Mauritanie: l'initiative en faveur d'un troisième mandat étouffée

L'ex-président mauritanien Mohamed ould Abdel Aziz.

L'ex-président mauritanien Mohamed ould Abdel Aziz. . DR

Le 15/01/2019 à 09h51, mis à jour le 15/01/2019 à 09h53

Une initiative des députés de la majorité visant à amender les articles protégés de la constitution mauritanienne, en vue d'ouvrir la voie à un troisième mandat au président Mohamed ould Abdel Aziz a fait pschitt. L'opposition de certains élus de la majorité a certainement contribué à cet échec.

Une initiative de plusieurs députés de la majorité en Mauritanie, visant à amender les articles 26, 28 et 99 de la constitution du 20 juillet 1991, modifiée par voie référendaire le 25 juin 2006, résultat d’une réunion organisée vendredi dernier, le 11 janvier 2019 en soirée, dans l’objectif de permettre à Mohamed ould Abdel Aziz de se présenter à l’élection de 2019, a été étouffée dans l’œuf, ont rapporté dimanche dernier, plusieurs sources concordantes, proches du pouvoir.

L’abandon de ce projet est motivé par plusieurs obstacles, selon ces sources. Le premier (et énorme) écueil, serait lié à la réaction du président en exercice, qui a demandé aux initiateurs de mettre immédiatement fin «à leur manœuvre», du fait de son engagement, plusieurs fois réitéré, à respecter scrupuleusement les termes de la constitution, qui érigent la limitation des mandats au rang d’une clause d’éternité, gravée dans le marbre.

Mais l'obstacle fondamental a certainement été l'attitude de certains députés. En effet, malgré le fait que cette nouvelle initiative ait recueilli la signature de plus de 50 députés, donc le quota nécessaire pour que toute proposition de loi puisse être soumise à la discussion des élus, elle a rencontré une opposition farouche de la part de nombreux députés de l’Union Pour la République (UPR), principal parti de la majorité, et d’autres représentants de partis issus de la mouvance présidentielle.

Ce cas de figure est venu rappeler à la mémoire de tous la «douloureuse» expérience vécue dans le cadre du processus de suppression du sénat, la défunte chambre haute du parlement, dont les élus, tous issus de la majorité, avaient néanmoins refusé de se saborder en rejetant un projet de révision constitutionnelle visant à enterrer leur institution, le 17 mars 2017.

Dans leur argumentaire de rejet de l’initiative du week-end, les élus de la majorité qui ont refusé l'éventualité d'un troisième mandat, ont estimé devoir respecter la volonté du président de la République, qui a plusieurs fois écarté une telle hypothèse et proclamé sa volonté de veiller au respect des dispositions constitutionnelles, conformément au serment prêté au moment de son investiture.

Ce syndrome de l’ancien sénat apparait en toile de fond à travers la position de tous les élus, qui ont mis en garde contre une grave crise parlementaire au sein de la majorité, en cas de soumission de la proposition de loi à une procédure de validation devant aboutir à un éventuel vote, du fait que celle-ci suscitait déjà un véritable malaise au sein des rang tant de la majorité que de l'opposition. 

Dans les cercles de l’opposition, tous les députés se sont réunis dimanche dernier, 13 janvier 2019 en soirée, au siège du Rassemblement national pour la réforme et le développement (RNRD/Tawassoul), courant islamiste et première force de la mouvance au niveau de l’assemblée, pour étudier la riposte à donner face à cette démarche, d'ores et déjà dénoncée comme «une véritable forfaiture».

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 15/01/2019 à 09h51, mis à jour le 15/01/2019 à 09h53