Le Moyen-Orient et l’Afrique, régions prisées avec un milliard d’habitants et un potentiel de croissance immense, sont au cœur des plans des constructeurs automobiles mondiaux. C’est le cas pour Stellantis. Le groupe y est déjà solidement implanté avec un vaste réseau commercial, plusieurs usines et des centres d’ingénierie. Mais sa part de marché n’est que de 14,8% en 2023, explique Samir Cherfan, directeur des opérations Moyen-Orient et Afrique de Stellantis, lors de sa Journée des investisseurs 2024.
Les principaux marchés ciblés sont le Moyen-Orient, la Turquie, le Maghreb et l’Afrique du Sud, représentant un volume total de 4 millions d’unités. Au Moyen-Orient, Stellantis vise à doper ses ventes en s’appuyant sur ses marques américaines phares comme Jeep et Ram. En Afrique du Sud, pays clé représentant 37% du marché régional, le groupe misera sur la production locale d’un pick-up d’une tonne avec un approvisionnement en pièces à 40% depuis l’Inde. L’objectif affiché est d’atteindre 22% de part de marché d’ici 2030, soit un million de véhicules vendus.
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C’est dans ce contexte que Stellantis, le géant automobile issu de la fusion entre Fiat Chrysler et Peugeot, dévoile une stratégie audacieuse de «localisation profonde» pour conquérir les marchés émergents d’Afrique et du Moyen-Orient. Autant dire qu’il mise gros pour dominer l’Afrique et le Moyen-Orient. Avec des ambitions de leadership régional, le groupe vise une croissance fulgurante et une rentabilité accrue grâce à cette approche de production et d’approvisionnement locaux.
Trois piliers fondamentaux
La stratégie de « localisation profonde » repose sur trois piliers fondamentaux : un personnel local hautement qualifié, une production et un approvisionnement ancrés dans la région. En termes de ressources humaines, Stellantis mise sur une équipe locale jeune et diversifiée, comptant seulement 11 expatriés, laissant les équipes locales prendre les rênes avec une jeune équipe diversifiée. Une approche qui permettra une meilleure compréhension des spécificités régionales.
En matière de production, deux «poids lourds» vont émerger davantage: le Maroc et la Turquie. Avec des coûts de main-d’œuvre proches de la Chine, d’ici 2027, ces deux pays concentreront 80% de la production, soit 800.000 véhicules, et une capacité de production qui atteindra 1 million d’unités. Au total, 17 lignes de voitures couvrant tous les segments clés (berlines compactes, SUV, utilitaires, etc.) seront produites localement, afin de capter plus de 90% du potentiel de profit.
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Sur le plan des produits, l’objectif d’approvisionnement local sera également renforcé, passant de 35% à 90% d’ici 2030. Des capacités de production d’un million de véhicules seront mises en place, avec un objectif de plus de 80% de pièces locales. Cette stratégie « gagnant-gagnant » permettra au constructeur de réduire ses coûts tout en soutenant le développement économique régional.
La localisation de la production et de l’approvisionnement constitue le troisième pilier stratégique. Stellantis s’appuiera sur deux principales bases de production compétitives, au Maroc et en Turquie, offrant des coûts similaires à ceux de la Chine.
AFP
Cette stratégie de «localisation profonde» devrait lui permettre de générer des avantages compétitifs significatifs. En termes financiers, l’objectif est d’atteindre un bénéfice opérationnel courant de 3 milliards d’euros d’ici 2030, contre 2,5 milliards en 2023. Les revenus nets devraient passer de 10 milliards d’euros en 2023 à 15 milliards d’euros d’ici 2030, en incluant les coentreprises.
Sur le plan financier, les bénéfices opérationnels de la région Moyen-Orient/Afrique ont déjà bondi à 2,5 milliards d’euros en 2023, avec un ratio de profit supérieur à 20%. D’ici 2030, Stellantis vise 3 milliards d’euros, boostés par les gains d’efficacité issus de la localisation. La région deviendra alors un moteur de croissance majeur pour le groupe.
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Cependant, des défis subsistent, notamment la mise en place de chaînes d’approvisionnement robustes et compétitives. Le développement de l’électromobilité sera aussi crucial pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs urbains africains.
A cela s’ajoute le renforcement des positions au Moyen-Orient et en Afrique du Sud, l’optimisation des opérations en Turquie et au Maroc, ainsi que le développement des activités créatives.