Vidéo. Mauritanie: les femmes en colère après un viol suivi de meurtre

DR

Le 10/09/2020 à 12h31, mis à jour le 10/09/2020 à 13h25

VidéoMoima Mint Amar, une jeune fille de 27 ans, a été victime d’un viol avant d'être assassinée dans la commune de Dar Naim (banlieue nord de Nouakchott). Un énième cas qui a suscité une forte émotion dans la capitale mauritanienne et une vive colère des femmes qui ont manifesté à Nouakchott.

Ce nouveau crime perpétré contre une personne de sexe féminin vient allonger la longue liste des violences faites aux femmes et suscite émotion et colère à Nouakchott.

En signe de protestation, des centaines de femmes regroupées au sein d’un Collectif de défenseurs des femmes et de lutte contre les violences faites aux filles (CDFLVF) ont manifesté devant les locaux du ministère de l’Intérieur ce mercredi 9 septembre, pour condamner ce fait divers affligeant et réclamer l’adoption d’une loi réprimant ce genre de crimes. Demande qu'elles font depuis près d’une année.

Toutes les grandes figures du mouvement associatif féminin en Mauritanie étaient présentes.

Aminetou Mint Moctar, présidente de l’Association des femmes chefs de famille (AFCF), dénonce la recrudescence des viols et des meurtres à Nouakchott et dans les régions, puis rappelle le nom des victimes de ce genre de crimes de ces dernières années. La présidente de l’AFCF interpelle le ministère de l’Intérieur par rapport à sa mission régalienne de sécurité publique.

Mme Lala Aicha Diop Sy, présidente du Comité de solidarité avec les victimes de violation des droits humains (CSVVDH), exige le vote d’une loi contre le phénomène des violences contre les femmes qui dort dans les tiroirs depuis plusieurs mois. Elle interpelle à la fois les départements de l’Intérieur et de la Justice devant la multiplication des crimes crapuleux touchant à l’intégrité des jeunes et des femmes au cours des dernières années.

Pour sa part, Sektou mint Mohamed, responsable au sein du Collectif des défenseurs des droits des femmes et de lutte contre les violences faites aux filles, explique les raisons du rassemblement, qui vise à exprimer un rejet, une vive colère, contre les crimes graves et qui se multiplient depuis le début du confinement lié à la pandémie du coronavirus (COVID-19).

Une recrudescence des actes de violence dans un contexte de blocage inexplicable d’une loi dont l’objectif est de mettre fin à la souffrance qui guette toutes les cibles potentielles que sont les femmes.

Salamata Adama Sy, présidente de l’Association pour la promotion de l’éducation des filles interpelle les personnalités religieuses, leaders d’opinion très écoutés au sein de la société mauritanienne pour qu'ils jouent leur rôle dans ce combat, en conformité avec les recommandations divines.

Très en colère, les manifestantes criaient à l’unisson «protégez nos filles, adoptez une loi contre les violences faites aux femmes», dénonçant la propagation à une grande échelle de l’insécurité. «La violence sévit partout, aussi bien dans les zones urbaines que rurales, et frappe de manière indistincte les femmes de tous âges, de toutes les classes sociales, notamment les catégories en situation de vulnérabilité».

Ces femmes ont déploré en chœur «la lenteur dans la prise de conscience d’un phénomène extrêmement dangereux pour la société, dans le contexte d’un système juridique et institutionnel victime de nos préjugés, qui font obstacle à la dénonciation des crimes et tolère sans gène la quasi-totalité des formes de violence à l’égard des femmes et des filles, sous-estimant l’ampleur du phénomène».

Une tendance aggravée par le confinement dans la foulée de la pandémie mondiale du coronavirus (Covid-19). Les cas de viols suivis de grossesses et parfois de meurtres se sont multipliés à travers le pays.

Ce nouveau crime défraie la chronique et fait les choux gras de la presse locale dans un contexte institutionnel de blocage depuis plusieurs mois, d’un projet de loi réprimant la violence faite aux femmes, élaboré conjointement par les ministères de la Justice, des Affaires islamiques et le ministère des Affaires sociales de l’enfance et de la famille (MASEF). Blocage attribué à des milieux conservateurs proches du courant islamiste.

Par Amadou Seck (Nouakchott, correspondance)
Le 10/09/2020 à 12h31, mis à jour le 10/09/2020 à 13h25