«Nous devons défataliser la migration», à Libreville, des universitaires s’interrogent sur les nouveaux mécanismes des déplacements

Des universitaires se penchent sur le phénomène de la migration.

Le 21/07/2023 à 13h49

VidéoÀ l’initiative du centre d’études et de recherches en droit et institutions politiques (Cerdip) de la Faculté de Droit et Sciences économiques de l’Université Omar Bongo, Libreville a abrité un colloque international sur le thème: «La mise en migration du monde, mobilité et migration à l’ère de la globalisation».

D’après l’Organisation internationale pour les migrations, près de 30.000 personnes sont mortes depuis 2014 en mer en essayant de rallier l’Europe. La plus grande partie de ces infortunés échouent en Méditerranée. À l’heure du bilan d’une tragédie qui n’en finit avec son lot de victimes, les chercheurs et hommes de sciences réunis à Libreville interrogent la question migratoire sous l’angle de la nouvelle division internationale du travail. Mais le phénomène au coeur de la réflexion tient aussi compte des réalités internes à chaque État de départ de migrants.

«Nous avons les populations qui se déplacent parce qu’il y a pas d’activités génératrices de revenus. Les jeunes après les récoltes de plantation abandonnent les familles pour aller dans les centres urbains chercher de l’argent. Donc les partenaires financiers doivent venir en aide aux communes rurales», déclare, Bouréma Bassissé, un administrateur territorial venu partager l’expérience des déplacés internes de son pays, le Mali, lors de ce colloque de Libreville.

Une expérience malienne parmi tant d’autres sur la trajectoire migratoire utile à cette rencontre qui se veut scientifique et pluridisciplinaire. Elle porte sur plusieurs défis, à savoir: de la nécessité de décrire le fait migratoire contemporain; de la compréhension du contexte de «la fin de la géographie»; de l’appréhension du monde comme société globale aux sciences humaines et sociales post-nationales et post disciplinaires.

«A partir de là, on a décidé de réinterroger ce phénomène non plus en le regardant sous le triptyque: État de départ, État d’arrivée et migrants. Mais que l’on s’intéresse à tous les mécanismes en œuvre derrière ce phénomène migratoire, notamment la question des technologies, la révolution des technologies de la mobilité et des migrations», explique Dr Darlane Mengue M’Engouang, secrétaire générale du Cerdip.

Des explications qui offrent des outils scientifiques à une meilleure interprétation de la migration surtout que la plus grande mobilité se déroule à l’intérieur du continent Africain, soutient l’Universitaire camerounais, Dr Willy Didier. Il pense d’ailleurs que se déplacer vers l’autre ne saurait se résumer à un simple caprice. «Il faut changer de regard lunatique sur la question de la migration. La migration n’est pas un mal qu’on veut nous faire comprendre. Nous devons défataliser la migration et l’optimiser. Parce que la migration apporte un plus au pays d’accueil et au pays de départ.»

L’idée générale est de considérer la migration dans une perspective de compétition mondiale pour le contrôle des flux humains engendrée et alimentée par le jeu de la globalisation; laquelle met en scène non plus exclusivement l’Etat et le migrant mais aussi et, peut-être, surtout un ensemble d’entrepreneurs et d’infrastructures logistiques. Car comme l’ont noté d’autres intervenants, «sans la circulation des humains, il n’y a pas de lien social et la mondialisation sera menacée».

Par Ismael Obiang Nze (Libreville, correspondance)
Le 21/07/2023 à 13h49