Quatre africains parmi les 17 pays à risque élevé de défaut de paiement, selon Fitch Ratings

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Le 06/07/2022 à 15h04, mis à jour le 06/07/2022 à 15h06

L’agence de notation Fitch Ratings fait part de l’éventualité d’une nouvelle vague de défauts de paiement à cause de la montée des risques liés aux impacts de la crise ukrainienne. Elle a dressé une liste de 17 pays en défaut de paiement ou qui risquent de l’être, dont 4 africains.

La crise Russie-Ukraine et ses impacts ont ébranlé de nombreuses économies. Certains pays, déjà vulnérables depuis quelques années à cause de crises multidimensionnelles auxquelles ils font face, sont durement touchés. Et cette situation risque d’impacter leurs capacités de remboursement de leurs dettes souveraines, avec des défauts de paiement à la clé, selon Fitch Ratings. L'agence a notamment révisé à la baisse son évaluation de la dette souveraine mondiale à la lumière de la montée des risques liés notamment à la hausse des coûts d’emprunt et l’éventualité d’une vague de défauts de paiement, en raison notamment des impacts de la crise Russie-Ukraine.

Fitch Ratings a ainsi publié une liste de 17 pays en défaut de paiement ou dont les rendements obligataires sur les marchés financiers suggèrent qu’ils risquent de l’être, un record. Quatre pays africains figurent parmi eux: l’Ethiopie, le Ghana, la Tunisie et la Zambie.

Pour la Tunisie, la crise Russie-Ukraine est venue aggraver une situation économique et financière difficile depuis plus d’une décennie. En effet, depuis le «Printemps arabe», la Tunisie traverse une crise multidimensionnelle (politique, économique, sécuritaire…) avec des conséquences graves sur l’économie nationale et les finances publiques. Une situation qui a poussé le pays à s’endetter auprès des institutions financières internationales et du marché international des capitaux.

Toutefois, l’aggravation de la crise à cause de la pandémie de Covid-19 et, plus récemment, de la crise ukrainienne a rendu la situation financière de la Tunisie plus que critique. Fitch Ratings a révisé à la baisse la note du pays de B- à CCC en mars dernier, reflétant les risques de liquidité budgétaire et externe accrus dans un contexte marqué par une impasse dans les négociations avec le Fonds monétaire international (FMI).

La seule issue possible pour le pays est l’obtention d’un nouveau prêt du FMI à même de renflouer les caisses de l’Etat et d’apporter des devises nécessaires permettant d’accroître les réserves du pays et de faciliter la sortie du pays sur le marché de la dette afin de lever de nouvelles ressources et rembourser les échéances de dette qui tombent.

Toutefois, les discussions avec l'institution de Bretton Woods prennent du temps du fait que cette dernière exige que le gouvernement tunisien s’engage réellement dans des réformes structurelles: élimination progressive des subventions, réduction du nombre pléthorique des fonctionnaires de l’Etat, gel des hausses des salaires et des recrutements dans la fonction publique, privatisation des entreprises publiques déficitaires…

Après plusieurs rounds de discussions, une équipe du FMI séjourne depuis lundi 4 juillet à Tunis pour arrondir les angles et ouvrir les portes à un nouveau prêt conséquent qui devrait tourner autour de 4 milliards de dollars. Une bouffée d’oxygène à même d’éloigner la Tunisie du défaut de paiement. Actuellement, le taux d’endettement du pays est autour de 100% du PIB, selon les estimations financières.

Outre la Tunisie, le Ghana aussi est menacé de défaut de paiement. La situation économique du pays, pourtant l’une des économies les plus dynamiques du continent, a été aggravée par la pandémie de Covid-19 et par les effets de la crise ukrainienne. Traversant une crise financière aigüe, Accra vient, une fois de plus, de solliciter un nouveau prêt du FMI, dont une équipe séjourne actuellement dans le pays. Le pays traverse une crise économique profonde avec une inflation à 27% et une dette dépassant les 80% du PIB.

L'Ethiopie traverse, quant à elle, une sécheresse aigüe et supporte les conséquences d’une guerre interne (Tigré) qui a beaucoup impacté les finances publiques, sans compter les effets de la crise sanitaire et de la guerre en Ukraine. Conséquence: la croissance économique du pays a beaucoup ralenti. Les prêteurs privés se sont inquiétés lorsqu’Addis-Abeba a demandé au G20, en début 2021, la restructuration de sa dette dans le but de «réduire les vulnérabilités de la dette et diminuer l’impact du surendettement».

Quant à la Zambie, elle fait depuis quelques années face à des difficultés pour rembourser ses créances à cause d’une crise économique aigüe et de la corruption qui gangrène ce pays minier. En novembre 2020, celui-ci était devenu le premier Etat du continent à être en défaut de paiement à cause des répercussions économiques de la pandémie de Covid-19. Le pays négocie actuellement avec le FMI et un accord devrait être conclu début septembre prochain, ouvrant la voie à un nouveau prêt de l’institution financière.

Enfin, notons qu’outre les 4 pays africains, cette liste de 17 pays comprend: l’Argentine, l’Equateur, le Belarus, le Pakistan, le Sri Lanka, le Liban, l’Ukraine, le Tadjikistan, le Salvador, le Suriname, le Belize, la Russie et le Venezuela. A quelques exceptions près, il s’agit de pays en guerre ou qui font face à des crises multidimensionnelles.

Par Moussa Diop
Le 06/07/2022 à 15h04, mis à jour le 06/07/2022 à 15h06