Dakar: ces expropriations qui font polémique

Des quartiers inondations de Dakar.

Le 02/09/2025 à 09h39

VidéoChaque hivernage, les mêmes images reviennent: des eaux stagnantes, des quartiers paralysés, des familles isolées. Dans la région de Dakar, des familles vivent au rythme des inondations. Sur le terrain, colère et impuissance se mêlent.

«Hier, je n’avais même pas accès à mon domicile. J’ai dû passer la nuit ailleurs. Et depuis ce matin, je ne peux toujours pas rentrer chez moi, mes voisins non plus. C’est difficile. Les routes du village ont aggravé les inondations, faute d’assainissement. Cela aurait dû être prévu dès le départ», s’indigne Coumba Ndiaye, marraine de quartier.

«La situation est très difficile. Les inondations deviennent de plus en plus compliquées. Certains habitants vont jusqu’à déverser leurs fosses septiques dans les zones inondées. Résultat: l’eau stagne en permanence», explique Babou Dieng, riverain.

«Nous vivons cette situation avec beaucoup de difficultés. Chaque année, à la même période, c’est la même chose. Les eaux restent parfois plusieurs mois sans être évacuées. La population souffre bien avant qu’une solution soit trouvée», fait remarquer Pape Diop, sinistré.

Face à la récurrence des inondations, le gouvernement a décidé d’agir. En juillet 2025, le président Bassirou Diomaye Faye a signé un décret permettant à l’État de procéder à l’expropriation de maisons et de terrains construits dans des zones inondables. Une mesure radicale, diversement accueillie par la population.

«Les autorités sont venues nous rendre visite pour expliquer cette mesure. Les travaux ont déjà commencé. Donc, je demande aux populations de faire preuve de patience», explique Coumba Ndiaye.

Pour sa part, Babou Dieng explique que «l’ancien président Abdoulaye Wade avait déjà pris une décision similaire. Il avait délogé des sinistrés de Diamaguène pour les reloger à Apix. Mais notre inquiétude aujourd’hui, c’est de savoir s’il y aura réellement un suivi des mesures annoncées».

Pour Pape Diop, «si l’État veut aider la population sinistrée, à nous aussi d’avoir une certaine compréhension. Nous savons qu’il existe des zones inondables où il est impossible d’habiter. Donc, cette mesure est bonne et nous l’acceptons».

Ce décret s’appuie sur une étude cartographique menée par la Direction de la Prévention et de la Gestion des Inondations, couvrant plus de 10.000 km².

L’objectif est d’identifier et de préserver les voies d’eau naturelles, de libérer les sites menacés et de réduire les risques lors de pluies exceptionnelles. Le texte repose sur la loi sénégalaise de 1976 sur l’expropriation pour cause d’utilité publique, et fixe un délai maximum de trois ans pour libérer les terrains concernés.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 02/09/2025 à 09h39