Il y a deux jours, une vidéo a suscité l’indignation et le dégoût sur la Toile. On y voit des soldats algériens infliger des tortures et un traitement dégradant à des adolescents subsahariens. Même en Algérie, personne n’a supporté cette cruauté. Personne, sauf peut-être ceux qui, au sommet de l’Etat, sont indirectement responsables de ces déviances vis-à-vis des noirs. Car à longueur d’année, les Subsahariens sont chosifiés par les proches d'Abdelaziz Bouteflika.
Les pauvres «Africains» qui vivent en Algérie ou qui traversent ce territoire pour gagner l’Europe ont droit aux déclarations les plus abjectes et aux agissements les plus malsains de la part de ministres, de conseillers et de l’autorité algérienne en général.
Lire aussi : Algérie: les insanités de Ouyahia et Messahel, un message diplomatique aux pays subsahariens
Tout a commencé avec les déclarations de Ksentini, le conseiller d’Abdelaziz Bouteflika. Fin 2016, quand l’Algérie a commencé ce qu’un syndicat influent a appelé «la plus grande chasse à l’homme noir de l’histoire», Ksentini a justifié les traitements inhumains qui leur étaient infligés, en affirmant de manière stoïque: «Nous (NDLR : les Algériens) sommes exposés au risque de la propagation du sida ainsi que d’autres maladies sexuellement transmissibles à cause de la présence de ces migrants». En réalité, le conseiller de Bouteflika en matière de droits de l’homme (sic !) ne faisait que baliser le terrain pour Ahmed Ouyahia et Abdelkader Messahel.
Samedi 8 juin, Ahmed Ouyahia, actuel Premier ministre, chef de cabinet d'Abdelaziz Bouteflika et ministre d'Etat à l'époque, déclarait que les migrants sont "sources de crimes, de drogues et de plusieurs autres fléaux". L'écho de ces paroles nauséabondes n'avait pas fini de résonner aux oreilles des Subsahariens qu'Abdelkader Messahel, chef de la diplomatie algérienne, en rajoutait une couche. Il affirmait, avec l'insolence méprisante d'un membre du Ku Klux Klan, que l'Algérie "n'a de leçon à recevoir de personne" et appelait à la prise de "mesures urgentes" contre l'immigration des Subsahariens.
Lire aussi : Algérie: une ridicule théorie pour justifier les insultes racistes d'Ouyahia et Messahel
Tout ceci n‘est finalement que le reflet d’une politique d’Etat visant à se détourner d’une Afrique méprisée par l’Algérie. Alger n’a pas pu cacher sa frustration après les revers diplomatiques dont elle tient les pays subsahariens pour responsables. Les autorités algériennes ont d'abord voulu envoyer un message aux pays africains, après l’échec de leur blocage de l'adhésion du Maroc à l’Union africaine. Ensuite, elles n’ont pas supporté le changement d’attitude et de langage des Africains sur la question du Sahara marocain, qui n’est plus qualifié de territoire occupé dans le documents officiels de l’Union africaine.
Durant toute l'année, les autorités algériennes ont joint la parole à l'acte. A l'issue d'une nouvelle rafle, des milliers de subsahariens ont été jetés dans le désert. Amnesty international, Human Rights Watch ainsi que la la Ligue algérienne des droits de l'homme ont dénoncé plusieurs fois une pratique honteuse, inhumaine et contraire à toutes les conventions. Pour rendre la vie impossible aux Africains, le ministère du Transport avait même émis une circulaire prenant décision d'interdire aux "migrants illégaux" les transports publics, comme les autocars, les autobus et les taxis. Les conducteurs qui contreviennent à cette interdiction encourant le retrait pur et simple de leur licence d'exploitation. La mesure a finalement été retirée par le ministère, mais on a demandé à une wilaya de donner une directive similaire. Une manière de se dérober pour le gouvernement tout en ayant un résultat identique.