La présence militaire américaine en Afrique est, depuis les indépendances des différents Etats du continent, un secret bien mal gardé.
Toutefois, si les Américains contiuent de soutenir que leur présence en Afrique est faible, en 2017, une embuscade au Niger, qui a coûté la vie à 4 membres des forces spéciales américaines, a révélé au grand jour, par la suite, la forte présence des soldats américains en Afrique.
Mais ce ne fut que du bout des lèvres que Washington a bien voulu avancer un chiffre: celui de la présence de 4.500 soldats de l'armée US en Afrique.
Durant cette même année 2017, le commandant des forces américaines en Afrique, le général Thomas Waldhauser, à la tête de l’Africom, avait souligné dans un rapport destiné au Congrès américain que ses troupes étaient présentes au Tchad, en RDC, en Ethiopie, en Somalie, en Ouganda, au Soudan, au Rwanda et au Kenya.
Il avait expliqué que la la seule base américaine se trouvant en Afrique est celle de Camp Lemonier à Djibouti. La base aérienne de Moron, au sud de l’Espagne, servait aussi de base aux forces spéciales, qui regroupent les unités d’élites de l’armée de terre (les "Bérets verts", ou "Special Forces"), celles des Navy SEALs, des Marines et de l’armée de l’air, pour leurs opérations en Afrique.
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Au-delà de ces chiffres et de ces données officiels, la réalité est, en fait, toute autre. Pour preuve, en novembre dernier, le Pentagone avait annoncé dans un communiqué que les Etats-Unis s'apprêtaient à réduire de 10% le nombre de leurs soldats déployés en Afrique au cours des prochaines années.
Selon les derniers chiffres du Pentagone, on compte, en fait, près de 7.200 soldats américains déployés dans plusieurs dizaines de pays. Mais concernant ce point, le Pentagone tient à rassurer sur le fait que cette réduction sera modeste et s'étalera sur plusieurs années.
Pour avoir une idée plus précise de l’ampleur de cette présence, le magazine The Intercept a mené une enquête précise, qui démontre une plus forte présence américaine en Afrique que celle que veut bien reconnaître Washington.
Après avoir compilé plusieurs documents officiels, le magazine d'investigations démontre que les Etats-Unis disposeraient d’au moins 34 bases sur le continent, dont 14 principales «durables» et 20 autres plus ou moins équipées, constituées de bases de sécurité, "coopérantes" avec les autorités en place, et de bases secrètes, opérationnelles uniquement en cas d’urgence.
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The Intercept note une forte concentration de ces sites dans le nord et l’ouest du continent, ainsi que dans la Corne de l’Afrique. Et la principale base américaine en Afrique, celle de Djibouti, abrite à elle seule 4.000 soldats. Une base stratégique qui est aussi l’une des plus importantes bases de départ de drones au monde, impliqués dans des guerres sur deux continents, celle au Yémen et en Somalie.
Cette trentaine de sites contribuent à des opérations au Sahel, dans la Corne de l’Afrique, ainsi qu'en Libye, trois régions où les Etats-Unis participent à la lutte conte le terrorisme. Ainsi, Africom dispose de 5 sites au Niger et en Somalie, de 4 au Kenya, 2 au Cameroun et au Mali. Et pas moins de 18 sites ont été dénombrés par The Intercept dans ces cinq pays.
Au coeur de cet important dispositif, le Niger a toute son importance, avec 5 bases dont 2 sites de sécurité "coopérants". Ce pays est considéré comme stratégique, du fait qu’il se situe au centre de trois fronts de lutte contre le terrorisme: le Mali, la Libye et le Nigeria.
Le Niger abrite la base aérienne 101, un poste de drone, de base d’opérations spéciales, et c'est aussi le centre névralgique pour toute l'Afrique de l’ouest en ce qui concerne les services de récupération du personnel et d’évacuation des blessés.
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La base en cours de construction dans la région d’Agadez, au nord du Niger, dans le désert sahélien, va devenir la première base américaine en Afrique de l’Ouest.
Sa construction nécessitera un investissement de 100 millions de dollars et des frais d’exploitation qui coûteront, d'ici 2024, 250 millions de dollars aux contribuables américains.
«Cette base, qui fait partie de l’expansion américaine en Afrique est la plus onéreuse construction de base jamais entreprise par les forces aériennes américaines», souligne, à cet égard, The Intercept.
Le Niger compte aussi d'autres sites importants, dont ceux de Ouallam, Arlit et Maradi où les forces spéciales US sont déployées.
En octobre dernier, The New York Times annonçait la présence d’une base de drones de la CIA à Dirkou, à 570 km d’Agadez, où United States air force (USAF) terminait les travaux de construction d’une base aérienne.
C'est d'ailleurs à partir de cette base que la CIA effectue des vols de nuit pour surveiller la région sahélo-saharienne et utilise des drones armés, en accord avec le gouvernement nigérien, pour mener des frappes ciblées en Libye, au Mali, au Tchad et au Nigeria.
Cette répartition des différentes bases américaines donne ainsi une idée sur l’organisation de la première armée du monde en Afrique, autour de trois zones: Corne de l’Afrique (Somalie, Djibouti et Kenya), Libye et Sahel (Cameroun, Tchad, Niger, Mali, Burkina Faso et Mauritanie).
En Afrique centrale et australe, les Américains ne sont présents qu’en Ouganda, où ils disposent d’une base aérienne, et au Botswana.
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Parmi les sites, les documents d’Africom montrent clairement le poids grandissants des drones qui jouent des rôles d’attaque en "liquidant" des chefs terroristes. Une autre de leurs mission est aussi celle de la surveillance des territoires.
Au Maghreb, en plus de la Libye, les Etats-Unis disposent d’un avant-poste de drone, très discrètement installé en Tunisie, révèle The Intercept, qui annonce également qu'en Libye, «le site des missions de drones et de commandos, pour lequel le président Trump a déclaré qu’il ne voyait aucun rôle militaire américain l’année dernière, héberge néanmoins 3 avant-postes non révélés».
Le Pentagone n’a cependant pas voulu communiquer sur le nombre exact des forces déployées dans les sites révélés par The Intercept.
Toutefois un chiffre est concordant, selon deux sources anonymes: on compterait ainsi quelques 1.300 membres des forces spéciales, issus de différents corps d’élites de l’armée américaine, installés en Afrique.
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Pour le général Thomas Waldhauser, commandant en chef d'Africom, «notre réseau permet aux forces déployées dans ces sites de fournir une flexibilité opérationnelle et une réponse rapide aux crises impliquant du personnel ou des intérêts des Etats-Unis sans militariser le continent».
En clair, la présence militaire américaine en Afrique ne peut plus être considérée comme une «empreinte légère». Elle devance de loin celles de la Chine, de la France, des Emirats Arabes Unis et de la Russie, d'autres pays qui de leur côté, ont renforcé leur présence en Afrique.