Mauritanie: débat autour d'une institution chargée de la gestion des biens confisqués

Mohamed ould Bouamatou, banquier et homme d'affaires mauritanien, en exil au Maroc depuis 6 ans.

Mohamed ould Bouamatou, banquier et homme d'affaires mauritanien, en exil au Maroc depuis 6 ans.. DR

Le 20/09/2017 à 17h26

La création d'un Etablissement chargé de la gestion des biens gelés, saisis, confisqués et du recouvrement des avoirs criminels (EGBGSCRAC), le 14 septembre dernier, est à l'origine d'un vif débat en Mauritanie. Pourquoi cet établissement et surtout à ce moment bien précis!

La création par le gouvernement mauritanien d’un Etablissement chargé de la gestion des biens gelés, saisis, confisqués et du recouvrement des avoirs criminels (EGBGSCRAC), institution à l’acronyme kilométrique et pratiquement imprononçable, à l’occasion d’un conseil des ministres tenus le 14 septembre dernier, continue à susciter de nombreux commentaires à Nouakchott.

Le décret créant la nouvelle institution rentre dans le cadre de la mise en œuvre d’une loi anti- corruption adoptée en 2016.

Mais au-delà d’une procédure normale visant à créer les outils d’application d’un texte devant être perçu comme une loi impersonnelle, c’est plutôt le timing d’adoption du décret qui est à l’origine d’un vif débat.

La décision gouvernementale intervient au moment de l’instruction d’une affaire de corruption présumée impliquant le richissime banquier Mohamed Ould Boumatou, réfugié au Maroc depuis plusieurs années, l’ancien sénateur Mohamed Ould Ghadda et 13 de ses collègues qui ont voté contre le projet de révision constitutionnelle visant la suppression de l’ancienne haute chambre du parlement.

Ainsi, les partisans du banquier, des sénateurs et les avocats de la défense dénoncent «une démarché grossière visant à confisquer les biens de Mohamed Ould Bouamatou, avec une perspective de graves répercussions sur la confiance vis-à-vis l’Etat, de la justice, de forts gros risques de fuite des capitaux et des investisseurs. Le tout sur fond d’une rivalité personnelle entre les anciens alliés que sont Mohamed Ould Abdel Aziz et Mohamed Ould Bouamatou».

Une affaire au sujet de laquelle l’hebdomadaire «Le Calame» généralement critique vis-à-vis du pouvoir, publiait récemment une contribution sous le titre: «Origines et perspectives d’un conflit personnel aux retombées nationales».

Dans un son de cloche radicalement opposé, une source proche des autorités tempère cette critique. Celle-ci soutient la thèse «d’une démarche ordinaire dans le traitement de toutes les affaires relatives à des biens éventuellement mal acquis et autres avoirs criminels».

Notre interlocuteur rappelle par ailleurs «le principe de la présomption d’innocence. Car au finish, les biens saisis sont finalement restitués à leurs propriétaires légaux dans les cas où l’infraction de corruption ne serait pas établie à l’égard des personnes poursuivies devant les juridictions compétentes».

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 20/09/2017 à 17h26