Si les Etats-Unis et les pays européens ont mis en place des programmes de relance à coup de plusieurs milliers de milliards de dollars pour relancer leurs économies durement touchées par la pandémie du Covid-19, les pays africains, eux sont dans l’expectative.
Affectés globalement par les impacts de la pandémie, notamment la chute de la demande mondiale des matières premières dont ils sont exportateurs et les effets de la fermeture des frontières sur de nombreux secteurs dont particulièrement celui du voyage, les pays africains se sont beaucoup endettés durant l’année écoulée et ont désormais de plus en plus du mal à accéder aux financements, leur endettement étant décrié au moment où de nombreux pays demandent tout simplement l’annulation de la dette du continent.
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Et selon les estimations du Fonds monétaires international (FMI), l’Afrique pourrait même accuser un déficit de financement de 290 milliards de dollars entre 2020 et 2023. Or, sans l’accès au financement, point de relance post-Covid-19 au niveau du continent qui a accusé sa première récession depuis un demi-siècle.
C’est face à cette situation que le président français Emmanuel Macron a décidé de réunir, ce mardi 18 mai, à Paris, et en présentiel, une trentaine de dirigeants africains et européens avec les dirigeants des grandes institutions financières et développement afin d’élaborer un plan à même de sortir le continent de l’asphyxie financière.
La rencontre sera scindée en deux thématiques: «Financement et le traitement de la dette publique» et «Le secteur privé africain».
Concernant le volet dette publique africaine, celle-ci a connu un bond considérable en 2020. La dette publique africaine représente 58% du PIB globale du continent, contre 52% en 2019, et 17 pays africains sont en situation de surendettement.
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Les pays africains aspirent tout simplement à l’annulation de celle-ci, alors que les pays développés n’ont offert en 2020 qu’un moratoire qui a permis à certains pays du continent de repousser le remboursement du service de la dette. Et ce moratoire qui n’a concerné que certains pays du continent, ne satisfait pas les pays africains. Ceux-ci réclament un «moratoire immédiat sur le service de toutes les dettes extérieures (…) jusqu’à la fin de la pandémie».
Face à cette situation, il n’est pas question d’annulation massive de la dette africaine lors du Sommet de Paris, mais d’apporter des liquidités massives aux économies africaines.
Ainsi, il est question lors du Sommet de Paris de réallouer les DTS –Droits de tirage spéciaux- au profit du continent africain. En effet, ces DTS sont répartis en fonction des quotes-parts de chaque pays au FMI, donc en fonction du poids spécifique des pays et de leur contribution aux ressources de l’institution.
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Du coup, la plus grosse part va aux pays riches qui en ont le moins besoin, alors que le continent, théoriquement, ne peut bénéficier que de 34 milliards de dollars (24 milliards de dollars pour l’Afrique subsaharienne), sous forme de DTS, sur un programme d’émission globale exceptionnelle de DTS de 650 milliards de dollars au profit de 183 pays. Il s’agira du 5e tirage de DTS de l’histoire du FMI, le dernier s’est déroulé en 2008, au lendemain de la crise financière. Pour le continent, il s’agit d’une goutte d’eau sachant que les besoins de financement estimés par le FMI sont compris entre 250 et 425 milliards de dollars pour la période 2021-2025.
Du coup, c’est le principe de cette réallocation des DTS des pays développés au profit des pays pauvres qui sera au menu des discussions à Paris en accordant une part beaucoup plus importante aux pays africains. Une parade qui permet aux pays du continent d’accéder à davantage de ressources financières sachant que les DTS peuvent être convertis en devises par les pays bénéficiaires et éviter ainsi à ceux-ci un endettement supplémentaire.
Si ce problème est résolu, cela permettra aux pays africains d’accéder plus facilement au financement pour relancer leurs économies sans s’endetter.
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A ce titre, le président ivoirien Alassane Ouattara, ancien vice-président du FMI, a demandé la révision des quotes-parts des pays africains afin de permettre à ceux-ci un meilleur accès à cet instrument de financement et à financer leur relance post-Covid-19 sans s’endetter davantage.
Outre le volet de la dette et du financement, il est question de miser sur le secteur privé pour relancer les économies africaines. Sur ce point, il sera surtout question de débattre sur la manière de résoudre l’équation du coût du financement des entreprises africaines, notamment les PME, soumises à des taux d’intérêt exorbitants.
Ces taux d’intérêt constituent de véritables obstacles au financement des entreprises au niveau du continent et entravent le développement du secteur privé africain en excluant de nombreuses petites et moyennes entreprises qui sont celles qui ont créé de la valeur et des emplois.
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A ce titre, outre les mécanismes de garanties des prêts, il sera question d’orienter les fonds d’investissement à miser sur le continent et de renforcer les banques africaines afin qu’elles puissent s’engager davantage dans le financement du secteur privé du continent.
Rappelons que 18 chefs d’Etat et de gouvernement africains sont présents à Paris dont Paul Kagame (Rwanda), Félix Tshisekedi (RDC), Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), Macky Sall (Sénégal), Felipe Nyusi (Mozambique), Abdel Fettah al-Sissi (Egypte), Kaïs Saied (Tunisie), Cyril Ramaphosa (Afrique du Sud),…
Les Etats-Unis seront représentés par Janet Yellen, le FMI par sa directrice générale Kristalina Georgieva, la Banque mondiale par Makhtar Diop, directeur général de l’IFC…