Gabon. Questions sur la mutinerie de cinq guignols

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Le 08/01/2019 à 11h53, mis à jour le 08/01/2019 à 12h58

Ce qui s'est produit hier, aux abords de la radio nationale, dans la capitale gabonaise, est sans doute la tentative de coup d'Etat la plus burlesque jamais tentée par des militaires inconséquents. Bilan: deux morts. Les cinq mutins, au total, voulaient faire un happening.

Après les évènements survenus hier, lundi 7 janvier, dans la capitale, les Librevillois sont retournés ce mardi vaquer à leurs occupations, le plus normalement du monde. On ne peut pas en dire autant de ceux qui ont été présentés comme des putchistes.

En effet, deux des mutins sur cinq ont été tués, deux autres faits prisonniers dans l'assaut donné par le Groupement d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) gabonais à la Radiodiffusion télévision gabonaise (RTG). Alors qu'un dernier mutin, le lieutenant Kelly Ondo Obiang, cerveau de ce grabuge, a été rattrapé en fuite. Il s'était dissimulé sous un lit, dans un domicile non loin de la RTG. 

Si tout est désormais rentré dans l'ordre, cet évènement, qui s'est produit au moment où le chef de l'Etat gabonais se trouve en convalescence au Maroc, entraîne plusieurs questions. Il s'agit, tout d'abord, de savoir comment des officiers, fussent-ils des lieutenants, ont-ils pu agir avec autant d'amateurisme? Il ne fait aucun doute qu'ils ne croyaient pas un seul instant réussir un coup d'Etat et encore moins être suivis dans leur appel au soulèvement. Leur acte, sans réel ancrage dans le réel, relève du happening.

Car concernant ce funeste projet de renversement des institutions républicaines gabonaises, comment le lientenant Obiang et ses acolytes ont-ils pu imaginer un seul instant que la seule prise de la radio et la diffusion d'un message suffirait pour prendre le pouvoir? Un putsch, et c'est là une évidence, nécessite avant tout d'avoir eu de solides soutiens dans l'armée. Or, le déroulement des évènements montre qu'ils en ont été clairement dépourvus et que l'armée gabonaise et loyale envers le président élu: Ali Bongo.

Quand bien même, ils auraient été soutenus, ces soutiens leur ont fait faux-bond et ne sont jamais entrés en jeu. Il a donc été impossible, pour ces cinq "putschites" d'avoir eu l'armée acquise à leur cause, mais aussi la police et la gendarmerie, forces de défense et de sécurité, sans lequelles toute tentative de coup d'Etat est irrémédiablement vouée à l'échec. C'est sans doute ce premier point, que l'enquête ouverte par l'armée et la justice gabonaise essaiera en premier lieu de clarifier pour éviter qu'un tel acte ne se reproduise. 

Cependant, les cinq mutins auraient pu, effectivement, avoir eu d'éventuels hommes politiques acquis à leur cause. Des leaders de l'opposition gabonaise a d'ailleurs déclaré "comprendre" les motivations de ces cinq "apprentis putschites". C'est ce qu'a ainsi expliqué, dans un discours équivoque sur les ondes de Radio France Internationale, Laurent Ndong, porte-parole de Jean Ping, candidat malheureux aux élections de 2016. 

Quoi qu'il en soit, cet évènement a eu plus d'impact médiatique, qu'il n'a réellement touché les Gabonais. Et, de fait, la crise post-électorale de 2016 les avait davantage affectés. Ce micro-évènement sera donc vite oublié. Le coup des cinq guignols n'a même pas eu le mérite de faire rire. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 08/01/2019 à 11h53, mis à jour le 08/01/2019 à 12h58