Algérie. Energie: quand l’abondance est synonyme d’inefficience et de gaspillage

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Le 29/08/2017 à 18h17, mis à jour le 29/08/2017 à 18h20

Avec la crise aiguë qui touche le pays à cause de la baisse des recettes, les dirigeants se rendent compte des énormes pertes dans le secteur de l’énergie. L’inefficacité au niveau de la production et le gaspillage commencent à peser lourdement sur l’économie.

Si l’Algérie fait partie des pays où l’énergie est la moins chère au monde, cela a un coût énorme que l’Etat ne pourra pas continuer à supporter. Et pour cause, ce prix bas n’est pas le fait de l’efficacité du secteur algérien des énergies, mais uniquement le résultat d’une subvention qui favorise le gaspillage.

En effet, alors que le coût de production du kilowatt/heure est de 11,43 dinars, celui-ci est vendu par l’Etat à seulement 4 dinars. Autrement dit, pour chaque kilowatt/heure consommé par un Algérien, le gouvernement supporte une subvention de 8 dinars.

Cette situation, si elle permet aux citoyens algériens de bénéficier de l’électricité à un coût bas, ce qui est légitime pour un pays disposant des ressources gazières et pétrolières importantes, il n’en demeure pas moins qu’il a des effets néfastes importants qui commencent à se faire sentir sur l’économie algérienne.

D’abord, ces subventions coûtent cher au budget de l’Etat et contribuent fortement à l’aggravation du déficit budgétaire du pays.

Ensuite, à cause de ces subventions, la Société algérienne de distribution de l’électricité et du gaz (SDC), se trouve dans une situation délicate. En effet, celle-ci accuse un déficit qui avoisine les 51 milliards de dinars algériens, soit environ 468 millions de dollars, en 2016.

Enfin, l’impact de ce coût bas de l’électricité se reflète surtout par une incitation à la consommation et à un gaspillage énorme et incontrôlé de l’énergie. Pour se faire une idée, il faut souligner que la puissance électrique installée en Algérie est de 14.000 MW en 2016, contre 13.000 MW en 2014. Toutefois, celle-ci est encore insuffisante. Et à cause du gaspillage, le pays est obligé à chaque fois d’accroitre sa production électrique pour satisfaire une demande toujours croissante.

Ainsi, de l’aveu même du ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, le pays aura besoin, en 2018, de 2.000 MW d’électricité en plus pour faire face à la demande. Ce qui nécessitera un investissement de l’ordre de 3 à 4 milliards de dollars. Une enveloppe énorme par les temps qui courent pour un pays dont les recettes en devises proviennent à hauteur de 95% des seules exportations du pétrole et gaz et dont les cours ont du mal à se redresser.

Conséquence: aujourd’hui, avec le retournement de la situation sur le marché du pétrole, auquel est corrélé également le gaz, l’Algérie fait face à un dilemme de taille. Faut-il continuer à subventionner lourdement le secteur de l’énergie électrique ou bien, faut-il atténuer celle-ci afin de réduire le déficit budgétaire?

Pour l’heure, le gouvernement n’a pas le choix. La paix sociale n’a pas de prix surtout pour un pays dirigé par des oligarques qui ont accaparé les richesses du pays, ne laissant que des miettes aux citoyens. Seulement, cela sera toujours tenable tant que l’Algérie n’aura pas besoin de se financer auprès des bailleurs de fonds, notamment le FMI dont le leitmotiv pour faire face aux déséquilibres budgétaires reste la suppression des subventions ou leur baisse.

En attendant que des mesures courageuses soient prises pour éviter ce gaspillage, le gouvernement appelle à la rationalisation de la consommation énergétique, notamment électrique. Conscient que cet appel risque de ne pas être entendu, le ministre de l’énergie, face à la gravité de la situation, menace les gros consommateurs. Ainsi, pour la facturation, ces derniers devront payer l’énergie à son «juste prix».

Par Karim Zeidane
Le 29/08/2017 à 18h17, mis à jour le 29/08/2017 à 18h20