Sénégal. Présidentielle 2019: hécatombe après l'étape du parrainage

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Le 03/01/2019 à 12h30, mis à jour le 03/01/2019 à 13h26

Finalement, seuls cinq candidats sont assurés d'avoir passé sans encombre l'étape tant redoutée du parrainage, alors que trois autres ont été invités à régulariser des doublons. Mais l'écrasante majorité des candidats déclarés ne participera pas au scrutin de la présidentielle du 24 février.

Il y a un mois, le Premier ministre sénégalais, Mahammed Boun Abdallah Dionne, faisait une affirmation qui accréditait la thèse selon laquelle les candidats à la présidentielle sénégalaise du 24 février 2019 allaient être choisis à l'avance. "Il n'y a aura pas cinq candidats en face de Macky Sall", disait-il.

Et voilà que les suspicions de l'opposition sont désormais confirmées par les listes de parrainage qui ont été finalement validées par le Conseil constitutionnel. 

Sur 27 listes de parrainage déposées par des candidats aux prochaines joutes électorales, seules 5 ont été validées, alors que trois autres ne pourront l'être qu'après régularisation des doublons.

Ces doublons sont des électeurs figurant sur la liste de parrainage d'un autre candidat qui, chronologiquement, a présenté sa liste en premier. La régularisation doit impérativement se faire sous 48 heures, en remplaçant ces électeurs ayant déjà apposé leur signature sur d'autres listes de parrainages préalablement validées, par d'autres électeurs. 

Cinq listes de parrainage validées

Macky Sall, Ousmane Sonko, Khalifa Sall, Karim Wade et Elhadji Issa Sall sont les cinq candidats à cette présidentielle qui ont réussi à passer, haut la main, l'étape la plus difficile de la candidature, puisque le minimum requis était de 53.500 signatures d'électeurs. Ils ont tous eu des scores largement au-dessus de ce seuil. 

Ce n'est toutefois pas encore le cas d'autres candidats, que sont Idrissa Seck, Madické Niang et Malick Gakou, qui doivent rapidement régulariser leurs listes. 

Le président du parti Rewmi, Idrissa Seck, a réussi à valider un peu plus de 57.000 signatures, mais il y aurait, sur sa liste de parrainages, des doublons qui concernent les 7 régions.

Car l'autre règle pour ce parrainage est justement de présenter 2000 électeurs par région, pour 7 des 14 circonscriptions administratives que compte le Sénégal.

L’ex-compagnon d’Abdoulaye Wade, Madické Niang, qui a réuni quant à lui plus de 51.000 signatures valides et Malick Gakou de la coalition de "l’Espoir/Suxalli Senegaal", qui en a moins de 46.000, ont également une deuxième chance, mais sur 48 heures seulement 

19 candidats recalés

En dehors de ces 8 candidatures, les 19 autres ont été purement et simplement invalidées pour «divers motifs», selon le Conseil constitutionnel. 

Selon les candidats malheureux, la vérification de leur liste de parrainage s'est effectuée dans des conditions opaques. Ils avaient en effet été invités à livrer un fichier Excel, de la suite Office de Microsoft, contenant leurs listes de parrainage. Mais nul n'est en mesure de dire concrètement comment un rapprochement a été fait avec le fichier national qui contient quant à lui les 6,7 millions d'électeurs régulièrement inscrits sur les listes électorales. 

Ces candidats recalés ont donc formulé mille et un griefs sur la méthodologie utilisée par le programme informatique mis en place par le Conseil constitutionnel.

Par exemple, l'un d'entre eux, Aminata Tall Sall, la maire de la ville Podor, s'est dite étonnée de voir les signatures de la moitié de l'électorat de son conseil municipal rejetées par le conseil constitutionnel.

Un autre candidat malheureux, Mamadou Diop Decroix, plusieurs fois ministre et l'un des grands acteurs de la démocratie sénégalaise depuis le printemps étudiant de Mai-68 à Dakar, s'est quant à lui demandé si l'on devait condamner des dizaines de milliers de personnes à des peines allant jusqu'à un an de prison pour avoir été rendus coupables de "double parrainage", c'est à dire d'avoir apposé sa signature sur deux listes de candidats concurrents... Il s'agit là, en effet, de l'une des peines prévues par la nouvelle loi qui entérine la mesure du parrainage.

Le collectif de l'opposition n'entend pas se laisser faire. Ses membres ont annoncé hier en conférence de presse, une série d'actions qui seront menées, dont plusieurs manifestations à travers le pays. 

Mais dans un communiqué, publié mardi 29 décembre dernier, le Conseil Constitutionnel a déclaré que le fait d'avoir collecté un nombre exact de parrainage exigés ne «garantissait pas la recevabilité des candidatures». Cette fermeté sera-t-elle comprise? 

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 03/01/2019 à 12h30, mis à jour le 03/01/2019 à 13h26