Ethiopian Airlines, l'une des rares compagnies dans le monde sauvées du Covid-19

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Le 29/09/2020 à 10h11, mis à jour le 29/09/2020 à 18h03

La compagnie aérienne Ethiopian Airlines a perdu plus d'un milliard de dollars de recettes en raison de la pandémie de Covid-19 mais a su se maintenir à flot en développant son activité fret aérien, a expliqué le PDG de la compagnie Tewolde Gebremariam dans un récent entretien à l'AFP.

Dès le mois de mars, la première compagnie aérienne du continent s'est adaptée pour répondre à une demande en forte hausse sur le fret aérien, lui permettant d'amortir le choc de la pandémie, qui a vu le trafic passager chuter de 90% dans le monde.

"Nous avons été très rapides, très flexibles et agiles pour déplacer nos forces et nos ressources sur le fret", explique M. Tewolde, qui rappelle qu'en temps normal, une bonne partie du fret aérien est assuré par les vols commerciaux.

"Je dirais que ces interventions ont sauvé la compagnie", ajoute celui qui dirige le groupe depuis près de 10 ans.

Pour ce faire, Ethiopian a fait preuve d'inventivité: en plus de transformer 25 appareils en avions cargo, en les vidant de leurs sièges, elle a mobilisé 20 autres appareils dont elle a gardé les sièges, utilisant les ceintures pour sécuriser les colis.

De sources diplomatiques, le Premier ministre Abiy Ahmed n'a pas hésité non plus à promouvoir les services de fret de la compagnie nationale lors de ses entretiens téléphoniques avec des dirigeants étrangers.

"Ethiopian a pu réagir avec plus d'agilité que d'autres compagnies car elle a toujours été gérée comme un business. L’État joue un rôle significatif mais il y a très peu d'interférences étatiques dans la manière dont la société est gérée", décrypte Chiedza Madzima, responsable des risques opérationnels pour le cabinet d'études Fitch Solutions.

- Discussions sur SAA -

Ethiopian a aussi bénéficié de la décision des Nations unies en avril d'ouvrir un hub humanitaire à Addis Abeba.

A ce jour, elle a opéré 360 vols cargo transportant des équipements de protection contre le Covid dans plus de 80 pays, selon son PDG.

Pour M. Tewolde, l’activité fret aérien devrait rester soutenue, car "les vols commerciaux que nous utilisions pour transporter des marchandises dans les soutes ne sont pas en service actuellement".

La compagnie prévoit également de mettre à disposition "au moins 40 appareils", pour distribuer dans le monde entier le vaccin contre le Covid-19, quand celui-ci sera prêt.

Jusqu'à présent, l'opérateur éthiopien n'a pas demandé à être renfloué, n'a pas licencié de personnel engagé à plein temps et n'a pas sollicité de report de paiement de ses créances, assure M. Tewolde.

La compagnie a déjà annoncé un "profit" de 44 millions de dollars pour le premier semestre 2020, sans toutefois donner plus de précisions, les comptes n'ayant pas encore été audités.

Le lent redressement du trafic passager - le nombre total de vols correspond actuellement à 50% des niveaux de 2019 - signifie que la compagnie demeure en "mode survie", selon son numéro 1.

Ethiopian étudie même les possibilités de renforcer ses liens avec d'autres compagnies africaines, notamment la moribonde South African Airways (SAA).

"C'est une période opportune pour soutenir d'autres compagnies dans le sens où nous sommes en meilleure position", explique diplomatiquement le PDG.

"Certains d'entre nous vont survivre, pour d'autres ce ne sera pas forcément le cas. Certains auront besoin d'aides étatiques, si elles sont disponibles, d'autres devront peut-être se restructurer ou réduire la voilure", estime M. Tewolde.

Ethiopian participe aux discussions sur l'avenir de la compagnie sud-africaine, qui survit depuis des années grâce aux aides de l’État.

M. Tewolde explique avoir clairement indiqué aux autorités sud-africaines que sa compagnie n'était "pas intéressée" par une entrée dans le capital ou une aide pour éponger la dette de SAA.

"Nous leur avons dit que nous pouvions fournir une expertise de gestion, technique, sur la flotte et que nous pouvions travailler sur une collaboration commerciale pour redémarrer South African Airways".

Ethiopian détient déjà des parts dans la compagnie du Malawi, Malawian Airlines, et dans ASKY Airlines, une compagnie régionale qui dessert principalement l'Afrique de l'ouest et centrale.

Elle possède également 45% de la nouvelle Zambia Airways qui, selon M. Tewolde, devrait être lancée "soit en octobre, soit en novembre".

Actuellement, les compagnies africaines n'assurent que 20% des vols à destination ou au départ de l'Afrique, déplore le PDG.

"Nous avons pour objectif d'inverser cette part de marché, à savoir que les compagnies aériennes africaines (...) devraient prendre au moins 50%" du marché, ambitionne M. Tewolde.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 29/09/2020 à 10h11, mis à jour le 29/09/2020 à 18h03