La cartographie de la maîtrise de l’anglais est en constante évolution. Selon le dernier rapport de l’indice EF de compétence en anglais 2024, dix pays africains figurent parmi les 24 pays les moins compétents dans cette langue, tandis que neuf capitales africaines font partie des 15 villes les moins bien notées au monde. Une situation préoccupante qui pourrait entraver le développement économique et l’intégration de ces nations sur la scène mondiale. L’enquête a porté sur 2,1 millions de personnes non anglophones, âgées de plus de 18 ans sur 116 pays et régions.
Une représentation artistique célébrant la diversité, avec l'anglais comme langue pont pour la communication interculturelle et les échanges.. DR.
Ce teste est proposé par EF Education First, une société évoluant dans le domaine de l’éducation internationale et qui tire des conclusions des données collectées par le biais de tests d’anglais disponibles gratuitement sur Internet.
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Pour l’édition 2024, les Pays-Bas conservent la première place du «Top 10 countries with the best English», et ce depuis six ans. La Norvège arrive en deuxième position mondiale, suivie de Singapour (3ème), la Suède (4ème mondial), la Croatie (5ème), le Portugal (6ème), le Danemark (7ème), la Grèce (8ème), l’Autriche (9ème), et l’Allemagne (10ème mondial).
Le peu enviable Top 10 africain
Le rapport classe ces 10 pays africains parmi les pays ayant une «très faible maîtrise» de l’anglais. Soit parmi les derniers du classement mondial: Malawi (95ème au classement mondial), Cameroun (97ème), Soudan (99ème), Sénégal (102ème), Bénin (108ème), Angola (110ème), Libye (112ème), Rwanda (113ème), Côte d’Ivoire et Somalie (114èmes ex-aequo).
Soulignons que cette catégorie de pays comprend en tout 24 pays dont l’Afghanistan (95ème avec un score de 447), l’Ouzbékistan (98ème pour un score de 439), Haïti (99ème et un score de 432), la Jordanie (101ème avec 431 comme score), ou encore l’Arabie Saoudite (105ème avec un score de 417), la Thaïlande (106ème et un score de 415), et l’Irak (107ème avec 414 au score).
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«La maîtrise de l’anglais est en corrélation avec d’autres mesures du développement économique et humain», soulignent les auteurs du rapport. Ce constat établissant une corrélation entre la maîtrise de l’anglais et d’autres indicateurs de développement économique et humain est effectivement intéressant à approfondir. Plusieurs éléments peuvent expliquer ce lien.
Tout d’abord, l’anglais étant la langue de communication internationale par excellence aujourd’hui, sa bonne maîtrise facilite les échanges économiques, scientifiques et culturels avec le reste du monde. Les pays dont la population est plus compétente en anglais sont donc avantagés pour nouer des partenariats, attirer des investissements étrangers, favoriser l’innovation technologique, etc.
Pourquoi l’anglais
Ensuite, le niveau d’anglais reflète souvent la qualité générale du système éducatif d’un pays. Une formation solide en langues étrangères, et particulièrement en anglais, va de pair avec de bons résultats scolaires dans d’autres matières fondamentales comme les mathématiques, les sciences, l’informatique, etc. Ces compétences sont essentielles pour le développement économique et technologique. De plus, la maîtrise de l’anglais est liée à un plus grand accès à l’information et aux connaissances mondiales. Elle permet de tirer parti de ressources pédagogiques, scientifiques et culturelles internationales disponibles en anglais. Cet avantage se traduit par un développement accru du capital humain.
Enfin, les pays émergents qui parviennent à élever les compétences linguistiques de leur population en anglais facilitent aussi leur intégration dans les réseaux économiques mondialisés. Leurs entreprises et travailleurs qualifiés peuvent alors mieux s’insérer dans les chaînes de valeur mondiales. Ainsi, le niveau d’anglais constitue un indicateur synthétique reflétant des capacités d’ouverture, d’échanges, d’accès au savoir, qui sont autant de moteurs du développement durable des nations. Une bonne maîtrise de la langue véhiculaire internationale favorise indéniablement les progrès économiques et sociaux.
Quels sont les facteurs explicatifs ?
Le rapport n’identifie pas de causes spécifiques mais établit certaines corrélations. « L’acquisition d’une langue prend du temps et peut facilement être mise de côté lorsque d’autres défis se présentent », note le document. Pour ces pays confrontés à de nombreux défis socio-économiques, l’apprentissage de l’anglais n’ait manifestement pas la priorité. «L’enseignement des langues locales et de la langue officielle héritée de la colonisation prime souvent sur celui de l’anglais.»
Sur le plan économique, cette faiblesse en anglais constitue un sérieux handicap. Dans un monde globalisé où l’anglais est la lingua franca des affaires, le manque de compétences pénalise l’attractivité de ces pays pour les investisseurs étrangers et les échanges commerciaux. » Le rapport souligne des disparités dans la maîtrise de l’anglais liées au genre et à l’âge. «Dans quarante pays, les compétences en anglais des hommes sont nettement supérieures à celles des femmes», précise-t-il, une tendance qui s’explique souvent par «un accès plus limité à l’éducation pour les femmes.»
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Cependant, en Afrique, la situation est inversée. «Le continent reste le seul où les femmes ont constamment de meilleures compétences que les hommes», note l’étude, citant l’exemple de l’Éthiopie avec un écart de 58 points en faveur des femmes. Concernant les tranches d’âge, «Les jeunes diplômés ne sont plus en déclin», constate le rapport, même si les niveaux varient fortement selon les pays.
Les 9 capitales africaines les moins bien classées
Neuf capitales africaines sont parmi les moins bien classées. Il s’agit de Khartoum au Soudan avec un score de 442, Yaoundé au Cameroun avec un score de 436, Cotonou au Bénin avec un score de 432, Praia au Cap-Vert avec un score de 429, Tripoli en Libye avec un score de 421, Kigali au Rwanda avec un score de 412, Luanda en Angola avec un score de 412, Abidjan en Côte d’Ivoire avec un score de 410 et Mogadiscio en Somalie avec un score de 375. Les piètres résultats de ces capitales reflètent globalement la situation nationale. Un facteur d’autant plus inquiétant que ces capitales risquent de pâtir d’un manque d’attractivité sur les plans économique et touristique.
Le rapport n’aborde pas spécifiquement les compétences par secteur dans ces pays, mais souligne un écart significatif entre public et privé: «Le niveau dans le secteur public est bien inférieur, l’anglais étant une exigence dans de nombreuses offres d’emploi privées.»
Quelles pistes d’amélioration?
L’étude ne formule pas de recommandations précises mais insiste sur « la nécessité de remettre l’apprentissage de l’anglais au cœur des priorités éducatives pour éviter un décrochage durable.»
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Former davantage d’enseignants qualifiés et valoriser l’anglais comme atout économique reviennent souvent dans les préconisations. En effet, dans un monde globalisé où l’anglais est la langue véhiculaire prédominante dans les affaires, la technologie, la recherche scientifique, etc., une bonne maîtrise de cette langue est devenue un atout professionnel indéniable. Les entreprises recherchent activement des employés ayant d’excellentes compétences en anglais pour communiquer avec des partenaires étrangers, rédiger des rapports, participer à des conférences internationales, etc.
Ensuite, pour permettre aux apprenants d’acquérir un niveau d’anglais adéquat, il est crucial de disposer d’un corps enseignant suffisamment qualifié et compétent dans cette langue. Des professeurs ne maîtrisant pas parfaitement l’anglais ne pourront transmettre qu’une connaissance limitée. Il faut donc former et recruter davantage d’enseignants spécialisés en anglais, avec un excellent niveau linguistique mais aussi des compétences pédagogiques solides.
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De plus, valoriser l’anglais comme un atout économique permettrait d’en faire prendre conscience aux élèves et étudiants. Ils comprendraient mieux les nombreux débouchés professionnels que leur offrirait une bonne maîtrise de cette langue, que ce soit pour travailler dans des entreprises internationales, le tourisme, la traduction, etc. Cela les motiverait à s’investir davantage dans son apprentissage.
Enfin, au niveau sociétal, disposer d’une population bien formée en anglais constituerait un avantage compétitif certain pour attirer des investissements étrangers, des entreprises internationales, des congrès, etc. Ce serait un gage d’ouverture sur le monde et de prospérité économique.
Les 10 pays africains figurant dans la catégorie des pays à « Très faible maîtrise » de l’Anglais :
Pays | Classement mondial | Score EF EPI |
---|---|---|
Malawi | 95ème | 447 |
Cameroun | 97ème | 445 |
Soudan | 99ème | 432 |
Sénégal | 102ème | 429 |
Bénin | 108ème | 413 |
Angola | 110ème | 409 |
Libye | 112ème | 405 |
Rwanda | 113ème | 401 |
Côte d’Ivoire | 114ème ex aequo | 399 |
Somalie | 114ème ex aequo | 399 |
Source : Indice de compétence en anglais EF