Samedi, à 16h, soit deux heures avant la fermeture officielle des bureaux de vote, le taux de participation à l'échelle nationale n'était que de 14,47%. Un véritable camoufflet pour le régime qui sait que le principal enjeu de ces consultations demeure la mobilisation. Mais face à cette victoire patente du boycott, le régime allait sortir de son chapeau des chiffres irréalistes quelques heures plus tard.
En Kabyllie, région connue pour être rebelle, la particpation a été été presque nulle et des échauffourées ont même été enregistrées. La quasi totalité des bureaux de vote ont fermé à Béjaïa et Tizi Ouzou, les villes les plus peuplées de la région berbérophone, selon la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme et le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).
Lire aussi : Législatives en Algérie: éditoriaux vitriolés de la presse belge sur "une façade démocratique"
Des échauffourées ont éclaté dans plusieurs communes kabyles, avec saccage des urnes, et les forces de l'ordre ont procédé à des dizaines d'interpellations, selon la LADDH et le CNLD.
Des images de bulletins de vote jonchant les rues en Kabylie ont circulé sur les réseaux sociaux.
Du coup, il fallait trouver une parade, en deux actes, pour éviter une troisième humiliation après celle de novembre dernier, lors du référendum constitutionnel et de décembre 2019 durant la présidentielle où Tebboune a été imposé par Ahmed Gaïd Salah, le chef d'Etat-major de l'Armée d'alors.
Acte premier: le régime décide de repousser l'heure de fermeture des bureaux de vote à 19h, soit une heure supplémentaire de vote. Mais cela n'y changera visiblement rien, puisque les Algériens ne répondront pas à ce dernier appel du système qui cherche à se légitimer. Cette tentative ayant échoué, les autorités passent à un deuxième.
Acte second: au lieu de proclamer les chiffres de la participation à 21%, lors de sa conférence de presse, Mohamed Charfi, le président de l'Agence nationale indépendante des élections (ANIE), attendra 23h pour annoncer 30,20%. C'est le plus faible taux de participation depuis des décennies, même sous l'ère du très impopulaire Boutefikla, plus 35% des inscrits participaient aux élections.
Lire aussi : Algérie: coup de filet sécuritaire à la veille des législatives
Des sources au sein même de l'ANIE ont révélé au site d'information Algérie Part que le taux de particiation réel n'était que de 21%, soit encore moins que les 23,7% du référendum de novembre 2020. Il a donc fallu gonfler les chiffres nuitamment pour déclamer près de 10 points supplémentaires de pourcentage de participation.
Evidemment, pour le régime algérien, ces élections ne sont que pour afficher une démocratie de façade, car tout est déjà décidé d'avance par les officiers de l'armée et les affidés du pouvoir civil. Peu importe si 79% des Algériens ont refusé d'aller aux urnes pour choisir des députés dont la candidature a eu l'onction du régime militaro-civil, Abdelmadjid Tebboune, le président de la République, et Said Chengriha, l'actuel chef d'état-major de l'armée, ne reculeront pas devant le rejet manifeste du système par le peuple.
D'ailleurs, Tebboune l'avait clairement dit: "Pour moi, le taux de participation n'a pas d'importance. Ce qui m'importe, c'est que ceux pour lesquels le peuple vote aient une légitimité suffisante".
De toutes les manières, le régime n'hésitera pas à réprimer ceux qui refusent d'entrer dans les rangs. Quelque 222 personnes sont actuellement incarcéréés pour leurs opinions ou pour avoir pris part au Hirak. Mette quelques centaines de protestatires supplémentaires pour faire taire les miilions d'Algériens ne dérangera ni Tebboune, ni Chengriha.