Les enquêteurs de la police scientifique "travaillent 24 heures sur 24" pour collecter des informations sur les sites des attaques, qui ont fait vendredi sept morts et 80 blessés parmi les forces de l'ordre, et qui ont été revendiquées par le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM) lié à Al-Qaïda, selon une source gouvernementale.
Une importante équipe d'une dizaine d'enquêteurs français spécialisés est venue prêter main forte aux autorités burkinabè. Dirigée par un procureur de la section antiterroriste du parquet de Paris, l'équipe comprend des enquêteurs de la sous-direction antiterroriste, de la Direction générale de la sécurité intérieure et de la police scientifique, selon des sources judiciaire et policière françaises.
Deux hommes soupçonnés d'être impliqués dans les attentats étaient entendus par la justice burkinabè lundi. Sur l'un deux pèsent de "très forts soupçons" et on lui prête un rôle clé dans l'opération, avait révélé dimanche une source gouvernementale. Ils avaient été arrêtés vendredi dans les accrochages suivant les attaques.
De plus, les enquêteurs soupçonnent qu'il y ait eu des complicités dans l'armée pour la préparation des attaques.
"Les fuites au niveau de l'armée commencent à se confirmer, l'enquête va dans ce sens", a confié la source gouvernementale.
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Le mode opératoire de l'attaque contre l'état-major laisse penser aux enquêteurs que les assaillants connaissaient les lieux, et qu'ils étaient renseignés sur la tenue d'une réunion de l'état-major burkinabè de la force G5 Sahel.
La salle où la réunion devait se tenir a été totalement détruite par l'explosion d'une voiture piégée, qui a précédé l'assaut des jihadistes. Cependant la réunion avait été changée de salle au dernier moment, évitant un carnage.
"On ne peut quand même que s'interroger et nourrir de légitimes inquiétudes quand le coeur de l'armée burkinabè est touché avec une facilité aussi déconcertante", selon un éditorial du quotidien indépendant L'Observateur Paalga. "La bête immonde a mis les pieds depuis 2015 dans la patrie des hommes intègres.
En s'en prenant à l'état-major général des armées (où les mesures de sécurité avaient pourtant été renforcées ces derniers temps) et à la représentation diplomatique française à Ouagadougou, il s'en sont pris à des symboles forts, des sanctuaires qu'on pensait inviolables, et pourtant profanés. Cruelle désillusion".
Au total neuf assaillants ont été tués dans les deux attaques coordonnées (quatre à l'ambassade de France, cinq à l'état-major), revendiquées par le GSIM qui dit avoir agi "en réponse à la mort de plusieurs de ses dirigeants dans un raid de l'armée française dans le nord du Mali il y a deux semaines".
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Le GSIM est une organisation jihadiste regroupant depuis un an plusieurs entités du Sahel liées à Al-Qaïda. Il est dirigé par le Touareg malien Iyad Ag Ghaly, chef d'Ansar Dine.
Après cette attaque, le président du Niger Mahamadou Issoufou a réaffirmé la solidité de l'alliance des pays sahéliens avec la France contre le terrorisme, au cours d'une visite à Ouagadougou.
"Je voudrais avoir une pensée pour les alliés, qui payent un lourd tribu dans ce combat que nous menons côte-à-côte contre le terrorisme et en particulier, parmi les alliés, la France, dont l'ambassade a été attaquée", a déclaré Issoufou, président en exercice du G5 Sahel.
Le président nigérien et le président togolais Faure Gnassingbé ont effectué une courte visite à Ouagadougou. Avec leur homologue burkinabè Roch Marc Christian Kaboré, ils se sont rendus sur les lieux des attaques de vendredi.
Issoufou est également président en exercice du G5 Sahel, alliance de cinq pays (Niger, Tchad, Mauritanie, Burkina Faso et Mali) qui est en train de mettre en place une force militaire régionale pour combattre les groupes jihadistes qui sévissent dans la zone.
Le Burkina Faso est depuis 2015 la cible d'attaques jihadistes, qui ont déjà frappé deux fois sa capitale en 2016 et 2017, sans jamais toutefois atteindre un tel niveau d'organisation.
Ougadougou retrouvait lundi son animation habituelle, après un week-end sous tension. Les Ouagalais qui avaient dû abandonner leurs deux-roues et leurs voitures dans la panique vendredi autour de l'état-major et de l'ambassade étaient autorisés à venir les rechercher et les occupants des immeubles avoisinant l'état-major pouvaient aussi les réintégrer.