Les autorités nigériennes avaient dénoncé en mars l’accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence des soldats américains déployés dans le cadre de la lutte antijihadiste, était désormais «illégale».
Position stratégique
La base aérienne 201, située en périphérie d’Agadez dans le nord du Niger, permettait depuis 2019 aux drones et aéronefs américains de mener des missions de surveillance dans une vaste région aux frontières poreuses où prolifèrent les groupes armés notamment jihadistes ainsi que les trafics d’armes, de drogue et d’êtres humains.
Les drones Reaper en service dans l’armée américaine pouvaient ainsi survoler le territoire du Niger jusqu’aux confins de la Libye, du Tchad, du Nigeria, et du Mali, des pays qui disposent de capacités de surveillance aérienne limitées.
Avancée russe et iranienne
Les militaires au pouvoir à Niamey ont exigé le départ des forces américaines après que des responsables de Washington ont exprimé leur préoccupation concernant «les relations potentielles du Niger avec la Russie et l’Iran».
Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger est le troisième pays du Sahel à connaître un coup d’Etat et à rompre ses partenariats avec des pays occidentaux, pour se tourner vers la Russie.
Lire aussi : Le Niger rompt sa coopération militaire avec les Etats-Unis
Le sort des réserves d’uranium du Niger, 7ème pays producteur mondial, inquiète les officiels américains. L’Iran a fortement augmenté ces derniers mois son stock d’uranium enrichi selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et multiplie les signes de rapprochement avec les autorités nigériennes depuis le coup d’Etat du 26 juillet 2023.
Le Premier ministre nigérien Ali Mahaman Lamine Zeine a toutefois assuré mardi dans une interview au Washington Post que «rien» n’avait été signé avec l’Iran concernant l’uranium.
Effectifs limités
Le nombre de soldats américains déployés au Niger était estimé fin 2023 à 650, auxquels s’ajoutent quelque centaines de contractuels.
Une partie de ces soldats sont stationnés dans la base aérienne d’Agadez, une autre à l’intérieur de la base aérienne 101 des forces armées nigériennes, située dans la capitale Niamey, aux côtés d’autres contingents étrangers.
Lutte antijihadiste
Les militaires étaient principalement déployés au Niger ainsi qu’au Tchad voisin dans le cadre de la lutte anti-jihadiste, mais toute coopération militaire avait été suspendue au Niger dans la foulée du coup d’Etat.
Lire aussi : Pourquoi le Sénat américain a voté à une écrasante majorité pour le maintien des troupes américaines au Niger
Des forces spéciales américaines intervenaient discrètement aux côtés de l’armée nigérienne contre les groupes jihadistes avant le coup d’Etat de juillet.
Le 4 octobre 2017, quatre soldats américains et cinq militaires nigériens avaient été tués dans une embuscade du groupe Etat islamique (EI) à Tongo Tongo, un village de la région de Tillabéri dans la zone des «trois frontières», et à une vingtaine de kilomètres de la frontière avec le Mali.
Les drones américains appuyaient également l’armée nigérienne contre les groupes jihadistes de Boko Haram et Iswap dans le sud-est proche du Nigeria.
Les Etats-Unis menaient également des opérations de renseignement, de surveillance et de reconnaissance, qui avaient repris en septembre 2023 mais uniquement à des fins de «protection des forces» américaines, selon le Département de la Défense (DOD).
Matériel et formation
Les Etats-Unis fournissent du matériel militaire au Niger depuis 1962, au lendemain de l’indépendance de cette ancienne colonie française.
Véhicules blindés, avions de surveillance et de transport militaire, centre de communication et de transmissions… Ces livraisons avaient augmenté dans le cadre de la lutte contre les jihadistes.
Lire aussi : Niger: arrivée à Niamey de nouveaux instructeurs et de matériel militaires russes
L’armée nigérienne et ses officiers ont également accès depuis 1980 au programme International Military Education an Training (Imet) qui permet le financement des études et la formation de militaires étrangers, y compris dans les centres et académies aux États-Unis.
Présence militaire impopulaire
L’opinion nigérienne est depuis longtemps hostile à la présence de forces étrangères sur son territoire. En 2022, environ deux tiers des nigériens n’étaient «pas d’accord que le gouvernement ait recours aux forces militaires étrangères pour sécuriser le pays», selon un sondage Afrobarometer.
Le départ des forces françaises en décembre avait suscité peu de controverses dans ce pays où les groupes armés continuent de perpétrer des attaques malgré l’engagement des partenaires occidentaux.
En matière de sécurité, «la région d’Agadez ne trouve aucune utilité à la présence des Américains», affirme à l’AFP Amodi Arrandishou, président d’une plateforme d’organisations de la société civile à Agadez.
«Les Américains sont restés sur notre sol, sans rien faire quand les terroristes tuaient nos populations et brûlaient des communes» a renchéri mardi le Premier ministre Zeine.