Cameroun: bataille autour du conteneur du port de Douala entre la France et la Suisse

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Le 03/11/2019 à 12h32, mis à jour le 03/11/2019 à 13h25

Au lendemain de la décision de suspendre les travaux de finalisation du contrat de concession avec la société suisse TIL désignée pour remplacer Bolloré, l’ambassadeur de Suisse a rencontré le président Biya. Côté français, on dément toute intervention au profit du groupe français.

Ce début de semaine, le président de la République, Paul Biya, a reçu en audience, l'ambassadeur de la Suisse au Cameroun, Pietro Lazzeri. Celui-ci a notamment remis au chef de l’État, un pli fermé du président de la Confédération suisse, Ueli Maurer. Par ailleurs, le diplomate, au sortir de cette entrevue, a confié avoir discuté des relations bilatérales, de la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, du «grand dialogue national» et des questions économiques. Ce dernier point a retenu l'attention de nombreux observateurs.

«Le diplomate helvétique a relevé l’implication des entreprises suisses dans le développement du Cameroun et évoqué la concession du terminal à conteneurs du port autonome de Douala au profit d’une entreprise de droit suisse», indique le site de la présidence de la République.

L'entreprise en question, Mediterranean Shipping Company (MSC), investit, gère et développe des terminaux à conteneurs dans le monde entier.

A travers sa filiale Terminal Investment Limited (TIL), elle a été désignée par le Port autonome de Douala (PAD), adjudicatrice provisoire de la procédure de sélection d'un nouvel opérateur pour la modernisation, l'exploitation et la maintenance du terminal à conteneurs du port de Douala, dans la métropole économique du pays, en remplacement de Douala International Terminal (DIT), filiale du groupe français Bolloré.

Intervention

L'audience du diplomate suisse intervient quelques jours après la décision de suspendre les travaux de finalisation des termes du contrat de concession avec la société TIL, «en attendant les conclusions définitives de l'affaire Société APM Terminals BV et Bollore SA contre Port autonome de Douala.

Cette affaire est toujours pendante au tribunal administratif du Littoral à Douala et portant sur la requête aux fins de sursis à l'exécution de la décision n°0006219/DG/PAD du 8 janvier 2019», peut-on lire dans un courrier du secrétaire général de la présidence de la République au directeur général du PAD, courrier qui a fuité sur les réseaux sociaux.

Une décision qui, elle-même, coïncidait avec la visite au Cameroun, du ministre français des Affaires étrangères, Jean Yves Le Drian. Il n'en fallait pas plus pour que certains médias évoquent une possible intervention de la France pour remettre en selle le groupe Bolloré dans ce dossier. Ce que dément l'ambassadeur de France au Cameroun, Christophe Guilhou.

«On a un agenda qui dépasse le cadre de l'affaire Bolloré qui, je le rappelle, est une affaire judiciaire traitée par la justice camerounaise et sur laquelle je ne ferai aucun commentaire. L'ambassade de France défend les intérêts des entreprises françaises au Cameroun.

Nous sommes dans une économie ouverte, un système capitaliste où la concurrence doit s'exercer tout le temps», déclare le diplomate français lors d'une interview diffusée le 29 octobre dernier sur la chaîne de télévision privée camerounaises Canal 2 international.

«C'est aux Camerounais de décider en fonction de vos propres paramètres, de l'entreprise qui devra ou non reprendre la concession du port de Douala (…) comme pour tout autre investissement. Nous n'avons pas à entrer là-dedans», ajoute-t-il. Le port de Douala est l'une des principales infrastructures portuaires de l'Afrique centrale.

En attendant la montée en puissance du port en eau profonde de Kribi, dans le sud du pays, plus de 90% du trafic portuaire du Cameroun passent par celui de Douala, où transitent les marchandises des pays de l'hinterland comme le Tchad et la République centrafricaine (RCA). En 2018, près de 200.000 conteneurs ont été débarqués et plus de 182.000 conteneurs embarqués de son terminal à conteneurs.

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 03/11/2019 à 12h32, mis à jour le 03/11/2019 à 13h25