Un jour sombre pour la liberté de la presse. La Haute autorité de la communication (HAC) du Mali a décidé la fermeture de la chaîne d’information privée Joliba TV News pour deux mois, a fait savoir ce jeudi le très informé journaliste Serge Daniel. Cette décision est l’épilogue d’un long bras de fer entamé depuis plus d’un mois.
Tout a commencé le 30 septembre 2022. Dans l’émission «Edito» de ce jour, soit après le retour triomphal du Premier ministre par intérim Abdoulaye Maïga de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, où il avait prononcé un discours incendiaire contre la France et certains pays voisins, le journaliste Mohamed Halidou Attaher avait déclaré que «l’intolérance prend de l’ampleur dans notre pays. La liberté d’expression est en danger, la démocratie avec. Nous sommes dans la dictature de la pensée unique. (…) Pour l’instant, les colonels au pouvoir gouvernent avec l’opinion de la foule et la foule par définition ne réfléchit pas.» Il s’est également adressé à la HAC, l’enjoignant de «jouer tout son rôle pour faire face aux multiples dérives sur les réseaux sociaux».
Cette sortie a valu à Joliba TV News une mise en demeure de la part de la HAC, le 12 octobre dernier. Dans une lettre signée de son président, Fodié Touré, le régulateur national a expliqué que l’émission concernée «comporte des manquements se manifestant par des propos diffamatoires et des accusations infondées concernant l’instance de régulation, la Haute autorité de la communication, l’état de la liberté d’expression au Mali et les autorités de la transition».
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L’affaire a fait beaucoup de bruit et Joliba TV News a reçu de nombreux soutiens. Dans un communiqué publié le 17 octobre dernier, le Groupe patronal de la presse s’est questionné sur l’opportunité de la démarche de la HAC qu’il a assimilée à «une tentative de musèlement de la presse et d’étouffement de l’expression plurielle, dans un pays où les libertés fondamentales demeurent garanties par la Constitution en vigueur». Le groupement a également rappelé à la HAC «son devoir d’équidistance entre la presse et les pouvoirs en place».
Mais rien n’y fit, la HAC a mis ses menaces à exécution. Joliba TV News a trois jours pour introduire un recours contre sa suspension, rappelle Serge Daniel. Affaire à suivre.