Pour de nombreux observateurs, la crise sanitaire et le conflit Russie-Ukraine devraient constituer des déclics pour une plus grande sécurité alimentaire des pays africains très dépendants des importations alimentaires alors qu’ils ont toutes les ressources pour même contribuer à nourrir le monde.
A ce titre, et afin d’atténuer les effets de la crise ukrainienne sur leurs économies, certains pays africains semblent décidés cette fois-ci à investir dans le secteur agricole vivrier. C’est le cas du Ghana qui fait face à une inflation galopante de plus de 23% depuis le début de l’année à cause surtout de la flambée des prix des produits alimentaires. Les autorités du pays essayent désormais de trouver des solutions durables pour faire face aux pénuries et à l’inflation des produits alimentaires.
Lire aussi : Impactée par la crise Russie-Ukraine, l'Afrique ne devra son salut qu'à des solutions africaines
Parmi les mesures préconisées, il y en a deux qui devraient impacter positivement le secteur agricole. D’abord, face à la faiblesse des financements agricoles par les banques, les autorités se penchent sur des mesures coercitives devant obliger celles-ci à affecter 20% de leurs crédits à l’économie au secteur agricole. Et pour matérialiser cela, selon le ministre de l’Alimentation et de l’agriculture du Ghana, Owusu Afriyie Akoto, le gouvernement compte formuler un projet de loi.
Le choix de ce taux n’est pas fortuit, car il correspond à la valeur ajoutée du secteur à l’économie ghanéenne. En effet, l’agriculture représente 20% du PIB du Ghana. Toutefois, le secteur ne reçoit actuellement que 5% des prêts accordés par le secteur bancaire. Et ces crédits sont globalement orientés vers l’agriculture dédiée à l’export, notamment le cacao, l’huile de palme et l’hévéa qui représentent 7% des terres sous culture, notamment les grandes fermes. Les petits agriculteurs, qui exploitent les petites fermes familiales, sont globalement délaissés par le secteur bancaire.
Lire aussi : Crise en Ukraine, sécheresse et inflation: un cocktail explosif pour une crise alimentaire inévitable en Afrique
Avec l’obligation d'augmenter à 20% la part de ses prêts à l’agriculture, les autorités souhaitent pousser le secteur bancaire à s’impliquer davantage dans le financement de l’économie du pays. Ce qui permettra aux agriculteurs de pouvoir mécaniser leur agriculture et d’acheter des engrais pour booster la productivité de leurs cultures.
Mais la tâche ne s'annonce aisée. Akoto souligne que certains pays ont adopté cette méthode forte pour doper leur agriculture. C’est le cas de l’Inde qui a obligé ses banques à consacrer un pourcentage de leurs prêts totaux aux agriculteurs pour contribuer à la révolution verte du pays. Et les résultats sont satisfaisants. Malgré plus de 1,4 milliard de consommateurs, l’Inde ne connait pas de crise alimentaire. Le pays est même devenu un exportateur de blé.
Lire aussi : Niger: produits et innovations au Salon de l’agriculture, de l’hydraulique, de l’environnement et de l’élevage
Outre le volet crédit, les autorités ghanéennes ont aussi mis l’accent sur les engrais. Et face à l’envolée des prix de ces produits au niveau mondial, les autorités ont décidé d’encourager la production d’engrais organiques comme alternative. Il faut dire que la flambée des cours des engrais est si forte que de nombreux agriculteurs ne peuvent plus s’approvisionner, au risque d’accroître considérablement leurs coûts de production. En effet, avant la crise, le Ghana dépendait des engrais importés de Russie pour 40% de ses besoins. Et pour produire ces engrais organiques, le gouvernement compte sur l’implication des acteurs nationaux. Parmi eux figurent en bonne place Integrated Recycling and Compost Plant Ltd (IRECoP), une entreprise qui s’est même développée au niveau de la sous-région ouest-africaine.
Lire aussi : Le Rwanda va lancer un fonds de soutien de 350 millions de dollars à l'agriculture
Toutefois, conscient que le Ghana seul ne peut trouver une solution à cette dépendance aux engrais importés, les autorités du pays exhortent les gouvernements des pays de Communauté des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) à envisager de subventionner les engrais organiques afin d’encourager leur production et pousser les agriculteurs de la région à augmenter la production de produits agricoles biologiques.