Automobile: en manque de visibilité, Renault Production Algérie licencie la moitié de ses salariés

Une chaîne de montage de véhicules du groupe Renault.

Une chaîne de montage de véhicules du groupe Renault.. DR

Le 24/11/2020 à 14h04, mis à jour le 26/11/2020 à 13h32

La relance de la construction automobile, annoncée par le gouvernement de Abdelmadjid Tebboune tarde à se concrétiser. En arrêt depuis 9 mois et sans aucune visibilité, le leader du montage automobile en Algérie, Renault Production Algérie a donc décidé de licencier la moitié de ses salariés.

Après les multiples annonces du ministre de l’Industrie sur un nouveau départ du secteur du montage automobile, les choses ne semblent pas du tout bouger en Algérie. Pire encore, le pays est presque à l’arrêt depuis que le président Abdelmadjid Tebboune, infecté du Covid-19, a été transféré en Allemagne pour des soins.

Du coup, les opérateurs du secteur du montage automobile qui croyaient disposer plus de visibilité avec le régime actuel, après le fiasco du montage automobile par les oligarques proches de l’ancien régime Bouteflika sont dans l’expectative.

En effet, en dehors des multiples sorties du ministre de l’Industrie, Ferhat Aït Ali Braham, rien de concret n’a encore été annoncé par les autorités algériennes.

Conséquence de cette situation, Renault Production Algérie, joint-venture détenue par Renault et la SNVI, leader du montage automobile algérien, en arrêt depuis 9 mois, a décidé de licencier la moitié de ses salariés. Ainsi, après le chômage technique, en accord avec le syndicat UGTA, le constructeur a décidé de licencier 476 salariés.

A ces licenciements, s’ajoutent ceux de 200 autres employés contractuels, dont les contrats sont arrivés à terme. Ainsi, sur les 1.200 travailleurs de l’unité de Oued Tlelat, près d’Oran, seulement 500 collaborateurs sont maintenus à leur poste, mais au chômage technique, suite à l’arrêt de toute activité depuis plusieurs mois. Ils continueront à percevoir 70% de leur salaire pendant encore près d'un mois, jusqu’à la fin de 2020.

Après cette date, ces employés n’ont aucune visibilité sur l'avenir. Tout dépendra de la reprise de la production à partir du début de l’année prochaine. Et vu la situation actuelle, rien n’est sûr.

En effet, les professionnels du secteur sont toujours dans l’attente de l’approbation du nouveau cahier des charges. Un cahier des charges qui sera presque impossible à respecter par les opérateurs du secteur.

En effet, le nouveau cahier des charges exige que le taux d’intégration doit être d’au moins 30%, dès le démarrage du projet. Or, en l’absence d’un écosystème automobile avec des fournisseurs et équipementiers déjà en place, il est impossible de démarrer une unité de montage avec un tel taux d’intégration en Algérie. D’ailleurs, Ferhat Aït Ali Braham lui-même l’a finalement reconnu. «30% d’intrants locaux est un taux quasiment impossible, sauf si on construit la carrosserie localement», avait reconnu le ministre algérien de l'Industrie. 

Le secteur du montage automobile algérien est à l’arrêt depuis plus de 9 mois suite à la décision du gouvernement de revoir le modèle économique qui était en place en suspendant les importations des kits CKD/SKD (des véhicules en pièces détachées prêts à monter, en quelque sorte) destinés à l’assemblage des voitures des constructeurs étrangers: Renault, Hyundaï, Volkswagen, etc. 

In fine, si le gouvernement Tebboune avait décidé de mettre fin au fiasco du montage automobile, une chose reste sûre, il a, pour le moment porté un coup d’arrêt total au montage automobile algérien, où à ce qui en ressemblait, sans pour autant apporter une alternative.

Du coup, certains opérateurs ont décidé d’arrêter leur production jusqu’à nouvel ordre. C’est le cas de Kia Algérie qui a fermé son site de Batna en mai dernier, et Volkswagen qui a décidé de suspendre sa production en raison de la crise politique et de la pénurie de kits d’assemblage CKD/SKD.

Certains observateurs pensent que le constructeur français pourrait lui aussi suivre cette évolution si la situation ne se décante pas d’ici quelques mois, même si le marché algérien, second marché de véhicules neufs du continent derrière l’Afrique du Sud, est important pour les constructeurs.

L’autorisation d’importation de véhicules neufs par le nouveau régime, via les concessionnaires implantés dans le pays, pourrait aussi favoriser l’arrêt du projet au cas où le statu quo persisterait dans les mois à venir.

Par Karim Zeidane
Le 24/11/2020 à 14h04, mis à jour le 26/11/2020 à 13h32