Le phénomène «woubi ou homosexualité», suscite de plus en plus de débats en En Côte d’Ivoire. Ce terme, popularisé dans les milieux urbains, désigne les hommes qui adoptent des comportements efféminés ou entretiennent des relations avec d’autres hommes. Pour certains, cette attitude est perçue comme une atteinte aux valeurs culturelles africaines, où la famille et la tradition jouent un rôle central.
«Nous avons nos traditions et coutumes en Côte d’Ivoire. Je suis Akan, chez nous, nos parents ne nous ont jamais montré cette voie d’homosexualité (woubi), et donc je ne conçois pas cette pratique sur la terre ivoirienne», s’insurge Gnamien DeBeoumi, mécanicien.
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En Côte d’Ivoire depuis quelques temps ces woubi qui essaient de se mettre à visage découvert en se pavanant dans les rues abidjanaises, subissent la sentence de la population déjà visiblement remontée contre cette pratique.
La tension autour de la question de l’homosexualité en Côte d’Ivoire a franchi un cap avec la campagne «Non au woubi» ou encore «à bas les woubi». Lancée au mois d’août dernier, cette initiative qui a débuté sur la toile, a vu des milliers d’internautes ivoiriens poster des messages pour dénoncer et freiner la normalisation de l’homosexualité dans le pays.
Les résultats ne se sont pas fait attendre: des agressions homophobes ont été signalées dans plusieurs communes d’Abidjan et dans quelques villes de l’intérieur du pays.
Cette mobilisation a été catalysée par la diffusion d’une vidéo controversée où de jeunes homosexuels ivoiriens apparaissent habillés en tenues féminines, une image perçue comme provocante par de nombreux citoyens.
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À Abidjan, les rues ont vu des jeunes se rassembler, notamment à Yopougon au quartier Toits Rouges, pour manifester leur désaccord lors d’une marche pacifique. Cette opposition a également réuni des Ivoiriens de différents horizons, civiles, politiques et sociaux autour d’un même but: lutter contre ce qu’ils perçoivent comme un fléau. Les débats se sont également intensifiés, que ce soit en ligne, à la télé ou dans des panels publics, illustrant l’ampleur du phénomène
«Jamais dans l’histoire des Africains surtout de la Côte d’Ivoire, on a lu quelque part que nos ancêtres ont pratiqué le woubi. Le plus marrant, c’est qu’ils s’affichent et fièrement. Que cela s’arrête maintenant. Nos jeunes sont l’avenir de notre pays. Vivement que cette pratique soit bannie» souhaite N’guessan Arsène, un opérateur économique.
D’autres pointent du doigt de hautes personnalités du pays d’être au fondement de ce phénomène, «les vrais woubi sont dans le gouvernement. Ça fait des mois qu’on parle mais les autorités ne disent rien de concret» s’agace Moro Frédéric, agent de transport.
Pour lui, cela expliquerait l’inaction du gouvernement à prendre des décrets d’interdiction du woubi sur le sol ivoirien. Même quand la loi 2019-570 du 26 juin 2019 relative au mariage dispose que le mariage est l’union d’un homme et une femme célébrée devant l’officier de l’Etat civil. «Que l’Etat voie cette affaire de plus près afin d’y mettre fin une fois pour toute. Le phénomène woubi inquiète beaucoup les parents», demande Traoré Sétou, une mère de famille.
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Répondant au débat sur l’homosexualité en Côte d’Ivoire, le porte-parole adjoint du gouvernement, Mamadou Touré a évoqué «une incompréhension».
La vague anti woubi a démarré sur les réseaux sociaux début août, après des rumeurs dénonçant un cas de pédocriminalité qui aurait impliqué une personne homosexuelle.
Alors que certains appellent à une répression plus ferme, d’autres, plus discrets, estiment que chaque individu doit être libre de ses choix. Mais pour l’heure, c’est une société ivoirienne, tiraillée entre modernité et tradition, qui tente de défendre ses valeurs intrinsèques face à cette pratique va qui prend de l’ampleur dans un pays respectueux des valeurs traditionnelles ancestrales.
Notons que sur le plan légal, la situation est complexe. Aucune loi ivoirienne n’interdit clairement l’homosexualité, mais aucune ne la protège non plus. Ce vide juridique laisse place à des interprétations multiples et à une tolérance silencieuse.