Les débats sur la capacité des autorités à assurer les paiements des fonctionnaires se multiplient au moment où les caisses de l’Etat sont vides. Beaucoup d’experts mettent en avant le risque d’un défaut de paiement des salaires des fonctionnaires du public.
Pour couper court aux rumeurs et inquiétudes, la directrice générale de la gestion de la dette publique et de la coopération au sein du ministère des Finances, Kaouther Babiya, a essayé de rassurer les Tunisiens sur les rumeurs relatives à la possibilité de défaut de paiement des salaires des fonctionnaires.
Tout en assurant que les salaires seront versés pour les mois à venir, elle a déploré les interventions de prétendus experts en finances qui assurent que le pays est en faillite et que les paiements des salaires des fonctionnaires sont compromis.
Une chose est sure, la situation financière du pays est critique. Le président Kaïs Saied a présidé une réunion le jeudi 4 novembre pour étudier la situation critique du pays. Et face à l’absence d’alternatives de financement des dépenses publiques, le président a appelé les Tunisiens à contribuer au renflouement des caisses de l’Etat via une souscription à un emprunt national solidaire.
Lire aussi : Le président Saied appelle les Tunisiens à aider à renflouer les caisses de l'Etat
Rappelons que les autorités ont déjà lancé deux tranches d’emprunts obligataires qui ont permis de mobiliser 1.183 millions de dinars, principalement auprès des banques et établissements financiers. Cela a permis de couvrir certaines dépenses du budget de l’Etat.
Et une nouvelle opération d'emprunt obligataire solidaire national se déroule sur la période allant du 3 au 12 novembre courant pour renflouer les caisses de l’Etat et permettre de faire face aux dépenses budgétaires dont le paiement des salaires des fonctionnaires. Le président Saied a souhaité rassurer les souscripteurs en soulignant que «les fonds collectés seront sous le contrôle direct des présidences de la République et du gouvernement». Le gouvernement espère lever plus de 400 millions de dinars tunisiens.
Ces fonds levés visent à combler l’énorme déficit budgétaire qui a atteint 3 milliards de dinars à fin août dernier.
Lire aussi : Tunisie: le service de la dette devient un véritable goulot d’étranglement
Reste que le recours au marché local ne constitue pas en lui-même une véritable alternative face aux importants besoins de financement du budget de l’Etat, notamment pour faire face à la masse salariale conséquente à cause d’une pléthore de fonctionnaires et aux échéances de remboursement du service de la dette. Avec plus de 785.000 fonctionnaires, soit plus de 7% de la population du pays, la masse salariale a représenté plus de 17,4% du PIB en 2020, contre 15% du PIB auparavant, suite à une récession de -8,9% de l’économie tunisienne en 2020.
Quant au service de la dette, le pays doit rembourser quelque 4,5 milliards d’euros sur l’année 2021.
Du coup, les autorités tunisiennes ont discuté avec les responsables du Fonds monétaire international (FMI) dans le cadre de la revue de l’évolution économique et monétaire en Tunisie. Les deux parties ont discuté des réformes à entreprendre par les autorités tunisiennes afin de pouvoir bénéficier du soutien des partenaires internationaux.
Lire aussi : Tunisie: financement, les États-Unis et l’Union européenne comptent fermer davantage les vannes
Durant cette réunion, les autorités tunisiennes ont fait part des réformes envisagées par le gouvernement de Najla Bouden. Celles-ci portent sur la maitrise de la masse salariale grâce à la réduction des fonctionnaires dont le nombre dépasse les 700.000 fonctionnaires, la réduction des subventions sur divers produits et la réduction du train de vie de l’Etat.
Reste que la réduction de la masse salariale, qui constitue un véritable goulot d’étranglement pour les finances publiques tunisiennes s’avère très compliquée. D’ailleurs, celle-ci ne cesse d’augmenter au cours de ces dernières années, en dépit de la volonté des autorités à la réduire. Ainsi, en août dernier, celle-ci a fortement augmenté de 1.600 millions de dinars, sous l’effet des recrutements, nominations, promotions et autres gratifications.
Lire aussi : Tunisie: discussion avec les Emirats et l'Arabie saoudite pour renflouer les caisses de l'Etat
Concernant le train de vie de l’Etat, il est question de la réduction du parc automobile public qui tourne autour de 90.000 véhicules occasionnant d’énormes dépenses en carburant et les milliers de logements de fonction.
Une chose est sure, sans ces réformes, le FMI ne débloquera pas de nouveaux prêts pour le pays. «Pour la Tunisie, nous sommes très clairs quant au fait que le pays a besoin de réformes économiquement ciblées et urgentes, afin de stabiliser l’économie et mettre les finances publiques sur une nouvelle voie durable», a expliqué, le 13 octobre dernier, la directrice du FMI Kristalina Georgieva.