Les tueries ont été perpétrées à Diallassagou et dans deux villages proches, Diaweli et à Dessagou, dans le centre du pays, un des principaux foyers de la violence qui ensanglante le Sahel depuis des années. Les violences continuaient lundi, selon un élu local joint par téléphone et s'exprimant sous le couvert de l'anonymat pour des raisons de sécurité.
Des élus locaux ont rapporté des scènes de massacres systématiques perpétrés par des hommes en armes à Diallassagou et dans deux localités environnantes du cercle de Bankass, dans un secteur qui est l'un des principaux foyers de la violence à ensanglanter le Sahel depuis des années.
«Ils brûlent aussi des cases, des maisons, et volent du bétail. C’est vraiment le sauve-qui-peut», a dit un élu joint par téléphone et s'exprimant sous le couvert de l'anonymat pour des raisons de sécurité. Cet élu et un autre, qui a comme lui fui son village, ont indiqué que le décompte des morts se poursuivait lundi.
Nouhoum Togo, un élu de Bankass, principale localité du secteur, a fait état d'un nombre de victimes encore bien plus élevé que celui de 132 morts rendu public par le gouvernement, sorti lundi après-midi du silence observé alors que les informations alarmantes proliféraient depuis le week-end sur les réseaux sociaux.
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Nouhoum Togo a indiqué à l'AFP que la zone avait été le théâtre il y a deux semaines d'opérations de l'armée qui avaient donné lieu à des accrochages avec les jihadistes. Ces derniers seraient revenus à plusieurs dizaines à motos, vendredi selon lui, pour se venger contre les populations, a-t-il dit.
«Ils sont arrivés et ont dit aux gens: "vous n'êtes pas des musulmans" en langue peul, alors ils ont emmené les hommes, une centaine de personnes sont parties avec eux. A deux kilomètres de là, ils ont abattu les gens systématiquement», a-t-il affirmé.
«Aujourd'hui encore, on a continué à ramasser les corps dans les communes environnantes de Diallassagou», a-t-il ajouté.
La Katiba Macina accusée
Le gouvernement a accusé la Katiba Macina du prédicateur peul Amadou Kouffa.
Depuis l'apparition en 2015 de cette organisation affiliée à Al-Qaïda dans le centre du Mali, la région est livrée aux exactions jihadistes, aux agissements des milices proclamées d'autodéfense et aux représailles intercommunautaires. Une grande partie de la zone échappe au contrôle de l'Etat central.
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C'est tout le Mali qui est plongé dans une profonde crise sécuritaire, politique et humanitaire depuis le déclenchement d'insurrections indépendantiste et jihadiste en 2012. La propagation jihadiste a gagné le centre et les pays voisins, Burkina Faso et Niger.
Les civils sont soumis aux représailles de jihadistes qui les accusent de pactiser avec l'ennemi. Dans certaines zones, de plus en plus étendues dans le centre, passées sous l'emprise des jihadistes, ces derniers appliquent avec vigueur leur vision sociale.
Les civils se retrouvent aussi souvent pris entre deux feux dans les affrontements entre groupes armés rivaux, y compris entre ceux affiliés à Al-Qaïda et à l'organisation Etat islamique.
Le nombre de civils tués dans des attaques attribuées à des groupes extrémistes a quasiment doublé depuis 2020 au Sahel central, affirme une coalition d'ONG ouest-africaines dans un rapport publié jeudi.
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Un document de l'ONU publié en mars indiquait que près de 600 civils avaient été tués au Mali en 2021 dans des violences imputées principalement aux groupes jihadistes, mais aussi aux milices d'autodéfense et aux forces armées.
L'ONU s'alarme dans des documents destinés au Conseil de sécurité de la dégradation de la situation sécuritaire dans le centre du Mali, mais aussi dans le nord et dans la zone dite des trois frontières aux confins du Burkina Faso et du Niger.
Une vingtaine de civils ont été tués samedi dans la région de Gao (nord). Mercredi dernier, un groupe armé rapportait la mort de 22 personnes dans la région de Ménaka.
Dans le nord du Burkina Faso, 86 personnes ont trouvé la mort en juin à Seytenga.