Afrique centrale: ces trois chefs d'Etat qui ne veulent plus du franc CFA

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Le 17/11/2018 à 08h16, mis à jour le 18/11/2018 à 15h10

Revue de presseLes pays d'Afrique centrale semblent de plus en plus rebutés par le franc CFA, monnaie garantie par la France, mais dont le fonctionnement pose plusieurs questions. La fronde est en train de s'organiser.

Jusqu'à quand tiendra le franc CFA? C'est la question que se posent tous ceux qui ont pu avoir accès aux détails de la réunion au sommet qui s'est tenue, il y a tout juste trois semaines à N'Djamena entre les six pays de la Communauté économique et monétaire des Etats d'Afrique centrale (CEMAC).

En effet, selon Mondafrique, trois chefs d'Etat ont carrément mené une fronde pour exiger une chose inédite dans l'histoire de la monnaie garantie par la France. Idriss Déby Itno, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo et Denis Sassou Nguesso ont littéralement demandé que le compte d'opérations soit audité. Ce compte tenu par le Trésor public français, faut-il le rappeler, est supposé accueillir une partie des réserves en devises des pays membres de la CEMAC. 

Il s'agit d'une attitude qui n'a rien de surprenant concernant le président tchadien qui a toujours manifesté sa réticence à laisser la France garantir la monnaie de la CEMAC, tout en lui confiant jusqu'à 50% des réserves de changes. Aujourd'hui, le compte d'opérations n'accueille plus, de façon obligatoire, que 25% des réserves des pays concernés, mais le principe de cette tutelle monétaire est décrié par beaucoup.

On se rappelle la fameuse tirade d'Idriss Déby, il y a deux ans. "On n’a pas besoin de chercher entre midi à 14 heures. Nous allons continuer à cœur l’amitié avec la France. Mais il faudra avoir le courage de dire que le moment est venu de couper un cordon qui empêche l’Afrique de décoller", avait-il dit. "Il faut maintenant que réellement dans les faits cette monnaie soit la nôtre pour que nous puissions, le moment venu, (en) faire une monnaie convertible et une monnaie qui permet à tous ces pays qui utilisent encore le FCFA de se développer".

Selon Mondafrique, à l'époque, les fonctionnaires de Bercy n'avaient pas apprécié ce qu'ils pensaient n'être qu'une énième "rodomontade" dont seul Déby a le secret. Mais, ils se trompaient lourdement en prenant à la légère la sortie du président tchadien. Puisqu'il a fait des émules un peu partout dans les 14 pays des deux communautés du Franc CFA. 

Particulièrement chez ses voisins d'Afrique centrale. En Guinée équatoriale, on ne se gêne plus de rappeler que le pays n'est entré dans la zone CFA qu'en 1985 et qu'avec un peu d'effort, il pourrait en sortir. Il faut d'ailleurs noter que les relations tendues entre Paris et Malabo ne rendent pas les choses faciles. En effet, touchés par la chute des cours du pétrole, les comptes extérieurs équatoguinéens affichent une position courte. Mais Paris ne facilite guère la tâche à Malabo, puisqu'il a bloqué à plusieurs reprises les transferts en devises en refusant d'apposer sa garantie. 

Le Congo également semble de moins en moins intéressé par le dépôt de ses réserves auprès du Trésor public français, au-delà de la seule quote-part obligatoire de 25%. Ainsi, Denis Sassou Nguesso a pris l'option de les confier aux banques chinoises. Sachant qu'il lui est toujours possible en retour de demander les prêts dont il a besoin pour se financer. Selon Mondafrique, le Congo a catégoriquement refusé de s'ouvrir sur les montants exacts qu'il place en renminbi, le fameux yuan chinois. 

Au-delà, les chefs d'Etat des pays d'Afrique centrale estiment que le compte d'opérations devait être un compte séquestre, alors que dans la réalité le Trésor public français en userait et en abuserait. D'où l'audit recommandé. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 17/11/2018 à 08h16, mis à jour le 18/11/2018 à 15h10