Guinée: l'activité des teinturières traditionnelles en péril face à la contrefaçon chinoise

Le360/ Mamadou Mouctar Souaré

Le 27/12/2021 à 13h14

Kindia, la ville des agrumes, c'est aussi le berceau du tissu local en Basse Guinée, communément dénommé "Kendéli". Dans le quartier Sorondo, les femmes pratiquent quasiment toutes la teinture. Mais, désormais, elles souffrent de la forte importation de tissu chinois sur le marché guinéen.

Ici, à Sorondo, la teinture, plus qu'une tradition, reste un véritable moyen de survie. Une survie qui, ces dernières années, est devenue plus laborieuse. En effet, depuis quelques mois, le marché guinéen est envahi par des pagnes fabriqués en Chine, esthétiquement inspirés des tissus traditionnels guinéens. Une situation qui impacte fortement les teinturières locales.

Leur source de revenus est mise en péril, explique Hadja Hawa Condé. «Aujourd'hui, nous sommes inquiètes, nous souffrons. La contrefaçon des Chinois est en train de tuer notre activité. Nous faisons du Leppi, des pagnes forêt sacré, mais, aujourd'hui, nous sommes assises, nous ne faisons rien. Et pourtant, nos pagnes sont différents des contrefaçons venues de Chine. Pour les Chinois c'est du pur plastique alors que nos pagnes à nous sont faits à base de coton, mais les Guinéens ne savent pas ça, ils préfèrent les pagnes les plus jolis, et c'est tout», se plaint-elle.

La présidente du groupement des femmes teinturières de Kindia, Makalé Fadiga, est rouge de colère face à cette contrefaçon chinoise. Ces professionnelles de la teinture ne savent plus où donner de la tête. Djenaba Kaba, épouse de l'imam de Sorondo, appelle le président de la transition, le colonel Mamady Doumbouya, au secours. Ces dernières années, le matériel qui rentre dans la fabrication du tissu local coûte excessivement cher sur le marché.

Tous les prix sont en hausse. Un autre point inquiétant qui rend la tâche plus dur à ces teinturières, informe Djenaba Kaba: «Avant, on achetait le basin à 37 dollars mais aujourd'hui c'est à 42 dollars. Aujourd'hui, le prix de la teinture a augmenté. Avant, ce petit sachet se négociait à 3 dollars, mais aujourd'hui c'est à 4 dollars». À noter que pour un tissu local qui coûte 100.000 GNF, soit un peu moins de 10 dollars sur le marché, le même modèle venu de la Chine est revendu à 60.000 GNF avec souvent une meilleure esthétique mais de qualité inférieure.

Par Mamadou Mouctar Souaré (Conakry, correspondance)
Le 27/12/2021 à 13h14