portes aux films gabonais, les plateformes numériques deviennent des relais efficaces, et une nouvelle génération, souvent formée en autodidacte, commence à se faire entendre.
«La renaissance du cinéma gabonais ne se fera pas en un jour», commente un cinéphile. Mais il reste d’avis qu’elle est en marche, portée par des artistes qui, malgré les obstacles, choisissent de créer. Comme Géraldine et Vincent, ils inventent leur propre voie, entre débrouille et détermination. Leur message est clair: avec ou sans appui, ils filmeront. Et c’est peut-être là que réside la vraie force du cinéma gabonais de demain.