Guinée: quand la pénurie de carburant perdure

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Le 04/02/2017 à 17h32, mis à jour le 04/02/2017 à 17h33

La pénurie de carburant qui tourmente les Guinéens depuis le début de la semaine devait prendre fin vendredi 3 février. C'est en tout cas ce qu'a affirmé le directeur de l'Office national du pétrole, jeudi, mais ce n'était toujours pas le cas vendredi dans l'après-midi.

Jeudi 2 février. Alors que la plupart des stations-service de Conakry sont restées fermées dans la matinée, les rares à avoir ouvert ont été submergés par les consommateurs. Depuis lundi 30 janvier, c'est devenu une sorte de rituel. "A Conakry, les choses seront stabilisées d'ici à la fin de la journée de demain (ce vendredi 3 février). Dans les régions, il va falloir attendre l'après week-end ", a affirmé, jeudi, Zakaria Koulibary qui s'exprimait au micro de la télévision nationale. Mais, dans la plupart des stations de la capitale, la situation est restée inchangée jusqu'à 18 heures (heure locale)... " Quelques stations ont été servies, mais nous, nous n'avons pas encore reçu de carburant ", nous a confié un pompiste d'une station à Kaloum, au centre administratif de Conakry. Oumar Tounkara, un Conakryka comme tant d'autres, ne cache pas son pessimisme. "Je ne crois pas à un retour du carburant d'ici le début de la semaine prochaine".

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Durant la semaine, des habitants de Conakry ont marché des kilomètres faute de taxi. Des gens ont dû laisser leurs voitures à la maison pour aller au travail à pied.

Dans les provinces où la pénurie a commencé avant le 22 janvier, le marché noir s'est développé ici ou là, imposant ses prix aux consommateurs. "Le litre d'essence est passé de 8.000 francs guinéens à 14.000 francs voire 15.000 francs au marché noir", a rapporté le site Guineenews.org à travers son correspondant à Labé, une ville située à plus de 400 kilomètres de Conakry.

Ayant longtemps gardé le silence sur la situation, les autorités guinéennes ont laissé libre court à toutes sortes d'interprétations concernant la pénurie. "C'est une pénurie organisée volontairement afin déviter les embouteillages le jour de l'arrivée du président de la République. Ils savent bien qu'avec un manque de carburant, personne ne pourra sortir en voiture", estime Amadou Sylla, un jeune conducteur de moto-taxi.

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La rumeur qui a le plus ébranlé les Guinéens est celle qui annonce pour bientôt une augmentation du prix du carburant à la pompe. Zakaria Koulibaly a infirmé la rumeur tout en laissant comprendre que " le taux de change ( le carburant est importé en dollars, ndlr ) et le prix du baril qui a grimpé à 53 dollars ne plaidaient pas en faveur d'un maintien du prix actuel. " De toutes les façons, ce n'est pas à moi de dire qu'il va avoir augmentation du prix ou pas, je ne suis qu'un technicien ", s'est dédouané le directeur de l'Office national du pétrole. Aucun membre du gouvernement n'a voulu se prononcer sur la question. En tout cas, à 8.000 francs guinéens le litre, le Guinéen lambda se plaint déjà.

L'ONAP impute plutôt la pénurie à Sahara, la fournisseuse de produits pétroliers en Guinée."La situation a empiré lorsqu'on a été informé que le bateau ne respacterait pas le délai habituel. On était donc obligé de procéder à une gestion rationnelle du stock qu'on avait ", indique Koulibaly. Cette gestion rationnelle aurait consisté à sortir 600 mille litres au lieu d'un million de litres par jour.

Selon Koulibaly, Sahara a invoqué de son côté un cas de force majeure. La fournisseuse aurait essuyé des difficultés dans le chargement de son bateau au port d'Amsterdam (Pays-bas). Pour l'instant, les arguments de Sahara peinent à convaincre les autorités guinéennes. Le contrat accorde à l'Etat guinéen la possibilité de saisir la cour d'arbitrage de Paris au cas où la force majeure n'est pas avérée.

Par Mamourou Sonomou (Conakry, correspondance)
Le 04/02/2017 à 17h32, mis à jour le 04/02/2017 à 17h33