Libreville: «Dans un pays où il pleut 2 à 3 fois par semaine», le robinet est à sec

Pénurie d'eau à Libreville.

Le 11/05/2024 à 16h42

VidéoDepuis le début de l’année, l’eau potable n’est distribuée aux 800.000 habitants de la capitale Gabonaise qu’au compte-gouttes. Selon les explications officielles, Libreville est confrontée à un net déficit pluviométrique et ses réserves sont au plus bas. Une situation des plus alarmantes car l’approvisionnement de Libreville dépend essentiellement de la SEEG, la Société d’énergie et d’eau du Gabon, qui en a le monopole, voilà bientôt plusieurs décennies.

Comme dans un désert, la bataille des populations pour l’approvisionnement en eau source de vie s’intensifie dans plusieurs quartiers de Libreville. Cette pénurie bat le record des coupures prolongées et oblige les riverains à faire la veille autour des sites où coule encore le précieux liquide. Il s’agit notamment des stations de lavage de véhicules qui disposent des forages.

Avec ses deux bidons vides, le jeune Guenaël, 22 ans, vient de traverser presque la moitié du quartier Montalier, dans le 6ème arrondissement de Libreville, pour y recueillir quelques litres d’eau. «C’est vraiment très difficile! Je pars de si loin pour venir chercher de l’eau. Et ce n’est même pas l’eau de la SEEG, c’est l’eau du forage qui peut s’arrêter à tout moment. Mais il y a pire, des mamans qui n’ont pas de jeunes enfants de mon âge comme moi font le même trajet parfois avec des enfants au dos juste pour s’approvisionner... Je ne sais pas ce que la SEEG fait, vraiment. Ou bien le personnel n’est pas bien rémunéré?», se demande-t-il.

Face à la crise de l’eau qui affecte les ménages et n’épargne aucun secteur de la ville, les habitants sont contraints de s’adapter en faisant des réserves d’eau collectées à partir des forages. Charles, responsable d’école, s’offre des services de particuliers pour avoir de l’eau dans son établissement.

Une dépense hors un budget à programmer, pour une mission qui relève de la compétence des services publics de l’État, selon lui «Ça fait près de 4 ans, sinon 6 ans que nous n’avons plus une goutte d’eau dans nos robinets. En plus de l’éducation des enfants, ce sont des dépenses supplémentaires. Chaque jour, il faut acheter quatre fûts d’eau dont le prix moyen est de plus de 3.500 francs. C’est inexplicable que nous puissions manquer d’eau dans un pays où il pleut 2 ou 3 fois par semaine», se plaint-il.

Acculée de toute part par les populations, la société publique explique que les «difficultés en eau déjà vécues par le passé à Libreville «sont, liées à la baisse du niveau d’eau des rivières et à la saturation des équipements de transport d’eau», depuis Ntoum à 40 Km au sud de Libreville.

En cause un manque d’investissement qui obère actuellement les capacités infrastructurelles de la société. Alors qu’un audit en 2019 avait révélé que 475 milliards étaient nécessaires pour renouveler les investissements de la SEEG, rien n’a pour l’heure été entrepris.

Le gouvernement de transition du général Président, Brice Clotaire Oligui Nguema avait fixé l’accès à l’eau potable dans le Grand Libreville comme une des ses priorités, mais huit mois plus tard, la volonté des nouvelles autorités se fait toujours attendre dans une ville qui a régulièrement soif, en plus d’être souvent dans le noir.

Par Ismael Obiang Nze (Libreville, correspondance)
Le 11/05/2024 à 16h42