Grève inédite à la Zone économique de Libreville, des entreprises indiennes et chinoises mises en demeure

Une grève des salariés des entreprises chinoises et indiennes de la Zone économique de Libreville.

Le 19/09/2023 à 09h07

La Zone économique de Libreville est secouée par une grève inédite. Les employés ont brisé le mur du silence et dénoncé leurs mauvaises conditions de travail et pointent les traitements humiliants et les licenciements abusifs au sein d’entreprises indiennes et chinoises. L’autorité administrative de la Zone, aidée par la Direction générale du travail, tente désamorcer une crise qui dure depuis plus d’une semaine.

Les travailleurs de la Zone économique spéciale de Nkok sont en colère. Regroupés au sein d’une coopérative, ils ont unanimement décidé, depuis plus d’une semaine, de déserter leurs différentes usines et se mettre en grève.

Portant pancartes et banderoles, les grévistes ont tenu à faire entendre leur mécontentement à l’opinion publique mais surtout aux nouvelles autorités du pays. Cette réalité est une lapalissade car bien connue des décideurs, mais dont personne n’osait parler jusque-là.

Excédés par des traitements qu’ils jugent «humiliants» et des accidents professionnels sans dédommagements, les victimes ont tout déballé sur la place publique: «Je travaillais sur une machine qui sert à affûter le bois. Avec des mesures qui ne sont parfois pas exactes, la machine a donc rejeté le bois et m’a perforé le ventre au point ou je me suis retrouvée avec des intestins éjectés dehors. Je me suis écroulée sur le sol. Transférée à l’hôpital pour les premiers soins, la société m’a payée le salaire durant deux mois. Mais les mois d’après, et jusqu’à aujourd’hui, je n’ai plus jamais été payée. Donc je suis venue revendiquer mes droits», explique Nina Flore, employée de la société Gabon-Wood.

Des témoignages glaçants comme celui de cette jeune fille accablent les opérateurs indiens et chinois qui ont le monopole de la transformation du bois dans la Zone économique de Libreville. N’nang Eyegue, une autre victime d’accident de travail raconte comment il s’est fait broyer le doigt par un séchoir de feuilles de contreplaqué. «Mon doigt s’est enroulé sous la pression des feuilles de contreplaqué. C’est en tirant les feuilles de la machine que mon doigt a été coupé par la lame de la machine», explique-t-il.

Tous ces récits font partie d’un chapelet d’évènements malheureux où il est question de non-respect du Code du travail, d’horaires de travail excessifs, d’absence d’immatriculation aux services de sécurité et de prévention sociale (CNSS et CNAMGS), du manque de catégorisation socioprofessionnelle permettant la professionnalisation, de licenciements abusifs et de manque de transports subventionnés par les entreprises.

Dans le contexte actuel, les responsables de la Zone économique et la Direction générale du travail, réitèrent leur engagement en faveur de meilleures conditions de travail qui respectent la réglementation en vigueur en République Gabonaise. «Il y a des éléments à court terme que nous pouvons déjà faire appliquer tels que les horaires de travail. Nous avons un autre texte qui fixe le paiement des heures supplémentaires. D’autres éléments vont être déroulés sur le moyen et long terme», a assuré Emilie Léocadie Moussodji, directeur général du Travail.

Selon les dernières informations, l’Autorité administrative de la ZIS de Nkok a décidé la mise en demeure à14 sociétés «pour régularisation de leur situation, accompagnée de contrôles et pénalités en vue de la régularisation des situations illégales». Cette mise en demeure a pour but d’amener ces sociétés qui ne respectent pas les conditions de travail et les droits sociaux de leurs employés à se mettre en règle.

Par Ismael Obiang Nze (Libreville, correspondance)
Le 19/09/2023 à 09h07