Après une croissance de 6,9% en 2021, le PIB du continent africain devrait ralentir à 4,1% en 2022 et 2023. Le Covid-19 et, surtout, la crise russo-ukrainienne vont impacter négativement la croissance des économies africaines cette année. C’est ce qui ressort du rapport «Perspectives économiques en Afrique 2022» de la Banque africaine de développement (BAD), publié en marge des Assemblées générales de l’institution panafricaine qui se tiennent depuis le 23 jusqu'au 27 mai à Accra, au Ghana, sous le thème «Favoriser la résilience climatique et une transition énergétique juste pour l’Afrique».
L’invasion de l’Ukraine par la Russie et les sanctions prises contre cette dernière ont été une source de coûts et de volatilité pour l’économie mondiale, transmis par trois canaux principaux: les prix des produits énergétiques et non énergétiques, les perturbations de la chaîne d’approvisionnement et les marchés financiers. Ceux-ci ont des conséquences directes et indirectes sur les économies africaines», souligne le rapport de la BAD.
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Cette croissance de 4,1% en moyenne cache toutefois de fortes divergences aussi bien au niveau des ensembles régionaux que des pays. Au niveau des régions, c’est l’Afrique de l’Est qui devrait afficher la meilleure performance (4,7%), devant l’Afrique centrale (4,6%), l’Afrique du Nord (4,5%), l’Afrique de l’Ouest (4,1%) et l’Afrique australe (2,5%).
Ces moyennes régionales cachent aussi des inégalités de croissance importantes. Ainsi, au niveau de la région Afrique du Nord, la croissance moyenne de 4,6% est portée par l’Egypte, seconde puissance économique africaine derrière le Nigeria en termes de PIB, dont l’économie devrait croître de 5,7% en 2022. Le Maroc devrait afficher la plus faible croissance de la région à cause de la sécheresse aigue qui frappe le pays et qui a fait tomber la production agricole à 30 millions de quintaux, impactant très négativement la croissance du PIB (1,8%).
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Du côté des pays, en 2022, la meilleure performance devrait revenir au Rwanda, comme ce fut le cas en 2010 (si on exclut la Libye avec une croissance de 177,3%) avec une hausse de son PIB de 10,0%, en affichant une croissance de 6,9%. La croissance de ce petit pays enclavé, portée par les services qui ont contribué à hauteur de 48% du PIB en 2021 et qui sont devenus le socle de l’économie rwandaise, devant l’agriculture (24% du PIB en 2021) et l’industrie (20% du PIB en 2021). Pour les années à venir, en plus des services, le gouvernement rwandais mise sur l’industrie et l’agriculture et leurs chaines de valeur pour booster l’économie du pays. Ce qui devrait porter la croissance à 7,9% en 2023, selon les estimations de la BAD.
Suivant le Rwanda, c’est le Niger qui devrait afficher des croissances de l’ordre de 6,5% en 2022 et 7,2% en 2023. Le pays devrait surtout bénéficier de la flambée des cours du baril de pétrole coïncidant avec la hausse de sa production. Il devrait aussi voir ses exportations d'or croître fortement grâce à l’oléoduc de 1.980 km qui reliera les champs pétroliers du pays au terminal pétrolier dans le port de Sèmè-Kraké du Bénin. Ce qui lui permettra de faire passer sa production de 20.000 barils par jours à plus de 120.000 à l’horizon 2024.
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Derrière ces deux pays, Maurice (6,2%), la République démocratique du Congo (6,2%), le Bénin (6,1%), la Côte d’Ivoire (6,0%), le Kenya (5,9%), le Togo (5,8%) et l’Egypte (5,7%) afficheront aussi de très bonnes performances. L’Egypte est la seule puissance économique continentale à afficher une croissance solide. Le pays des pharaons tire profit de ses importantes découvertes de gaz dont la production ne cesse d’augmenter, mais aussi de l’attractivité de son économie grâce à la dévaluation de sa monnaie qui favorise les arrivées touristiques et les investissements directs étrangers, de ses secteurs exportateurs diversifiés…
En 2023, c’est le Sénégal qui devrait afficher la meilleure croissance du continent avec un PIB en hausse de 8,2%. L’économie sénégalaise, qui devrait afficher une croissance de 4,6% en 2022, devrait voir son PIB augmenter de 8,2% en 2023 grâce notamment à son entrée dans le cercle des exportateurs d’hydrocarbures (pétrole et gaz), au développement de projets d’infrastructures (port, autoroutes, énergie…) et à l’agriculture. Le pays devancera le Rwanda (7,9%), le Niger (7,2%), le Togo (6,8%), la Côte d’Ivoire (6,7%), la RDC (6,5%), et l'Ouganda (6,2%).
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Reste que plusieurs facteurs continueront à peser sur la croissance des économies africaines en 2022 et en 2023. Ce sont les conséquences de la pandémie de Covid-19, le conflit russo-ukrainien, les niveaux d’endettement élevés de nombreux pays africains qui limite leur capacité à augmenter les dépenses et le financement de la reprise post-Covid-19, les retombées potentielles du resserrement des conditions financières mondiales induit par le risque substantiel d’inflation dans les économies avancées, les préoccupations climatiques (sécheresse, cyclones, inondations…), etc.