Les déroutes diplomatiques algériennes se multiplient

Sabri Boukadoum, ministre algérien des Affaires étrangères.

Sabri Boukadoum, ministre algérien des Affaires étrangères.. DR

Le 15/12/2020 à 16h18, mis à jour le 15/12/2020 à 16h21

Revue de presseQue ce soit en Afrique de l'Ouest ou dans la question du Sahara marocain, qu'il s'agisse des relations avec l'Union européenne ou celles avec les pays du Golfe, la diplomatie algérienne enchaîne les déconvenues.

Jeudi 26 novembre 2020, Sabri Boukadoum se rend à Abuja avant d'assister à Niamey à un sommet de l'Organisation de la conférénce islamique. Il espérait bien redonner vie au projet mort-né du gazoduc Nigeria-Algérie, en passant par le Niger. La réponse des 15 pays de la Cédéao a été cinglante. Au lendemain de cette visite, ils ont purement et simplement convoqué une réunion à Ouagadougou pour affirmer que leur priorité était le gazoduc qui passe par l'ensemble des pays membres, puis qui se prolonge sur la Mauritanie et le Maroc.

Quand on peut faire un gazoduc pour 17 pays, pourquoi en faire un pour trois seulement? Première déconvenue pour la diplomatie algérienne, mais ce n'est assurément pas la seule. Sur tous les sujets importants qui concerne l'Afrique ou le monde, l'Algérie est systématiquement mise à l'écart et ses positions semblent de moins en moins audibles.

C'est en tout cas, l'amer constat que dresse le site d'information Algérie Part, faisant une longue liste d'échecs diplomatiques sous le régime du président Abdelmadjid Tebboune. Lui et son gouvernement "enchaînent les déroutes diplomatiques".

D'abord, il y a les critiques acerbes des voisins de la rive nord de la Méditerranée qui ne font plus de cadeau au régime algérien. En effet, ce dernier est "condamné par le parlement européen" et "critiqué par la Commission européenne". Car, faut-il le rappeler, au même moment où Sabri Boukadoum se pavanait à Abuja et à Niamey, les députés européens adoptaient une résolution condamnant les graves atteintes en matière de droits de l'Homme.

Ensuite, l'Algérie est "mise à l’index par les autorités des Emirats Arabes-Unis" et est "en froid avec plusieurs pays du Golfe". Car, faut-il le rappeler, elle figure sur la liste des pays dont les citoyens sont interdits de visa par les Emirats Arabes-Unis. Le régime a beau nier cette information, les Algériens ne peuvent plus mettre les pieds à Dubaï du fait du risque terroriste dont Dubaï craint d'être la cible depuis qu'il a normalisé ses relations avec Israël. Cette liste comprend notamment des pays comme la Turquie, Iran, Irak, la Tunisie, Pakistan, Libye, Yemen Syrie, Somalie, Kenya, Liban et Afghanistan. Pour ne pas donner plus d'échos à cette déroute diplomatique, l'Algérie n'a pas osé prendre des mesures de réciprocités, à l'exemple du Pakistan et de l'Iran.

Il y a également le dossier libyen dans lequel l'Algérie a toujours rêvé de jouer un grand rôle. Mais, malheureusement, elle est "minorée et rejetée des processus de discussion en Libye". Les Libyens font la navette entre Tanger, au nord du Maroc, le Caire en Egypte, Tunis en Tunisie et Bouznika, encore dans le royaume chérifien. Survolant Alger à chaque fois, ils font un pied de nez à la diplomatie de Tebboune et Boukadoum. Et même pour la résolution du conflit malien, le processus de l'accord d'Alger signé en 2015 est mis en veilleuse depuis l'avènement de ce nouveau régime.

Mais le sommum de l'isolement algérien sur la scène internationale est le dernier développement dans le dossier du Sahara marocain. "Le coup de grâce fut la reconnaissance américaine de la souveraineté du Maroc sur le Sahara et le soutien plus qu’absolu de l’administration Turmp aux positions marocaines", écrit la même source.

Et d'ajouter: "L’Algérie a été désapprouvée par la première puissance mondiale et l’arrivée prochaine de l’équipe démocrate de Joe Biden à la Maison blanche, réputé pour sa proximité avec les lobbys pro-marocains, ne manquera pas de compliquer encore davantage la situation à l’Algérie".

C'est sans parler de l'Union africaine où l'Algérie veut tout faire pour que le dossier du Sahara marocain soit pris en main par l'organisation continentale, alors que cette dernière lui oppose un niet constant et ferme. Car, pensent les dirigeants africains, c'est à l'ONU de trancher et de faire en sorte qu'une solution réaliste puisse être trouvée.

En réalité, les échecs de l'Algérie en matière de diplomatie ne datent pas d'aujourd'hui et seront de plus en plus nombreux. Quand le Maroc a fait le pari d'établir des relations saines avec le reste du continent en poussant notamment ses entreprises à investir largement pour le développement de pays comme le Sénégal, le Mali, la Côte d'Ivoire, la RDC Congo, le Cameroun, le Rwanda, Madagascar, pour ne citer que ceux-là, les généraux algériens ont tout fait pour lâcher les terroristes issus de leur pays dans la bande sahélienne, déstabilisant des pays. De plus, la diplomatie du chèque si chère à Alger n'est plus payante, depuis que les pays du continent ont d'autres aspirations et que le baril du pétrole s'est également effondré.

Par Djamel Boutebour
Le 15/12/2020 à 16h18, mis à jour le 15/12/2020 à 16h21