C’est un homme apparemment heureux à son domicile dans cette matinée du jeudi 7 octobre 2021. Mohamed Béavogui, 68 ans, fonctionnaire international qui a notamment servi à l’ONU, ne peut cacher sa joie. Le contexte, on le sait, est particulier, les attentes nombreuses, mais pas au point de faire peur au Premier ministre qui voit là l’occasion unique de servir son pays.
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"Le premier sentiment, c’est un sentiment d’honneur, c’est aussi avec beaucoup d’émotion qu’on peut recevoir une telle responsabilité au moment d’une transition qui est cruciale pour le futur de notre pays", a-t-il déclaré aux nombreux journalistes de la presse nationale et internationale venus recueillir ses premiers mots après cette nomination surprise.
Selon lui, "c’est une tâche certainement pas facile, mais nous allons nous y mettre pour que le peuple de Guinée soit satisfait".
Satisfaire le peuple de Guinée est sans doute un objectif qui ne sera facile à atteindre. D’ailleurs, depuis cette nomination, la société civile guinéenne évalue et analyse sans cesse le profil du premier ministre.
Pour l’instant, son arrivée à la primature semble plutôt bien accueillie, car nombre de Guinéens commençaient déjà à s’impatienter, note Ibrahima Balaya Diallo, président du forum civil guinéen pour qui «ce n’est pas trop tôt".
"On l'attendait, dit-il, d’autant plus que le putsch a eu lieu depuis le 05 septembre. Il nous a fallu attendre un mois pour avoir un Premier ministre. C’est vrai qu’il y a eu beaucoup de tractations, il y a eu beaucoup de profils qui ont été mis en exergue. Finalement, c’est un fonctionnaire international mais très ancré sur la Guinée".
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Il poursuit son analyse en notant qu'"il est polyglotte, il comprend au moins quatre langues nationales de ce pays, et puis qui a été formé à l’école guinéenne aussi. On se dit aujourd’hui que s’il y avait des exigences sur la connaissance du pays, sur la connaissance de l’administration, je crois qu’il est bien introduit, et qu’il est à équidistance de la classe politique. Donc, tout ça, ce sont des éléments importants". Puis, après ce portrait, il s'interroge: "Finalement, est-ce que, malgré son profil, alléchant, notre Premier ministre, Monsieur Béavogui, va pouvoir nous mener vers une transition réussie et acceptée de tout le monde?".
Grande question, en effet! Mais à la presse, ce matin du jeudi, au lendemain de sa nomination, Mohamed Béavogui n’a pas manqué de rappeler son rôle à lui et celui de son gouvernement lors de cette transition. "Le CNRD (Comité national pour la réconciliation et le développement, Ndlr) va gérer le volet politique de cette transition. Le CNRD est chargé de préparer notre futur. Un futur juste construit sur la base des expériences que nous avons eues jusqu’à présent. Le rôle du gouvernement est à la fois compliqué mais simple. C’est de créer toutes les conditions pour que les Guinéens puissent se parler, se réconcilier, travailler pour toute la Guinée. C’est aussi notre rôle de faire en sorte que les ressources soient là et que le pays fonctionne correctement. Nous n’avons rien à inventer. Nous n’avons pas de plan quinquennal ni de plan triennal à mettre en place. Nous devons faire marcher le pays à la satisfaction et donner l’exemple, pour que dans le futur ça suive", souligne le Premier ministre.
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Les négociations pour la désignation des membres devant siéger au sein du Conseil national de la transition (CNT), l'organe législatif, seraient déjà en cours. Cette institution aura la même mission d'un Parlement. A rappeler que les Guinéens qui ont occupé des postes importants dans le gouvernement sortant ne peuvent prétendre à des fonctions dans le gouvernement de transition, comme l'avait dit le colonel Mamady Doumbouya, investi la semaine dernière comme chef de l'Etat guinéen.