Vidéo. Egypte: en visite au Canada, une ministre menace de mort les opposants à l'étranger

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Le 26/07/2019 à 18h32, mis à jour le 26/07/2019 à 18h51

VidéoLa ministre égyptienne de l'Immigration et des expatriés, Nabila Makram, a affirmé, lors d'une visite à Mississauga, dans l'Ontario, au Canada, que quiconque parlerait contre l'Egypte à partir de l'étranger sera puni. Ses propos sont à l'origine d'une vive polémique dont elle cherche à s'extirper.

Une vidéo montrant Nabila Makram faisant cette malheureuse déclaration a fuité. Le pire c'est qu'elle mimait une décapitation en passant son index sur son cou, au moment précis où elle tenait ses propos.

Un geste qui ne laisse aucune place au doute quant à ce qu'elle entendait par le terme punir. "Nous avons un seul pays: l'Egypte...et nous ne pouvons pas tolérer un seul propos déplacé venant de l'étranger", avait-elle poursuivi. 

L'audience a purement a simplement ri à ses propos tout en applaudissant.

Cet accueil plutôt cordial, sur des propos aussi malvenus, a sans doute laissé la ministre penser que son écart de langage n'allait pas sortir de la salle.

Elle ne s'attendait pas que dimanche dernier, une vidéo allait être diffusée. 

La vidéo est devenue virale après que le journaliste Mohamed Nasr en ait posté une copie sur Twitter.

Selon Nasr, il tient cet enregistrement d'une source anonyme. 

Certains Egyptiens résidant au Canada n'ont pas apprécié cette sortie plutôt incongrue de Nabila Makram.

Ils ont dénoncé les nombreuses violations des droits de l'homme du régime, notamment contre les dissidents politiques, dont plusieurs vivent actuellement en exil à l'étranger, selon Mohamed Kamel, co-fondateur de la Coalition égypto-canadienne pour la démocratie, un groupe d'opposants radicaux à la politique du président Abdelfattah Al-Sissi. 

"Nous considérons qu'il s'agit d'une menace directe", a-t-il dit.

"Nous comprenons que ses propos visent directement tous les Egyptiens à travers le monde". 

L'ONG américaine de défense des droits humains Human Rights Watch estime à près de 60.000 le nombre de personnes détenues pour leurs convictions politiques en Egypte, depuis que Al-Sissi est arrivé au pouvoir en 2013. 

Nabila Makram était invitée par Sherif Sabawy, un membre du parlement de l'Ontario, au Canada, pour assister à une cérémonie de lever de drapeau au Queen's Park de Toronto le 22 juillet dernier.

Durant son séjour au Canada, elle s'est exprimée devant plusieurs groupes d'Egyptiens établis au Canada. 

Interrogée sur la teneur de ses propos, Makram a affirmé que ses propos était sortis de leur contexte et ne choquaient que ceux qui ne sont pas habitués à la manière de s'exprimer des Egyptiens.

"Je voudrais clarifier que mes propos ne visent personne en particulier, aucun dissident, ni opposant, ni critique comme cela a été rapporté dans certains médias", a-t-elle écrit sur sa page Facebook. 

"Malheureusement, certains médias n'ont pas seulement mal interprété mes propos, mais ils les ont également rapportés de manière tronquée à leurs lecteurs". 

Dans une interview à la chaîne Mehwar TV, juste après avoir assisté à l'événement de Mississauga, la ministre égyptienne avait pourtant tenu des propos sur un ton très martial.

"Je voudrais dire au correspondant d'Al Jazeera au Canada, Mohamed Nasr, que l'Egypte triomphera toujours". 

Pourtant, Mohamed Nasr, le premier à avoir posté cette vidéo entre-temps devenue virale, ne travaille pas pour la chaîne qatarie comme le laisse entendre la ministre égyptienne.

Ce dernier a affirmé dans une interview à la châine CNBC, "qu'il était hors de question de prendre les propos de la ministre pour une simple plaisanterie".

"Parce [qu'il s'agit d'une] responsable et ce qu'elle dit ne reflète que la situation dans son pays où une centaine de journalistes sont actuellement en prison". 

"Ce qui est arrivé s'est produit en terre canadienne, et le gouvernement canadien devrait montrer que ceci n'est pas correct et qu'il n'accepte pas de telles menaces adressées à des citoyens canadiens", a-t-il expliqué. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 26/07/2019 à 18h32, mis à jour le 26/07/2019 à 18h51