En géopolitique, toutes les occasions sont bonnes pour consolider ses positions. Ainsi, la pandémie du coronavirus est l’occasion pour certains pays, dont ceux des Brics -organisation regroupant cinq grands pays émergents, que sont le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud- de renforcer leur position auprès de pays en développement, tout particulièrement en Afrique.
Un repositionnement qui intervient au moment où les intérêts nationaux reprennent le dessus sur le multilatéralisme, en ce qui concerne l’accès aux vaccins anti-Covid-19.
Ainsi, et face à des pays occidentaux qui ont tendance à se replier sur eux-mêmes, trois géants des Brics -la Chine, la Russie et l'Inde-, et surtout la Chine, tissent encore un peu plus leur toile en Afrique, en jouant à fond sur la diplomatie sanitaire.
Ainsi, depuis le déclenchement des campagnes de vaccination dans le monde, dès décembre 2020, à aujourd’hui, les seuls vaccins qui arrivent sur le continent africain viennent de trois pays des Brics: la Chine, l’Inde et la Russie.
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Aucun pays occidental n’a encore délivré, à ce jour, des vaccins au continent, malgré les déclarations de bonnes intentions délivrées aux médias par leurs dirigeants.
Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et les laboratoires européens réservent, pour le moment, leurs vaccins à leurs pays et zones d’influences. Mais à ce jeu, c’est encore une fois la Chine et l’Inde qui s’en sortent le mieux, en comblant grandement le vide que laissent les pays occidentaux.
La Chine: au nom de la solidarité et de l’amitié Chine-Afrique
La Chine, devenue le premier partenaire économique de l’Afrique grâce à l’explosion de ses échanges commerciaux, ses investissements directs et à ses financements, s’était engagée dès le départ à fournir des pays du continent en vaccins, et ce, avant même sa fabrication.
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Ainsi, après octroyé des aides médicales à 53 pays africains, via son gouvernement, ses entreprises et ses philanthropes, la seconde puissance économique mondiale a, dès l’année dernière, annoncé la couleur en organisant un Sommet extraordinaire Chine-Afrique sur la solidarité contre le Covid-19, qui s’est tenu le mercredi 17 juin 2020. Lors de cet important sommet, le président chinois Xi Jinping s’était engagé sur le fait que les pays africains seront «parmi les premiers» à bénéficier des vaccins chinois.
Une promesse qui a été réitérée par Wang Wenbin, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, qui a expliqué que l’Empire du Milieu comptait faire des vaccins développés par la Chine des biens publics mondiaux.
Ainsi, la Chine a décidé d’accorder des dons en vaccins à 21 pays africains. Le Zimbabwe a ainsi reçu 200 000 doses, la Guinée Equatoriale, 100 000 doses, et l’Algérie, 200.000 doses.
Cette politique menée par la Chine en ce qui concerne ses vaccins va certainement consolider sa position avec les pays du continent. Selon ce même responsable chinois, cette aide est une manifestation de l’amitié Chine-Afrique.
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«La Chine est, de fait, un pays qui croit fermement que la solidarité et la coopération constituent les armes les plus puissantes contre le virus. Elle a, par conséquent, assumé ses responsabilités en tant que grande puissance et s’est battue aux côtés des pays africains contre cette menace commune à l’humanité», écrit l’agence chinoise Xinhua, ajoutant que «malgré les efforts de pays comme la Chine, il existe toujours une énorme disparité dans la distribution mondiale des vaccins, car certains pays riches les accumulent».
Parallèlement à cette politique d’aide gouvernementale à un accès aux vaccins pour les pays africains, Pékin a aussi encouragé les laboratoires chinois à exporter les vaccins contre le Covid-19 vers des pays africains qui ont des besoins urgents, et qui reconnaissent et autorisent l’utilisation des vaccins chinois.
A ce titre, le Maroc a déjà acheté 2 millions de doses du vaccin développé par le laboratoire pharmaceutique Sinopharm, et le Sénégal a, quant à lui, acquis 200.000 doses de vaccins de ce même laboratoire chinois, pour 2,2 milliards de francs CFA, soit 3,35 millions d’euros. Plusieurs autres pays ont lancé des commandes auprès des laboratoires chinois ayant développé un vaccin anti-Covid-19.
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A cela, il faut ajouter l’engagement de la Chine à livrer des vaccins anti-Covid-19 au programme Covax, initié par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Alliance pour les vaccins (Gavi).
Une chose est sûre, avec le Covid-19 qui a fait son apparition en Chine avant de toucher la planète entière, l’Empire du Milieu s’apprête à conforter sa position de partenaire privilégié de nombreux pays du continent, grâce à la politique menée sur ses vaccins.
Ainsi, avec le Covid-19, «la diplomatie sanitaire chinoise», initiée au début des années soixante, qui s’était renforcée lors de la crise d’Ebola, connaît une nouvelle impulsion, qui viendra renforcer la coopération économique entre la Chine et l’Afrique.
L’Inde: premier fournisseur de vaccins anti-Covid-19 au continent
Le premier pays des Brics qui a envoyé des vaccins en Afrique est l’Inde, via son laboratoire Serum Institute of India (SII), l’un des plus grands fabricants de vaccins au monde, qui fabrique le Covishield, vaccin anti-Covid-19, sous licence d’AstraZeneca.
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Ce sont les îles Seychelles, l’île Maurice et le Maroc qui ont été les premiers bénéficiaires de ce vaccins développé par le laboratoire britannico-suédois AstraZeneca, en partenariat avec l’université d’Oxford. Produit à Bombay par SII, le Covishield a ainsi été réceptionné par les Seychelles et Maurice, deux dons de l’Inde, respectivement de 50.000 et 100 000 doses.
Le second pays le plus peuplé au monde entretient en effet des relations culturelles et économiques historiques avec ces deux pays insulaires, grâce à la présence d’importantes diasporas d’origine indienne qui y vivent.
Cette situation a beaucoup contribué à faire figurer Maurice et les Seychelles aux côté de l’Afrique du Sud, dans la liste des premiers pays qui devaient bénéficier de vaccins anti-Covid-19 fabriqués en Inde.
Toutefois, l’Afrique du Sud a fini par perdre sa place au détriment du Maroc, qui a bénéficié des premiers lots achetés du Covishield d’AstraZeneca-Oxford auprès du fabricant indien.
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Le Serum Institute of India a ainsi livré au Maroc, à aujourd’hui, près de 6 millions de doses, l’Afrique du Sud ayant tergiversé sur le prix du vaccin, qu’elle a jugé étant 2,5 fois plus cher que le prix payé par les pays européens.
En plus du fait que le Maroc a accepté de payer ses vaccins au prix coûtant, afin de sauver des vies humaines et de relancer son économie, il faut aussi souligner que Rabat et New Delhi entretiennent des relations privilégiées,, tout particulièrement en ce qui concerne l’approvisionnement de l’Inde en phosphates et en engrais, un produit essentiel pour l’Inde, et ses 1,4 milliard d’habitants à nourrir, par une agriculture fortement dépendante des engrais.
L’Inde, qui avait obtenu une licence pour fabriquer le vaccin développé par le laboratoire anglo-suédois AstraZeneca, est aujourd’hui courtisé par l’ensemble des pays africains qui souhaitent acquérir le Covishield. En plus du Maroc, l’Afrique du Sud a reçu, elle aussi, 1 million de vaccin du Serum Institute of India, et plusieurs autres pays du continent se sont positionnés auprès de ce fabricant de Bombay.
La Russie: 300 millions de vaccins à la disposition de l’Afrique
Après avoir délaissé le continent au cours de ces dernières décennies, la Russie marque son retour en fanfare en Afrique, au cours de ces toutes dernières années, en misant sur le commerce, les investissements et les livraisons d’armes.
Tout comme la Chine et l’Inde, la Russie compte elle aussi jouer sa partition dans l’approvisionnement du continent en vaccins.
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Moscou vient ainsi de faire une offre de 300 millions de doses de son vaccin Sputnik-V aux pays africains, via Afreximbank, la banque panafricaine d’import-export, à laquelle un objectif a été fixé: aider les pays du continent à acquérir des vaccins. Une ligne de financement de 2 milliards de dollars pour garantir les paiements des commandes effectués par les pays africains a donc été, dans la foulée, instaurée.
L’annonce a été faite par l’Equipe de travail africaine sur l’acquisition de vaccins (AVATT) sur la plateforme Africa medical supplies platform (AMSP), mise en place par l’Union africaine, pour acquérir des doses de vaccins supplémentaires dans le but d’atteindre un objectif de vaccination de 60% à l’échelle de l’ensemble de la population du continent.
Selon cette annonce, l’AVATT a donc reçu une offre de 300 millions de vaccins du Sputnik-V de la Russie. Ces vaccins russes seront disponibles pour une période de 12 mois, à compter de mai 2021.
Tous les pays africains pourront effectuer leurs pré-commandes auprès de la plateforme africaine afin d’acquérir ce vaccin.
L’offre ayant d’ores et déjà été enregistrée sur la plateforme de l’institution, les pays du continent qui le souhaitent peuvent donc directement y effectuer leurs commandes.
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Le Sputnik-V est le premier vaccin qui a été développé par les russes. Malgré la suspicion de pays occidentaux, la revue médicale britannique The Lancet a publié une étude démontrant que ce vaccin est efficace à 91,6%.
Actuellement, en Afrique, seule l’Algérie a eu recours au vaccin russe en se faisant livrer 50.000 doses. Mais la Russie compte aider encore l’Algérie, en lui permettant de produire ce vaccin localement. Cette proposition permettrait au donc naturellement à l’Algérie d’être à même de vacciner sa population plus facilement.
Ce choix des Russes s’explique certainement par le fait qu’Alger et Moscou sont des partenaires historiques, et ce, d’autant que la Russie est le principal fournisseurs d’armes à l’Algérie, qui est, d’ailleurs le premier acheteur d’armes d’Afrique.
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Avec ces 300 millions de doses du vaccin russe, et les 670 millions déjà commandés par l’Union africaine, le continent est donc sur la bonne voie pour atteindre son objectif de disposer, à terme, de 1,5 milliard de vaccins, pour vacciner 60% de la population africaine.
Ces commandes viendront s’ajouter à celles qui seront offertes dans le cadre du programme Covax de l’OMS, qui vise à fournir 20% des besoins de chaque pays. Les commandes effectuées par chaque pays pour ses propres besoins laissent espérer que l’Afrique pourrait atteindre son objectif de vaccination de 60% de la population du continent bien plus rapidement que prévu.