Algérie: la répression comme règle contre les opposants au 5e mandat de Bouteflika

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Le 14/08/2018 à 14h39, mis à jour le 14/08/2018 à 14h59

Le statu quo à la tête de l’Algérie est loin de faire l’unanimité au niveau de la société civile. Toutefois, les autorités n’hésitent devant rien pour museler les voix discordantes. Quelques activistes paient le prix fort de leur opposition en croupissant dans les prisons.

Le rouleau compresseur est en marche pour faire du 5e mandat du président Bouteflika une réalité. Face à l’appareil sécurito-politique et au très petit groupe de personnes très puissantes en faveur d’une réélection du président, rares sont les voix discordantes qui osent encore se manifester.

Face à cette situation, quelques militants tentent de donner de la voix en dénonçant ce projet qui vise à donner une présidence à vie à Bouteflika. C’est le cas du FFS qui n’a pas manqué de fustiger l’alternance clanique en cours de préparation. Dimanche dernier, ce sont les responsables du mouvement Mouwatana (Citoyenneté), une plate-forme lancée en juin dernier par des personnalités politiques et de la société civile, des universitaires, romanciers et journalistes, et des cadres du parti Jil Jadid qui ont manifesté leur opposition à un 5e mandat de Bouteflika et réclamé un «Etat de droit».

Seulement, les sécuritaires veillent au bon grain pour qu’aucune voix discordante ne se manifeste contre ce 5e mandat. Ainsi, la manifestation n’a duré que quelques minutes. Ceux qui ont osé exprimer une opinion politique opposée, comme c’est le cas des militants de Mouwatana et de Jil Jadid, qui ont manifesté à la place des Martyrs à Alger, ont rapidement été malmenés, embarqués dans les fourgons de la police et soumis à des interrogatoires musclés. «Les Algériens en ont ras-le-bol de ce pouvoir qui n’entend personne, mais ils ne veulent pas d’affrontement avec les forces de sécurité. Nous aussi, nous ne voulons pas d’affrontement», a expliqué le président de Jil Jadid.

La répression touche aussi les activistes des réseaux sociaux. C’est le cas notamment de Merzoug Touati qui a entamé une grève de la faim pour dénoncer ses conditions de détention.

Du coup, la répression est telle que la classe politique et les associations de défense des droits de l’Homme ont démissionné. Pour la sociologue algérienne Fatima Oussedik, «l’horizon est bouché!». A quelques exceptions près, c’est le silence et bouche cousue. Une véritable démission des politiques et de la société civile qui n’inaugure rien de bon pour l’avenir de l’Algérie.

Plus explicite, la députée et journaliste Salima Ghezali explique cette démission par l’immixtion, durant des années, de la «police politique», qui a érigé la force «comme mode de régulation des structures» politiques et sociales, créant une «situation propice à la désorientation cognitive des citoyens qu, entre le gourdin du parkingueur, le doberman du redresseur, la milice privée du général, la vénalité du magistrat, la ”chkara” des clones du Bouchi, le ”sale boulot” du commis de service, le cachet du bureaucrate-racketteur et l’ukase de l’apparatchik, ne peuvent plus trouver d’espace où faire librement société».

Bref, la classe politique et la société civile algériennes semblent se résigner face aux tenants de l’appareil politico-militaire prônant le statu quo pour garder leurs privilèges et étouffent toute contestation par la violence.

Par Karim Zeidane
Le 14/08/2018 à 14h39, mis à jour le 14/08/2018 à 14h59