S’éclipser sans demander son reste. Partir la queue entre les jambes. C’est tout ce qui reste à la France en Afrique francophone. L’ancien colonisateur qui sent le soufre se fait chasser comme un invité encombrant dans plusieurs pays africains où il s’arrogeait, non sans avec arrogance, le droit et la légitimité d’inoculer à ses hôtes le venin de ses valeurs républicaines.
Désormais, les Africains sont majeurs et vaccinés. Ils ne supportent plus, qu’au nom de la démocratie, qu’on vienne leur donner des leçons. Paris, qui essuie les affronts dans ces anciens prés carrés, l’a très bien compris. C’est ce que nous confirme d’ailleurs un rapport de l’Assemblée nationale française en date du 4 octobre dernier et qui vient d’être rendu public.
Une France bousculée en Afrique
«La France est aujourd’hui bousculée dans une Afrique en recomposition. La montée en puissance d’un discours anti-français, même cantonné à une partie de la jeunesse citadine, témoigne d’un contexte général de remise en cause de l’influence française dans son ancien pré carré», regrette le Parlement français avant d’avouer qu’à l’échelle continentale, la part de marché relative de la France a décliné, passant de 15 à 7,5% entre 2000 et 2020.
Ce qui ouvre un grand boulevard à ses nombreux concurrents en Afrique. En haut de cette liste, figure la Chine qui «s’est imposée comme le premier partenaire économique de l’Afrique.» L’Empire du milieu qui multiplie les infrastructures sur le continent, parfois grandioses, a vu ses échanges avec l’Afrique passer de 10 à 210 milliards de dollars entre 2002 et 2021.
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Aujourd’hui principale détentrice de la dette extérieure africaine, laquelle est estimée à environ 365 milliards de dollars en 2021, elle «est parvenue à convaincre presque tous les pays du continent africain de rejoindre l’initiative chinoise des nouvelles routes de la soie», la Belt and Road Initiative (BRI), qui a fêté ses dix ans à Pékin les 17 et 18 octobre 2023.
Un grand boulevard sur le déclin de la France
D’autres puissances profitent également du recul de la France en Afrique. C’est le cas de l’Allemagne qui «est parvenue à pénétrer le marché africain à un niveau similaire à celui de la France », à en croire le même document.
D’autres pays membres de l’Otan également s’avèrent très bien positionnés sur le continent. Il s’agit essentiellement de la Turquie et des Etats-Unis. Après un désengagement très marqué sous l’ère Obama en Afrique, ces derniers sont de retour sur le continent avec force. Les relations entre l’Afrique et les États-Unis «ont trouvé une nouvelle actualité» à l’occasion du sommet «États-Unis–Afrique», qui s’est tenu à Washington du 13 au 15 décembre 2022.
Pour marquer cette donne, ils ont promis un financement de 55 milliards de dollars pour l’Afrique sur trois ans «afin de faire avancer les priorités qu’ils partagent et soutenir l’Agenda 2063».
Quant à la Turquie, forte de ses 43 ambassades et de sa première base militaire ouverte en 2017 à Mogadiscio en Somalie, «elle mise sur une politique culturelle active, la création de mosquées dédiées aux classes populaires et l’approfondissement de son empreinte économique sur le continent».
En près de 20 ans, le volume des échanges entre l’Afrique et la Turquie a été multiplié par huit, passant de 5,4 milliards de dollars en 2003 à 40,7 milliards de dollars en 2022. Il est clair que la «France n’est plus la référence unique et évidente sur le continent africain» mais curieusement, l’Hexagone se refuse toute forme de «fatalité».
Bien que fragilisée dans nombre de ses anciennes colonies, l’ancien colonisateur est demeuré présent sur le continent considéré comme une terre d’opportunités et une destination d’avenir. En effet, l’Afrique abrite 80% des réserves mondiales de coltan, 60% de celles de cobalt, 40% des réserves d’or ou encore 32% des réserves mondiales de bauxite, entres autres immenses ressources naturelles.
Pour garder pied dans cette partie du monde et face à un environnement international de plus en plus compétitif, la France a adapté sa stratégie, notamment en se tournant vers des marchés africains anglophones où de «nombreux pays africains souhaitent maintenir des relations nourries avec notre pays.», lit-on dans le document de 166 pages.
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Aujourd’hui, l’essentiel des échanges français se concentre autour de l’Afrique du Sud, de l’Égypte et du Nigeria, trois pays non francophones. Dans le détail, le Nigéria est le premier partenaire commercial en Afrique subsaharienne, avec un volume d’échanges de 4,5 milliards d’euros en 2019. Si aujourd’hui les relations entre le Nigeria et la France semblent au beau fixe, il n’est pas certain que le pays le plus peuplé d’Afrique accepte qu’on abuse de son hospitalité. Déjà, le fisc nigérian réclame à Air France 1,6 million de dollars au titre de l’impôt sur les sociétés.
Or l’argent est souvent la principale source de tous les problèmes dans les ménages. Faut-il dés lors s’inquiéter de l’avenir du couple franco-nigérian ? Une seule certitude, le déclin de la France en Afrique profite avant tout aux Africains eux-mêmes qui peuvent désormais choisir librement les partenaires de leur choix.