Le parti d'inspiration islamiste Ennahdha a aussi appelé à un dialogue national pour faire sortir le pays de ses crises: politique, sociale, économique et sanitaire.
En moins de deux jours, le président Saied a ordonné la suspension des travaux du Parlement pour un mois, limogé du chef du gouvernement Hichem Mechichi et s'est octroyé le pouvoir exécutif.
Au moment où le pays est frappé de plein fouet par une crise économique et sociale accentuée par la pandémie de Covid, ces décisions ont suscité des inquiétudes au sein de la communauté internationale, en particulier à Washington, Bruxelles et Paris.
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"L’ancrage démocratique du pays, le respect de l’Etat de droit, de la Constitution et du cadre législatif doivent être préservés tout en restant à l’écoute des volontés et aspirations du peuple tunisien", a averti mardi le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, dans un communiqué.
Au lendemain de violents affrontements entre partisans du président et opposants, Ennahdha s'est dit "prêt à la tenue d'élections législatives et présidentielle anticipées simultanées, afin de garantir la protection du processus démocratique et d'éviter que tout retard ne serve de prétexte au maintien d'un régime autocratique".
Lundi, M. Saied également chef de l'armée, a aussi limogé le ministre de la Défense, Ibrahim Bartaji, et la porte-parole du gouvernement, Hasna Ben Slimane, également ministre de la Fonction publique et ministre de la Justice par intérim.
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Ces initiatives ont été approuvées par nombreux de Tunisiens en colère contre le gouvernement notamment pour sa gestion de la crise du Covid, la Tunisie ayant l'un des taux de mortalité les plus élevés au monde. Mais d'autres ont fait part de leurs craintes d'un retour à la dictature dans la jeune démocratie, un peu plus de dix ans après le soulèvement populaire qui a mené à la chute du dictateur Zine El Abidine Ben Ali en janvier 2011.
- "Crise mal gérée" -
"Coup d'Etat ou coup d'éclat", titre mardi en une le journal francophone le Quotidien. "Le coup de pied donné par Kais Saied dans la fourmilière parlementaire a pris au dépourvu pas mal de monde à commencer par Ennahdha", ajoute-t-il.
"Faut-il craindre pour la révolution?", titre le journal La Presse dans un éditorial notant que "le spectre de l'incertitude politique et de la banqueroute conjugué aux effets d'une crise sanitaire mal gérée" dans ce pays du Maghreb de 12 millions d'habitants, a "provoqué un tremblement de terre dimanche".
Lundi, le Premier ministre tunisien, Hichem Mechichi, s'est dit prêt à céder le pouvoir au futur Premier ministre désigné par le président Kais Saied.
"J'assurerai la passation de pouvoir à la personnalité qui sera désignée par le président de la République", a-t-il déclaré.
"Le président Saied sera très prudent dans le choix du futur chef du gouvernement parce qu'il veut une personne de confiance et loyale qui adopterait la même politique que lui", souligne le politologue Slaheddine Jourchi.
"On aura un gouvernement de Saied" qui doit améliorer les conditions de vie des Tunisiens, poursuit-il.
Les problèmes profondément enracinés du chômage et de la dégradation des infrastructures publiques qui étaient à l'origine du soulèvement il y a dix ans n'ont jamais été résolus.
Les événements de ces derniers jours en Tunisie, pays souvent représenté comme le seul où a réussi le Printemps arabe, ont entraîné de multiples réactions à l'étranger.
La France a dit souhaiter un "retour, dans les meilleurs délais, à un fonctionnement normal des institutions" et appelé à éviter toute violence, tandis que les Etats-Unis, "préoccupés", ont appelé au "respect des principes démocratiques".
"Le président Saied est devant un grand défi, de montrer aux Tunisiens et au monde qu'il avait pris les bonnes décisions", dit M. Jourchi.