Elections en Afrique du Sud: le chef de l’opposition veut «évincer» l’ANC du pouvoir

John Steenhuisen, président de l'Alliance Démocratique (DA).

Le 17/02/2024 à 07h09

Le principal chef de l’opposition en Afrique du Sud, John Steenhuisen, a écarté vendredi, dans un entretien à l’AFP, la possibilité d’une coalition avec l’ANC, affirmant vouloir au contraire «évincer» le parti au pouvoir depuis la fin de l’apartheid en 1994.

Dans un contexte socio-économique morose et une image écornée par les affaires de corruption, l’ANC risque de perdre sa majorité absolue au Parlement pour la première fois à l’issue des prochaines élections, selon les enquêtes d’opinion.

Les quelque 27,5 millions de Sud-Africains inscrits sur les listes électorales devront se rendre aux urnes entre mai et août pour renouveler leur Parlement, qui désignera ensuite le prochain président. La date précise du scrutin doit encore être annoncée.

Formée en 2000 après la fusion de trois partis majoritairement blanc, l’Alliance démocratique (DA) tente de se départir de l’image d’un mouvement blanc et de classe moyenne pour conquérir un électorat noir. Aux dernières élections de 2019, lorsqu’il était dirigé par un homme noir, l’Alliance a remporté environ 20% des voix.

Question: Pourquoi l’Alliance démocratique a-t-elle jusqu’à présent échoué à percer lors des élections?

Réponse: L’Afrique du Sud a suivi le mouvement de la majorité des pays du continent après leur libération (...) où le parti au pouvoir, après cette libération, bénéficie d’une période de domination politique plutôt longue mais qui s’atténue par la suite.

Je pense que trente ans après (la fin de l’apartheid et l’arrivée au pouvoir de l’ANC), nous avons atteint un point de bascule très important et c’est pour cela que les prochaines élections ne ressembleront à aucuns des scrutins passés.

Q: Après 30 ans de démocratie, la question raciale jouera-t-elle encore un rôle?

R: Bien sûr, la race va jouer un rôle dans ce scrutin, mais ce rôle sera bien moins important que lors des élections de ces 30 dernières années.

Q: Que représente le nouveau parti de l’ex-président Jacob Zuma pour l’Alliance?

R: Avec l’arrivée du parti de l’ancien dirigeant de l’ANC Jacob Zuma, la tâche est maintenant plus facile dans le KwaZulu-Natal (province clef du pays, comptant le plus grand nombre d’électeurs et fief de l’ANC)...

Tout ce qui fait baisser le pourcentage de l’ANC et grignote ses voix facilite grandement la tâche d’une charte multipartite et de l’Alliance démocratique.

Nous ne formerons des coalitions qu’avec des partis qui partagent les mêmes valeurs et principes que nous.

Nous savons que M. Zuma (qui avait dû quitter le pouvoir en 2018 à cause d’affaires de corruption) est un délinquant constitutionnel, qu’il ne respecte pas l’Etat de droit et qu’il a passé toute sa vie politique à essayer de le pervertir.

Q: L’Alliance démocratique pourrait-elle s’allier avec l’ANC?

R: Vous demandez si on est prêt à conclure un accord avec l’ANC? Mais quel ANC? Le président Ramaphosa survivra-t-il au fait d’être le premier président de l’ANC depuis 1994 à perdre la majorité? Il y a de fortes chances pour que cela ne soit pas le cas et qu’il soit éjecté.

Ce sont des choses que nous devrons étudier très attentivement lorsque les cartes seront redistribuées. Mais je me suis engagé à ce que notre parti fasse tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher ce scénario de se produire.

Q: A quoi ressemblerait une politique étrangère menée par l’Alliance?

R: 75% des investissements directs étrangers en Afrique du Sud, ceux-là mêmes qui créent des emplois, qui maintiennent notre population au travail et qui font progresser notre économie, viennent des Etats-Unis, de l’Union européenne et du Royaume-Uni. Sept pour cent des investissements directs étrangers proviennent de la Russie et de la Chine réunies.

Mon inquiétude, c’est que nous entrons maintenant dans une sorte de (...) jeu de l’oie idéologique avec des pays comme l’Iran, avec des pays qui ne partagent pas nos valeurs et principes. Et que nous mettions en péril les investissements directs étrangers.

Et pour rien en retour, car nous n’avons pas un seul accord commercial bilatéral avec un pays des Brics (bloc des pays émergents dont fait partie l’Afrique du Sud).

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 17/02/2024 à 07h09