Tidjane Thiam, actuel patron du Crédit Suisse, fut au milieu des années 1990, à sa fraîche trentaine, le plus jeune ministre dans un gouvernement ivoirien sous la présidence de Henri Konan Bédié.
Polytechnicien et ancien du cabinet McKinsey, il était revenu en Côte d’Ivoire en 1994 pour diriger le BNETD, la réputée agence publique d’études en charge des grands projets d’infrastructures, avant de prendre les rênes du ministère en charge du Plan.
Mais sa sortie en politique a été précipitée, plus tôt que prévu, avec le coup d’Etat de 1999 qui a évincé Henri Konan Bédié et qui a entraîné son départ du pays.
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Il entame alors une nouvelle carrière internationale qui le conduira ensuite à la tête du géant financier britannique Prudential (il fut alors le premier africain à diriger une société du FTSE 100) avant de prendre les commandes du Crédit Suisse.
Avec un tel parcours, Tidjane Thiam fait donc figure de candidat idéal pour nombre de ses compatriotes. Il y a deux ans déjà, l’hebdomadaire ivoirien d’investigation «L’Eléphant déchaîné» titrait même que Alassane Ouattara le courtisait pour lui succéder à la tête du pays. Et lorsque le chef de l’exécutif ivoirien évoquait récemment sa volonté de confier le pouvoir à «une nouvelle génération», bien des regards se sont tournés vers le patron du Crédit Suisse.
Mais il n’y a pas que Ouattara à le convoiter. Des sources au sein du PDCI voudraient même que le président du parti, Henri Konan Bédié, dont il a été le ministre, soit également aux aguets pour en faire son candidat idéal, capable de détrôner son rival du RHDP.
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Sur la toile, des Ivoiriens se mobilisent: «un million de signatures pour Tidjane Thiam», «Tidjane Thiam horizon 2020», «Génération Tidjane Thiam», «Les amis de Tidjane Thiam» sont autant de pages Facebook dédiées au patron du groupe suisse pour l’inciter à se porter candidat.
La question semble avoir pris une tournure qui manifestement agace l’intéressé. Dans un communiqué, publié ce 6 septembre, il a confié être «touché et honoré par toutes les marques de soutien récemment exprimées à son égard par nombre de ses compatriotes ivoiriens». Mais il a insisté sur sa «détermination à ne pas avoir d’activité politique» et sur son «engagement à long terme» envers le Crédit Suisse.
Un message destiné à rassurer les actionnaires du groupe suisse dont l’Ivoirien a engagé la restructuration ou une réelle volonté de ne pas se mêler de la politique ivoirienne? Ou peut-être la crainte de subir le sort d’un Lionel Zinsou qui a échoué à se faire élire à la tête du Bénin?
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Interrogé, un analyste politique ivoirien a estimé que Tidjane Thiam peut éviter le cas Zinsou en se décidant maintenant et non à quelques mois de cette échéance: «nous sommes à deux ans de la présidentielle et c’est maintenant qu’il doit se décider et s’engager pour avoir toutes ses chances. Si on avait un RHDP uni, comprenant le PDCI, il aurait fait le candidat du consensus et aurait très certainement remporté haut la main la présidentielle de 2020». Mais un tel schéma n’est plus à l’ordre du jour.
A 56 ans, Tidjane Thiam, qui fut un temps cité pour remplacer Christine Lagarde à la tête du FMI, a encore devant lui une belle carrière internationale à la tête du Crédit Suisse. Et l’appel du pays semble encore loin de ses ambitions.