«Si la France n’était pas intervenue, si nos militaires n’étaient pas tombés au champ d’honneur en Afrique, si (les opérations militaires) Serval puis Barkhane n’avaient pas été décidées, nous ne parlerions aujourd’hui ni de Mali, ni de Burkina Faso, ni de Niger», a déclaré le président français devant les ambassadeurs français réunis à Paris pour leur conférence annuelle.
«Ces États n’existeraient plus aujourd’hui dans leurs limites territoriales», a-t-il affirmé, insistant sur le fait que la France était intervenue contre les jihadistes à la demande de ces pays du Sahel.
Les militaires nigériens, qui se sont emparés du pouvoir à Niamey le 26 juillet, retiennent prisonnier depuis le président renversé Mohamed Bazoum. Et ils ont pris la France, l’ex-puissance coloniale, pour cible privilégiée, alors que Paris réclame le retour à l’ordre constitutionnel et reste en contact avec le président Bazoum, élu en 2021.
Vendredi soir, la tension est montée d’un cran lorsque les militaires ont donné 48 heures à l’ambassadeur français Sylvain Itté pour quitter le territoire, ce que Paris a refusé, arguant que ce gouvernement était illégitime et n’avait aucune autorité pour fonder une telle requête.
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Emmanuel Macron a salué le travail de l’ambassadeur et fait savoir qu’il était toujours à Niamey.
«La France et les diplomates ont été confrontés ces derniers mois à des situations dans certains pays particulièrement difficiles, que ce soit au Soudan où la France a été exemplaire, au Niger en ce moment même et je salue votre collègue et vos collègues qui écoutent depuis leur poste», a-t-il déclaré.
Paris a en revanche suspendu son aide au développement et sa coopération militaire, sans pour autant dénoncer les accords de défense existants avec le Niger comme réclamé par les militaires à Niamey.
Quelque 1.500 soldats français sont encore présents au Niger, devenu le pivot de son dispositif antijihadiste au Sahel, mais ils craignent désormais de devoir plier bagage. Au Mali et au Burkina Faso, où ont eu lieu des coups d’Etat successifs, la France avait dû se résoudre l’an dernier à retirer ses troupes et elle n’y a plus d’ambassadeur.
Responsabilité politique
Le dirigeant français a au passage taclé Washington - qui compte 1.100 militaires au Niger - et certains pays européens qui prônent une solution diplomatique à la crise.
«De Washington en passant par d’autres capitales européennes, j’ai entendu des voix, j’ai écouté des journaux (...) nous expliquer ”n’en faites pas trop, ça devient dangereux”», a-t-il souligné.
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«On a dit que la France était trop engagée en soutien au président Bazoum (...) On ferait quoi si un coup d’Etat se passait en Bulgarie ou en Roumanie ?», a-t-il lancé. «On aurait dit ”on va regarder parce qu’ils nous ont proposé un Premier ministre”?». «On ne fait pas de double standard», a-t-il tranché.
Mohamed Bazoum est «un homme intègre, démocratiquement élu, courageux», a-t-il dit. «Parce qu’il ne démissionne pas, au péril de sa vie (...) on nous explique que la bonne politique serait de le lâcher parce que c’est devenu à la mode, parce qu’en fait il faudrait produire local maintenant, même quand ce sont des putschistes», a-t-il ironisé.
Emmanuel Macron a appelé dans la foulée les dirigeants de la région a plus de responsabilités face à «une épidémie de putschs dans tout le Sahel», en estimant que «le coeur de la réponse» devait être politique.
«J’appelle tous les Etats de la région à avoir une politique responsable», a insisté Emmanuel Macron, en rappelant que «nous soutenons l’action diplomatique, et quand elle le décidera militaire, de la Cedeao (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest, ndlr), dans une approche de partenariat».
S’agissant de la politique française en Afrique, il a prôné «ni paternalisme, ni faiblesse parce que sinon on n’est plus nulle part».
Cette semaine, des manifestations pourraient se dérouler devant la base où sont stationnées les troupes françaises pour réclamer leur départ.