Mauritanie: réactions après un lundi de feu et de sang au Sahel

Le 15/08/2017 à 17h01

Le Sahel a connu un lundi de feu et de sang en cette mi-août, avec une nouvelle attaque terroriste dans un café de Ouagadougou et un attentat contre les forces de l'ONU à Tombouctou. Réactions à Nouakchott.

Après l’attaque contre le café «Aziz Istanbul» à Ouagadougou, au cours de la nuit du dimanche au lundi, une orgie sanguinaire avec un bilan d’une vingtaine de morts, Nouakchott est dominé par un sentiment «de douleur et de tristesse» exprimé dans un message du président Mohamed Ould Abdel Aziz à son homologue burkinabé, Roch Marc Christian Kaboré.

Un dégoût largement partagé au sein de la classe politique et de la société mauritaniennes.

Ce nouveau coup «Trafalgar» assené par la nébuleuse terroriste à un pays du Sahel s’est produit en même temps qu’une attaque contre un camp de la force de l’ONU à Tombouctou, renvoyant l’image d’un lundi de feu et de sang pour le Sahel.

Réagissant au premier événement, le président guinéen, Alpha Condé, a affirmé que son pays est prêt à fournir des troupes à la force G5 Sahel.

Réaction identique de Mankeur Ndiaye, chef de la diplomatie sénégalaise, poussant à une coopération resserrée des Etats pour faire face à la recrudescence du crime terroriste.

Ces 2 pays ne sont pas membres du G5 Sahel, composé du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad.

Mamadou Diouf, expert des Nations Unies (ONU) de nationalité sénégalaise, se désole de constater sur «Seneweb» que la nouvelle attaque dans la capitale du Faso «a eu lieu presque au même endroit que la précédente, il y a un peu plus d’un an, pour narguer les forces de sécurité et étaler au grand jour la vulnérabilité de tout le pays». Il déplore «une approche parcellaire de la prévention».

Pour Yahya Ould Ahmed Waghef, ancien Premier ministre de Mauritanie, «la sécurité au Sahel est une question complexe pour laquelle il est difficile d’envisager une démarche uniforme. Cependant, il est nécessaire de repenser le mode d’intervention de nos partenaires et notre propre modèle de gouvernance. Il faut aussi renforcer le dispositif de sécurité sur le terrain et la coopération entre Etats".

Il ajoute que "le rôle des puissances régionales est important dans cette perspective, car les pays du Sahel sont quelque part victimes des querelles de positionnement entre la France, ancienne puissance coloniale, et les puissances sous régionales». Il estime par ailleurs que le G5 doit être ouvert à des pays comme l’Algérie, le Sénégal, le Maroc, dont l’expertise des armées et des forces de sécurité est incontestable.

Mais, pour cet officier de police à la retraite «il est absolument nécessaire de sensibiliser et d’impliquer les populations du Sahel dans la gestion de la sécurité collective par l’éducation. Une approche qui permettrait une prévention plus efficace».

Moussa Ould Hamed, ex directeur général de l’agence gouvernementale d’Information estime que «la multiplication des attentats prouve que nous n’avons pas trouvé la réponse aux questions liées au contexte. Nous sommes en face de mouvements qui tentent de se servir de la religion pour la réalisation d’un projet politique. Ils profitent du contexte de chaque pays, sur la base d’une analyse de la situation socio-politique, comme ce qui se passe actuellement avec les peuls au Mali. Je ne serais pas surpris qu’un jour ces groupes tentent de profiter du calvaire des négro-africains en Mauritanie". Il explique par ailleurs, que "notre système politique n’est pas représentatif de nos peuples. On peut avoir toutes les bombes et tous les avions de combat, mais cela ne va pas régler le problème de fond».

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 15/08/2017 à 17h01