Cameroun: les séparatistes anglophones perturbent le scrutin présidentielle

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Le 07/10/2018 à 13h17

Les séparatistes des zones anglophones du Cameroun ont mis à exécution leurs menaces de perturber dimanche l'élection présidentielle dont le président Paul Biya, 85 ans, est le favori face à sept candidats.

Trois hommes armés, séparatistes présumés, qui tiraient sur des passants à Bamenda, dans la région anglophone du Nord-Ouest, ont été abattus après avoir été traqués par les forces de sécurité.

Dans la nuit de samedi à dimanche, dans cette même ville de Bamenda, un tribunal a été incendié par "des hommes armés", selon des témoins.

A Buea, dans le Sud-Ouest, l'autre région anglophone du Cameroun, des coups de feu ont été entendus à la mi-journée par des journalistes de l'AFP. Ils ciblaient une voiture du quotidien gouvernemental Cameroon Tribune et celle du sous-préfet, mais n'ont pas fait de blessés.

Les séparatistes des régions anglophones du Cameroun avaient menacé d'empêcher le bon déroulement du scrutin présidentiel dans ces régions où ils veulent créer leur Etat indépendant qu'il appellent "l'Ambazonie".

"Ce n'est pas impossible qu'il y ait des fauteurs de troubles" dans les régions anglophones, a déclaré à Yaoundé le ministre de la Communcation, Issa Bakary Tchiroma à des journalistes,. "Mais je peux vous assurer que la large majorité des habitants sont prêts et veulent voter", a-t-il ajouté.

"A l'heure actuelle tout se passe pour le mieux" dans les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest, a-t-il affirmé.

Costume bleu, robe jaune

Tchiroma s'exprimait devant le bureau de vote où, quelques instants après et sous un grand ciel bleu, le président Biya, au pouvoir depuis 1982 et qui brigue un 7ème mandat consécutif, a voté à 12H00 locales (11H00 GMT).

Vêtu d'un costume bleu marine et accompagné de son épouse Chantal qui portait une robe jaune vif, il s'est réjoui du climat "de sérénité" dans lequel s'est déroulée la campagne et a espéré que le "peuple camerounais continue à (lui) faire confiance".

Dans ce même bureau de vote, Ulrich, 26 ans, agent de sécurité, a déclaré être "venu choisir celui qui pourra préserver la paix dans ce pays".

A Buea, la distribution du matériel électoral avant l'ouverture des bureaux s'est faite sous haute protection de l'armée. Les bureaux étaient ouverts, mais en partie désertés, selon des journalistes de l'AFP La ville est quadrillée par les militaires et les policiers, massivement présents.

La guerre s'est installée dans les régions anglophones depuis fin 2017, après plus d'un an de crise socio-politique qui a lentement dégénéré en conflit armé.

Des centaines de séparatistes armés, regroupés en groupes épars dans la forêt équatoriale, combattent désormais violemment et quotidiennement l'armée camerounaise.

Boko Haram dans le nord

Ils avaient promis la "guerre" le jour de la présidentielle de dimanche, menaçant de s'en prendre aux électeurs qui iraient voter.

Dans la région de l'Extrême-Nord, l'armée est également déployée pour combattre les jihadistes de Boko Haram qui lancent des assauts répétés depuis 2014 sur les populations camerounaises.

Quelque 6,5 millions d'électeurs - sur 25 millions d'habitants - sont appelés à voter jusqu'à 18H00 (17H00 GMT) et auront à choisir entre huit candidats. Les résultats définitifs ne seront pas pas publiés avant au moins une semaine.

Parmi les huit candidats en lice, le président Biya qui, invisible physiquement durant la campagne hormis un meeting dans l'Extrême-Nord, a été omniprésent dans les débats et sur les affiches collées par milliers partout dans le pays.

Juste avant le vote et pour la première fois depuis la présidentielle de 1992, deux opposants de poids se sont alliés contre lui.

Akere Muna, ancien bâtonnier du Cameroun, s'est désisté en faveur de Maurice Kamto, candidat majeur de l'opposition, ancien ministre délégué à la Justice (2004-2011) et transfuge du parti au pouvoir.

Elecam, l'organe qui organise l'élection, a cependant refusé que les bulletins portant le nom de Muna soient retirés, estimant que le retrait de sa candidature avait été trop tardif et n'était pas prévu par la loi.

Deux autres candidats sortent du lot et peuvent espérer un score significatif: Joshua Osih, candidat du Social democratic front (SDF, principal parti d'opposition) malgré une campagne timorée, et Cabral Libii, benjamin de l'élection à 38 ans, qui a fortement mobilisé dans ses meetings.

Dans le conflit en zone anglophone, plus de 175 membres des forces de défense et sécurité camerounaises ont été tués ainsi que plus de 400 civils, selon les ONG. Aucun bilan n'est disponible du côté séparatiste.

La tenue du scrutin paraît très incertaine dans ces régions où plus de 300.000 personnes ont dû fuir leur domicile.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 07/10/2018 à 13h17