Sénégal: inquiétude autour de la hausse des cas de violences faites aux femmes

Les violences faites aux femmes au Sénégal. Dr

Le 14/11/2020 à 16h33, mis à jour le 14/11/2020 à 16h36

Au Sénégal, les résultats d'une enquête menée par des enseignants de l'université Gaston Berger révèlent des chiffres accablants concernant les violences faites aux femmes. 

Au Sénégal, les statistiques nationales révèlent 668 cas de violences sur mineures, 706 agressions sexuelles et plus de 1.200 cas de viols rien qu'en 2019. Un chiffre très en deçà de la réalité puisque dans ce pays, les affaires de viols sont souvent étouffées. La prévalence des violences sur les femmes est de 60% au Sénégal et les résultats de cette étude montrent que plus d'une femme sur deux a été victime de violence domestique au moins une fois dans sa vie. 

La région de Diourbel bat le record des violences basées sur le genre avec plus de 80% de victimes. La courbe des agressions sexuelles grimpe également en flèche depuis quelque temps. «Rien que ce matin, j’ai eu deux nouveaux cas de grossesses issues de viol. L’une des jeunes filles a 17 ans», déplore Sedouma Yattara, gynécologue à l’hôpital Roi-Baudouin de Guédiawaye, en banlieue de Dakar.

Sur 1.977 accouchements enregistrés par l’hôpital depuis le début de l’année, 243 concernaient des mineures, dont deux patientes de moins de 14 ans. Avec un bassin non préparé, le recours à une césarienne est souvent impératif. «En plus, ces jeunes filles nous arrivent dans un état psychologique déplorable. Parfois elles ont tenté d’avorter clandestinement, ce qui peut causer des hémorragies ou des infections», souligne le praticien.

Les jeunes filles sont doublement victimes. De leur bourreau et de l’exclusion, familiale et sociale. A en croire Awa Cissé, chargée de l’enfance à l’Association des juristes sénégalaises (AJS), «beaucoup de mineures sont incarcérées pour avortement ou infanticide; le débat pour autoriser l’avortement en cas de viol ou d’inceste est posé depuis des années, mais rien ne change alors qu’il faudrait sauver ces jeunes filles». Bien que le Sénégal ait ratifié en 2005 le protocole de Maputo sur les droits des femmes en Afrique, l’avortement reste interdit, sauf si un danger pour la vie de la mère est prouvé.

Face à toutes ces violences, un programme de lutte contre les violences faites aux filles a été lancé à Sédhiou (sud) à l’initiative de l’Association pour le développement du ‘’Gabou’’ et d’OSIWA. Ce projet consacré notamment à la lutte contre les grossesses non désirées, les mariages précoces des filles et les mutilations génitales féminines va se décliner à travers une série d’activités de mobilisation sociale, de sensibilisation et de plaidoyer pour le respect des droits humains, a-t-on appris lors de la cérémonie de lancement. 

Les initiateurs ont évoqué des tournées de sensibilisation, des séances de discussion dans les écoles, un renforcement du dialogue et des mécanismes de communication, des causeries sur les mutilations génitales féminines (MGF), et une assistance psychologique et médicale aux victimes. 

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 14/11/2020 à 16h33, mis à jour le 14/11/2020 à 16h36