L’accaparement des terres au détriment des petites exploitations familiales reste au centre d’une vive préoccupation en Afrique. Dans le contexte mauritanien, cette réalité est aggravée par une loi sur le foncier datant de 1983, adoptée sous un régime militaire d’exception, comportant des dispositions contestées et même totalement dévoyées en phase d’application. Ainsi, régulièrement, des communautés dénoncent des expropriations foncières au profit d'individus fortunés et d'entreprises.
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Dans une déclaration rendue publique le 20 novembre, un collectif de sept villages de la commune de Tekane, dans la région de Rosso, dénonce «une expropriation de ses terres suivie d’une attribution à un officier de l’armée nationale» Par ce biais, les communautés villageoises entendent «alerter l’opinion nationale et internationale sur l'attribution foncière abusive et non concertée avec les pouvoirs publics d’une zone pastorale désenclavée, qui fait vivre les troupeaux de nos villages et ceux des alentours, à un colonel de l’armée mauritanienne».
Le document dévoile l’identité de la personne mise en cause et fournit des repères géographiques sur la zone objet de litige, «une forêt classée jusqu’en 2009, qui fut par la suite cédée à une société émiratie et aménagée en périmètre agricole, au détriment des populations riveraines et avec des préjudices incommensurables». La correspondance du collectif signale que «suite au retrait de l’entreprise à laquelle ces terres avaient été attribuées dans un premier temps, les populations riveraines avaient soumis aux autorités l’idée de transformer cette terre en zone pastorale, étant donné qu'elle est l’unique endroit où l’élevage peut encore se pratiquer sans risque de conflit avec les différents attributaires de terres aux alentours».
Les communautés affirment également avoir saisi par voie légale les autorités administratives et judiciaires compétentes pour arrêter les travaux d’aménagement en cours, mais ces démarches sont restées lettre morte.
Par ce courrier, les communautés villageoises entendent «mettre l’Etat devant ses responsabilités et interpeller une justice soucieuse d’un traitement égal de tous les citoyens devant la loi». Un ancien président de la Cour suprême de Mauritanie déclarait en 2015 que «38% du contentieux soumis à la haute juridiction porte sur les litiges fonciers».
Face au phénomène, des voix s’élèvent pour demander un moratoire sur les attributions foncières à usage agricole, et parmi elles le Forum des organisations nationales de droits de l’homme, un collectif d’une vingtaine d’ONG.